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Document 62011CJ0405
Judgment of the Court (Sixth Chamber) of 21 March 2013.#European Commission v Buczek Automotive sp. z o.o.#Appeal — State aid — Restructuring of the Polish steel industry — Concept of State aid — Recovery of public debts — Classification as State aid of the failure to request the liquidation of the debtor undertaking — Private creditor test — Allocation of the burden of proof — Limits of judicial review.#Case C‑405/11 P.
Domstolens dom (Sjette Afdeling) af 21. marts 2013.
Europa-Kommissionen mod Buczek Automotive sp. z o.o.
Appel – statsstøtte – strukturomlægning af den polske stålindustri – begrebet statsstøtte – inddrivelse af offentlig gæld – betegnelse af manglende begæring om, at debitorvirksomheden erklæres konkurs, som statsstøtte – kriteriet om den private kreditor – fordeling af bevisbyrden – grænser for domstolsprøvelsen.
Sag C-405/11 P.
Domstolens dom (Sjette Afdeling) af 21. marts 2013.
Europa-Kommissionen mod Buczek Automotive sp. z o.o.
Appel – statsstøtte – strukturomlægning af den polske stålindustri – begrebet statsstøtte – inddrivelse af offentlig gæld – betegnelse af manglende begæring om, at debitorvirksomheden erklæres konkurs, som statsstøtte – kriteriet om den private kreditor – fordeling af bevisbyrden – grænser for domstolsprøvelsen.
Sag C-405/11 P.
Samling af Afgørelser 2013 -00000
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:186
ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)
21 mars 2013 (*)
«Pourvoi – Aides d’État – Restructuration de l’industrie sidérurgique polonaise – Notion d’‘aide d’État’ – Recouvrement de créances publiques – Qualification d’aide d’État de l’abstention de demander la mise en faillite de l’entreprise débitrice – Critère du créancier privé – Répartition de la charge de la preuve – Limites du contrôle juridictionnel»
Dans l’affaire C‑405/11 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 28 juillet 2011,
Commission européenne, représentée par Mme A. Stobiecka-Kuik et M. T. Maxian Rusche, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant:
Buczek Automotive sp. z o.o., établie à Sosnowiec (Pologne), représentée par M. J. Jurczyk, radca prawny,
partie demanderesse en première instance,
République de Pologne, représentée par Mme M. Krasnodębska-Tomkiel, en qualité d’agent,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M. A. Rosas, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. U. Lõhmus et A. Arabadjiev (rapporteur), juges,
avocat général: M. P. Mengozzi,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 17 mai 2011, Buczek Automotive/Commission (T-1/08, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a annulé l’article 1er de la décision 2008/344/CE de la Commission, du 23 octobre 2007, concernant l’aide d’État C 23/06 (ex NN 35/06) mise à exécution par la Pologne en faveur du groupe Technologie Buczek, un producteur d’acier (JO 2008, L 116, p. 26, ci-après la «décision litigieuse»), et les articles 3, paragraphes 1 et 3, ainsi que 4 et 5 de celle-ci, dans la mesure où ces dispositions concernent Buczek Automotive sp. z o.o. (ci-après «BA»).
Les antécédents du litige
2 Les antécédents du litige sont exposés comme suit dans l’arrêt attaqué:
«Évolution de la situation de [Technologie Buczek SA] et de ses filiales, BA et [Huta Buczek sp. z o.o.], entre 2001 et 2006
1 [BA], une société établie en Pologne, est active dans la production de tubes, principalement, à usage automobile. Au moment des faits litigieux, BA était une filiale de Technologie Buczek SA (ci‑après «TB»), un fabricant de tubes également établi en Pologne. TB possédait plusieurs autres filiales dont Huta Buczek sp. z o.o. (ci-après «HB»), active dans la production de cylindres.
2 À partir de 2001, TB a fait face à des dettes croissantes. Les créanciers publics de TB étaient les organismes suivants: le Zakład Ubezpieczeń Społecznych (ci-après le «ZUS»), qui est l’organisme polonais d’assurance sociale, le Państwowy Fundusz Rehabilitacji Osób Niepełnosprawnych, qui est le fonds national pour la réinsertion des personnes handicapées, le Trésor public et la commune de Sosnowiec (Pologne). TB était également débitrice de créanciers privés, dont Eurofaktor SA […] Les créances de cette dernière à l’égard de TB s’élevaient à environ 35 millions de zlotys polonais (PLN), un montant plus élevé que l’ensemble des créances publiques, ce qui en faisait son principal créancier.
3 En 2002, TB a élaboré un plan de restructuration pour faire face à ses difficultés financières. Sur la base de ce plan, TB est devenue admissible au bénéfice d’une aide d’État au titre du programme national de restructuration de l’industrie sidérurgique polonaise, dans le cadre duquel la République de Pologne a prévu l’octroi d’aides d’État à ladite industrie en vue de sa restructuration, pour la période allant de 1997 à 2006. Le programme national de restructuration a été approuvé par le protocole n° 8 sur la restructuration de l’industrie sidérurgique polonaise (JO 2003, L 236, p. 948, ci-après le «protocole n° 8»), lequel fait partie intégrante de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 2003, L 236, p. 33), conformément à l’article 60 dudit acte.
4 Le plan de restructuration de TB prévoyait plusieurs types d’aides, dont des aides à l’emploi, des aides à la recherche et au développement ainsi que des mesures de restructuration financière, sous la forme d’une annulation ou d’un rééchelonnement des dettes de TB à l’égard d’organismes publics.
5 Les mesures de restructuration financière n’ont cependant jamais été autorisées, dans la mesure où deux conditions essentielles prévues respectivement par le protocole n° 8 et par la législation polonaise n’étaient pas remplies, et la dette de TB n’a été ni annulée ni rééchelonnée.
6 Dès lors, entre 2004 et 2006, les organismes publics cités au point 2 [de l’arrêt attaqué] ont adopté des mesures visant à recouvrer les sommes dues par TB. Ainsi, conformément aux dispositions de l’ustawa z dnia 17 czerwca 1966 r. o postepowaniu egzekucyjnym w administracji (loi du 17 juin 1966 relative aux voies d’exécution de l’administration), le ZUS, la commune de Sosnowiec et le Trésor public ont procédé à des saisies sur le patrimoine de TB, telles que des saisies de comptes bancaires, de créances ou de trésorerie. En outre, en vertu de l’article 66 de l’ordynacja podatkowa (loi portant code des impôts) du 19 août 1997, la commune de Sosnowiec a obtenu le transfert de la propriété de certains actifs, à savoir des parcelles de terrain appartenant à TB, en sa faveur. De surcroît, parallèlement aux mesures de recouvrement, afin de garantir leurs créances, les organismes publics ont obtenu des sûretés sur les actifs de TB. En particulier, le ZUS a constitué des hypothèques pour un montant de 25 millions de PLN et possédait des gages sur les actifs de production de TB pour une valeur d’environ 12 millions de PLN. Enfin, sur le fondement de l’article 112 de l’ordynacja podatkowa, le ZUS de Sosnowiec a également tenté, sans succès, de recouvrer ses créances auprès de HB.
7 Le 1er janvier 2006, BA a conclu avec TB un contrat de bail portant sur des actifs de production dont la valeur s’élevait à 6 383 000 PLN. Ce contrat a été conclu pour une durée indéterminée. Il y était prévu que BA paye à TB, hors [taxe sur la valeur ajoutée], 258 000 PLN par mois. En outre, en juillet 2006, BA a bénéficié d’une augmentation de capital de 1 550 000 PLN.
8 En 2005 et 2006, TB a procédé à une augmentation du capital de HB par plusieurs injections de capital, pour un montant total de 14 811 600 PLN. Ces injections de capital ont pris la forme d’un apport d’actifs immobilisés correspondant à du matériel de fonderie, d’un apport en numéraire, de compensations de créances, d’un apport de biens immatériels et de droits. À chaque augmentation de capital, TB recevait des titres de HB.
9 Le 16 août 2006, TB a été déclarée en faillite mais a été autorisée à continuer d’exercer une activité économique.
Procédure administrative devant la Commission
10 En 2005, une évaluation indépendante réalisée dans le cadre de la mise en œuvre et du suivi du protocole n° 8 a révélé une augmentation des obligations financières de TB auprès des créanciers publics et une absence de rentabilité. Par lettres des 29 mars, 1er août et 2 décembre 2005, la Commission […] a demandé des informations supplémentaires aux autorités polonaises. Ces dernières ont répondu par lettres des 23 juin et 28 septembre 2005 ainsi que du 14 février 2006.
11 Par lettre du 7 juin 2006, la Commission a notifié à la République de Pologne sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE. Cette décision a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 19 août 2006 (JO C 196, p. 23). Dans cette décision, la Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations. Seule la République de Pologne a répondu à cette invitation.
12 Au terme de la procédure formelle d’examen, la Commission a adopté la décision [litigieuse].
13 Dans la décision [litigieuse], la Commission a constaté que, en 2005 et 2006, TB a procédé à une restructuration du groupe et a cédé deux activités rentables: la production de cylindres en acier chromé, transférée à HB, et la production de tubes en acier revêtus d’aluminium et de tubes chromés, transférée à BA.
14 Elle a également relevé, s’agissant des créances des autorités publiques à l’égard de TB, que, si les mesures de recouvrement exigées par la loi ainsi que d’autres mesures, telles que la constitution d’hypothèques, avaient été adoptées par lesdites autorités, les remboursements effectués par TB étaient insignifiants, en 2004. À cet égard, elle a souligné que, dès la fin de l’année 2004, il était évident que TB n’était plus en mesure d’honorer ni ses dettes ni ses engagements courants. Or, selon la Commission, les autorités polonaises possédaient de solides garanties, qu’elles avaient la possibilité de transformer en liquidités, dans le cadre d’une procédure de faillite. Dès lors, selon la Commission, l’utilisation de ces garanties semblait plus raisonnable, du point de vue d’un hypothétique créancier privé, qu’une restructuration.
15 La Commission a conclu que les autorités polonaises avaient renoncé à l’exécution forcée pour un montant de 20 761 643 PLN. Elle a ajouté que, dans la mesure où le renoncement à l’exécution forcée avait eu le même effet que l’octroi au bénéficiaire de la totalité du montant non remboursé, l’avantage ainsi obtenu portait sur un montant de 20 761 643 PLN reçu à partir du 1er janvier 2005. En outre, elle a considéré que BA et HB avaient bénéficié de l’aide. Elle a estimé que TB n’avait pas conservé l’aide, car le défaut d’exécution forcée avait permis à l’entreprise de poursuivre son activité économique et d’organiser sa restructuration interne.
16 Eu égard à ce qui précède, à l’article 1er de la décision [litigieuse], la Commission déclare incompatible avec le marché commun l’aide d’État à hauteur de 20 761 643 PLN illégalement accordée par la République de Pologne au groupe Technologie Buczek […]
17 À l’article 3, paragraphes 1 et 3, de la décision [litigieuse], la Commission ordonne à la République de Pologne la récupération de cette somme, majorée d’intérêts de retard, en précisant que cette récupération doit être exécutée auprès des filiales HB et BA, en proportion de l’aide qu’elles ont effectivement reçue, c’est-à-dire auprès de HB, pour un montant de 13 578 115 PLN, et auprès de BA, pour un montant de 7 183 528 PLN.
18 Selon les articles 4 et 5 de la décision [litigieuse], la République de Pologne est tenue de mettre en œuvre cette décision au cours des quatre mois suivant sa notification et d’informer la Commission, dans un délai de deux mois à compter de sa notification, des mesures qu’elle a prises pour s’y conformer.
19 Aux termes de son article 6, la décision [litigieuse] est adressée à la République de Pologne.»
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
3 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 janvier 2008, BA a introduit un recours tendant, à titre principal, à l’annulation des articles 1er et 3, paragraphes 1 et 3, de la décision litigieuse ainsi que, en tant qu’ils la concernent, des articles 4 et 5 de celle-ci. À titre subsidiaire, BA demandait l’annulation des articles 1er et 3, paragraphes 1 et 3, de la décision litigieuse, en tant que la Commission y ordonne la récupération d’un montant de 7 183 528 PLN auprès de BA.
4 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 18 mars 2008, la République de Pologne a demandé à intervenir au soutien des conclusions de BA. Par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 13 mai 2008, la République de Pologne a été admise à intervenir.
5 À l’appui de son recours, BA a soulevé six moyens. Le premier était pris d’une violation des articles 87, paragraphe 1, CE et 88, paragraphe 2, CE. Par son deuxième moyen, BA invoquait une violation des articles 253 CE et 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
6 Le Tribunal a accueilli la première branche du premier moyen du recours et, à titre surabondant, le deuxième moyen du recours. En conséquence, il a annulé les articles 1er et 3, paragraphes 1 et 3, ainsi que 4 et 5 de la décision litigieuse.
7 S’agissant de la première branche du premier moyen, le Tribunal a considéré, notamment, ce qui suit:
«92 [...] s’agissant du bénéfice qu’un créancier privé hypothétique aurait pu espérer obtenir dans le cadre d’une procédure de faillite, il y a lieu de relever que la Commission a affirmé, au considérant 88 de la décision [litigieuse], qu’un ‘examen attentif des avantages résultant d’un ajournement du remboursement des dettes aurait démontré que le remboursement potentiel n’aurait pas été supérieur au remboursement sécurisé résultant d’une liquidation possible de la société’. Le Tribunal constate, néanmoins, que la décision [litigieuse] ne fait pas apparaître les éléments matériels sur lesquels cette affirmation se fonde.
93 En particulier, la Commission n’indique pas, dans la décision [litigieuse], si elle a disposé, au soutien de cette affirmation, d’analyses comparant le bénéfice qui reviendrait au créancier privé hypothétique à l’issue d’une procédure de faillite – en tenant compte notamment des frais engendrés par une telle procédure – par rapport au bénéfice de la procédure légale de recouvrement des dettes publiques.
94 Interrogée sur ce point, par le biais d’une question écrite à laquelle il lui a été demandé de répondre lors de l’audience du 7 septembre 2010, la Commission n’a pas été en mesure d’indiquer si de telles analyses et études avaient été préparées et utilisées en vue de l’adoption de la décision [litigieuse]. Elle s’est contentée d’expliquer que lesdites analyses figuraient aux considérants 84, 87 et 88 de la décision [litigieuse]. Or, ces considérants ne contiennent aucune analyse comparative du produit prévisible de la procédure légale de recouvrement des dettes publiques et de la procédure de faillite. De surcroît, la Commission n’a pas été en mesure de produire de documents contenant une telle analyse, comme le Tribunal le lui avait demandé. Dès lors, force est de constater que l’affirmation figurant au point 88 de la décision [litigieuse] n’est étayée par aucun élément de preuve.
95 [...] s’agissant d’autres facteurs susceptibles d’influencer le choix d’un créancier privé hypothétique, le Tribunal constate que la Commission n’indique pas, dans la décision [litigieuse], si elle a disposé d’études ou d’analyses comparant la durée de la procédure de faillite par rapport à la procédure légale de recouvrement des dettes publiques. Au contraire, interrogée sur ce point, par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure à laquelle il lui a été demandé de répondre lors de l’audience du 7 septembre 2010, la Commission a indiqué ne pas avoir comparé la durée des deux procédures, au motif que la situation de TB, en 2005, était telle que la faillite était inévitable.
96 Eu égard à ce qui précède, le Tribunal considère que la Commission ne disposait pas des éléments matériels lui permettant d’affirmer qu’un créancier privé aurait, à la fin de 2004, opté pour la procédure de faillite. Il convient donc de conclure, eu égard à la jurisprudence […] et sans qu’il soit nécessaire de vérifier la validité des conclusions tirées par la Commission à l’issue, d’une part, de l’analyse des garanties que possédaient les autorités polonaises et, d’autre part, de l’évaluation des perspectives de TB, que l’application faite par la Commission du test du créancier privé hypothétique contrevient à l’article 87, paragraphe 1, CE et que, partant, la Commission n’a pas valablement établi l’existence d’une aide d’État accordée à TB.»
La procédure devant la Cour et les conclusions des parties
8 Par lettre du 31 décembre 2012, parvenue au greffe de la Cour le 7 janvier 2013, le représentant de BA a informé cette dernière que, à la suite de sa liquidation, intervenue le 28 septembre 2012, BA a été radiée, le 19 novembre 2012, du registre des entreprises polonais.
9 Par lettre du 28 janvier 2013, la Cour a notifié cette lettre aux autres parties à la procédure et les a invitées à présenter leurs observations sur l’incidence éventuelle de cette radiation sur la présente procédure.
10 Par lettres, respectivement, des 5 février et 12 février 2013, parvenues au greffe de la Cour le 12 février 2013, le gouvernement polonais et la Commission ont présenté des observations écrites devant la Cour. Le gouvernement polonais considère que la procédure doit être poursuivie, car il serait nécessaire d’éliminer définitivement la décision litigieuse qui, selon lui, est entachée de vices et qui impose des obligations à la République de Pologne. La Commission, pour sa part, considère que, si l’annulation par le Tribunal de l’article 1er de la décision litigieuse devait avoir un effet erga omnes et si, en conséquence, la non-annulation de l’arrêt attaqué avait comme effet que la récupération de l’aide soit impossible non seulement auprès de BA, mais également auprès de HB, la Commission continuerait à avoir un intérêt à l’annulation dudit arrêt. Si, en revanche, les conséquences juridiques découlant des articles 3, paragraphe 1, ainsi que 4 et 5 de la décision litigieuse restaient en vigueur en ce qui concerne HB et la République de Pologne, la Commission ne disposerait plus d’un intérêt à l’annulation de l’arrêt attaqué.
11 La Commission demande à la Cour:
– d’annuler l’arrêt attaqué;
– de statuer définitivement sur les questions faisant l’objet du pourvoi;
– de renvoyer l’affaire devant le Tribunal en ce qui concerne les autres griefs soulevés en première instance, et
– de réserver les dépens.
12 BA demande à la Cour:
– de rejeter le pourvoi comme étant non fondé, et
– de condamner la Commission aux dépens.
13 Le gouvernement polonais demande à la Cour de rejeter le pourvoi.
Sur le pourvoi
14 À titre liminaire, il convient de relever que la radiation de BA, le 19 novembre 2012, du registre des entreprises polonais n’est pas de nature à affecter la recevabilité du présent pourvoi.
15 Selon une jurisprudence constante de la Cour, cette dernière peut soulever d’office le défaut d’intérêt d’une partie à introduire ou à poursuivre un pourvoi, en raison d’un fait postérieur à l’arrêt du Tribunal de nature à enlever à celui-ci son caractère préjudiciable pour le demandeur au pourvoi, et déclarer le pourvoi irrecevable ou sans objet pour ce motif. En effet, l’existence d’un intérêt à agir du requérant suppose que le pourvoi soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a introduit (arrêts du 19 octobre 1995, Rendo e.a./Commission, C‑19/93 P, Rec. p. I‑3319, point 13, et du 13 juillet 2000, Parlement/Richard, C‑174/99 P, Rec. p. I‑6189, point 33).
16 Au soutien de son pourvoi, la Commission soulève deux moyens tirés, le premier, d’une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et, le second, d’une violation de la même disposition, lue en combinaison avec l’article 253 CE et le protocole n° 8.
17 Le premier moyen se divise en deux branches relatives, la première, à l’appréciation du critère du créancier privé et, la seconde, à la répartition de la charge de la preuve.
18 Partant, si la Cour devait accueillir le premier moyen, l’arrêt de la Cour serait susceptible de procurer à la Commission le bénéfice de l’annulation de l’arrêt attaqué et le rétablissement de la décision litigieuse dans son intégralité, y compris de l’article 1er de celle-ci.
19 Partant, le pourvoi, à le supposer fondé, reste susceptible, en tout état de cause, de procurer un bénéfice à la Commission.
20 Dans ces conditions, il convient d’examiner le pourvoi au fond et, en premier lieu, la seconde branche du premier moyen.
Sur la seconde branche du premier moyen, relative à la répartition de la charge de la preuve
Argumentation des parties
21 La Commission fait valoir que le Tribunal a enfreint l’article 87, paragraphe 1, CE en lui demandant d’apporter la preuve que les conditions d’application du critère du créancier privé étaient réunies en l’espèce.
22 Selon elle, il résulte de la jurisprudence tant de la Cour que du Tribunal qu’il lui appartient de démontrer que la mesure étatique litigieuse remplit à première vue l’ensemble des conditions énoncées à l’article 87, paragraphe 1, CE. En revanche, il incomberait à l’État membre concerné, ainsi que la Cour l’aurait jugé dans son arrêt du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission (C‑334/99, Rec. p. I‑1139, point 139), de démontrer que sont réunies les conditions permettant de déroger aux exigences énoncées à cette disposition telles qu’interprétées par la jurisprudence de la Cour. En effet, les exceptions devraient être interprétées restrictivement et prouvées par la partie qui entend s’en prévaloir. Or, parmi les exceptions relatives aux conditions de l’existence d’un avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE figurerait le critère du créancier privé.
23 En outre, le Tribunal a violé, selon la Commission, les principes tenant compte de la difficulté de présenter des preuves dites «négatives». En effet, l’attribution à la Commission de la charge de la preuve conduirait, dans le cas du critère du créancier privé, «à promouvoir une argumentation des États membres sans rapport avec le fond de l’affaire». Le Tribunal aurait ainsi «acculé la Commission dans une impasse», cette dernière ne pouvant, après analyse des éléments, ni constater que le critère du créancier privé est satisfait ni contester la véracité de cette affirmation.
24 La Commission aurait mené, de manière diligente et impartiale, la procédure d’examen des mesures étatiques en question, pour disposer des informations les plus complètes et les plus fiables. Or, les arguments avancés par le gouvernement polonais ne permettraient pas de procéder aux analyses exigées par le Tribunal. Ce dernier aurait donc imposé à la Commission l’obligation de présenter des preuves et d’examiner des éléments qui n’ont pas fait l’objet d’une analyse au regard du critère du créancier privé, en sachant que de tels éléments matériels n’ont pas été transmis à la Commission au cours de la procédure administrative.
25 La Commission ajoute que la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont elle pouvait disposer au moment où elle a adopté cette décision.
26 Le gouvernement polonais fait notamment valoir que, par son argumentation au soutien de la seconde branche du premier moyen, la Commission vise, en réalité, la preuve de l’existence ou non de l’aide d’État dans la décision litigieuse. Partant, elle contesterait l’appréciation des faits réalisée par le Tribunal ainsi que l’importance qu’il a accordée aux éléments qui lui ont été présentés. Ces questions relevant de la compétence exclusive du Tribunal, cette branche devrait être rejetée comme étant irrecevable.
Appréciation de la Cour
27 Par la seconde branche de son premier moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal, en lui faisant à tort porter la charge de la preuve de ce que les conditions du critère du créancier privé étaient réunies en l’espèce, a commis une erreur de droit.
28 Aussi, cette argumentation vise-t-elle à contester non pas l’appréciation des faits effectuée par le Tribunal, mais l’obligation mise à la charge de la Commission en matière de preuve. Il s’ensuit que cette branche du premier moyen est recevable.
29 Quant au fond, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 87, paragraphe 1, CE, sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.
30 La notion d’aide comprend non seulement des prestations positives telles que des subventions, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui grèvent normalement le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques (arrêts du 1er décembre 1998, Ecotrade, C‑200/97, Rec. p. I‑7907, point 34, et du 19 mai 1999, Italie/Commission, C‑6/97, Rec. p. I‑2981, point 15).
31 Toutefois, les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’«aide» au sens de l’article 107 TFUE ne sont pas satisfaites si l’entreprise bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’État dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché (arrêts du 5 juin 2012, Commission/EDF, C‑124/10 P, non encore publié au Recueil, point 78 et jurisprudence citée, ainsi que du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C-73/11 P, non encore publié au Recueil, point 70).
32 Cette appréciation s’effectue, lorsqu’un créancier public octroie des facilités de paiement pour une dette qui lui est due par une entreprise, par application, en principe, du critère du créancier privé. En effet, ce critère, lorsqu’il est applicable, figure parmi les éléments que la Commission est tenue de prendre en compte pour établir l’existence d’une telle aide (arrêts du 29 avril 1999, Espagne/Commission, C‑342/96, Rec. p. I‑2459, point 46; du 29 juin 1999, DM Transport, C‑256/97, Rec. p. I‑3913, point 24; Commission/EDF, précité, points 78 et 103, ainsi que Frucona Košice/Commission, précité, point 71).
33 Par conséquent, lorsqu’il apparaît que le critère du créancier privé pourrait être applicable, il incombe à la Commission de demander à l’État membre concerné de lui fournir toutes les informations pertinentes lui permettant de vérifier si les conditions d’application de ce critère sont remplies (voir arrêt Commission/EDF, précité, point 104).
34 Il résulte de ce qui précède que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en faisant peser sur la Commission la charge de la preuve de ce que les conditions du critère du créancier privé étaient réunies en l’espèce.
35 De surcroît, contrairement à ce que prétend la Commission, la décision litigieuse est fondée non pas sur un défaut de production d’éléments qui avaient été demandés par la Commission au gouvernement polonais, mais, ainsi que l’a relevé à juste titre ce gouvernement, sur le constat qu’un créancier privé ne se serait pas comporté de la même manière que les autorités polonaises, constatation qui suppose que la Commission a disposé de tous les éléments pertinents nécessaires à l’élaboration de sa décision.
36 Dans ces conditions, la seconde branche du premier moyen doit être écartée.
Sur la première branche du premier moyen, relative au critère du créancier privé
Argumentation des parties
37 La Commission fait valoir que le Tribunal, en n’évaluant pas l’application faite par celle-ci du critère du créancier privé conformément à l’article 87, paragraphe 1, CE et à la jurisprudence afférente à cette disposition, a commis une erreur de droit.
38 En particulier, il n’aurait pas démontré l’erreur manifeste d’appréciation prétendument commise par la Commission, lorsqu’elle estime que TB a obtenu un avantage que ne lui aurait pas accordé un créancier privé hypothétique, ni en quoi la décision litigieuse contiendrait des contradictions manifestes.
39 La Commission soutient que le Tribunal a estimé à tort qu’elle était tenue de recueillir des informations supplémentaires en vue d’établir l’existence d’une aide, de telles informations n’étant pas déterminantes pour l’appréciation de la situation de TB, eu égard à l’arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott (C‑290/07 P, Rec. p. I-7763, point 65), et à la situation économique de TB, de laquelle il ressortait qu’il était inévitable qu’elle fasse faillite en 2005.
40 À cet égard, le Tribunal aurait commis également une erreur de droit en considérant que la Commission devait appliquer par analogie les éléments mentionnés dans l’arrêt du Tribunal du 11 juillet 2002, HAMSA/Commission (T‑152/99, Rec. p. II‑3049), et, en particulier, procéder à une analyse comparative de la durée de la procédure de recouvrement des différentes créances par rapport à celle de la procédure de faillite, ou évaluer l’avantage probable qui résulterait des diverses méthodes d’apurement des dettes. Selon la Commission, le cadre factuel de la présente affaire diffère de celui ayant donné lieu audit arrêt, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de procéder par analogie avec celui-ci.
41 La Commission estime que le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, semble considérer que le créancier d’une entreprise en difficulté peut soit demander l’exécution forcée pour le recouvrement de ses créances, soit engager une procédure de mise en faillite. Or, selon la Commission, l’exécution des titres exécutoires doit précéder l’exécution d’une procédure de faillite. Ce n’est que si l’exécution forcée d’un titre exécutoire ne procure pas au créancier le résultat escompté que celui-ci aurait le droit de déposer une demande de mise en faillite. Le débiteur devrait se protéger contre cette exécution forcée en introduisant lui-même une demande de mise en faillite.
42 Dans ces circonstances, la Commission aurait fondé le raisonnement qu’elle a suivi dans la décision litigieuse concernant le critère du créancier privé sur l’arrêt du Tribunal du 21 octobre 2004, Lenzing/Commission (T‑36/99, Rec. p. II‑3597, points 159 à 161), confirmé par la Cour dans l’arrêt du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing (C‑525/04 P, Rec. p. I‑9947). En mettant en cause, dans l’arrêt attaqué, l’interprétation effectuée par la Commission de cette jurisprudence, le Tribunal aurait commis une erreur de droit.
43 La Commission ajoute que, au point 25 de l’arrêt DM Transport, précité, la Cour a jugé qu’il incombait à la juridiction nationale de déterminer si les facilités de paiement octroyées par une entité publique à la société concernée étaient manifestement plus importantes que celles qu’un créancier privé aurait accordées à cette société. Or, cette obligation imposerait non pas la réalisation d’analyses précises, mais la prise en considération des éléments dont un créancier privé aurait tenu compte pour prendre sa décision. Le Tribunal aurait, de ce fait, commis une erreur de droit en imposant, au point 93 de l’arrêt attaqué, à la Commission de comparer les résultats des procédures légales de recouvrement avec les bénéfices qui seraient tirés d’une procédure de mise en faillite.
44 En outre, la Commission estime qu’elle ne pouvait admettre que le critère du créancier privé fût réputé rempli en raison du fait que le gouvernement polonais n’avait pas fourni d’éléments de preuve remettant en cause la conclusion selon laquelle un avantage a été octroyé à TB. De plus, selon la Commission, même d’hypothétiques créanciers privés n’auraient pas pris de tels éléments en considération.
Appréciation de la Cour
45 Ainsi qu’il a été relevé aux points 30 à 32 du présent arrêt, la notion d’aide comprend des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui grèvent normalement le budget d’une entreprise. Toutefois, les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’aide ne sont pas satisfaites si l’entreprise bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, cette appréciation s’effectuant, lorsqu’un créancier public octroie des facilités de paiement pour une dette d’une entreprise à l’égard de ce dernier, par application, en principe, du critère du créancier privé.
46 De telles facilités de paiement constituent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE si, compte tenu de l’importance de l’avantage économique ainsi octroyé, l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un créancier privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle du créancier public et cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur connaissant des difficultés financières (arrêts précités Espagne/Commission, point 46; DM Transport, point 30; Commission/EDF, point 79, et Frucona Košice/Commission, point 72).
47 Il appartient donc à la Commission d’effectuer une appréciation globale prenant en compte tout élément pertinent en l’espèce lui permettant de déterminer si l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un tel créancier privé (arrêts précités Commission/EDF, point 86, et Frucona Košice/Commission, point 73).
48 L’examen par la Commission de la question de savoir si des mesures déterminées peuvent être qualifiées d’aide d’État, en raison du fait que les autorités publiques n’auraient pas agi de la même manière qu’un créancier privé, requiert de procéder à une appréciation économique complexe (arrêts précités Espagne/Lenzing, point 59, et Frucona Košice/Commission, point 74).
49 À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cadre du contrôle que les juridictions de l’Union européenne exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission dans le domaine des aides d’État, il n’appartient pas au juge de l’Union de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (arrêts précités Commission/Scott, points 64 et 66 ainsi que jurisprudence citée, et Frucona Košice/Commission, point 75).
50 Toutefois, le juge de l’Union doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêts précités Commission/Scott, point 65, et Frucona Košice/Commission, point 76).
51 Il ressort notamment des points 86 à 97 de la décision litigieuse que la Commission a fondé son constat selon lequel les autorités polonaises ne se sont pas comportées comme un créancier privé sur le fait qu’elles n’ont pas procédé, dès la fin de l’année 2004, à l’exécution forcée de leurs créances et, en particulier, qu’elles n’ont pas opté, à cette date, pour la mise en faillite de TB. En effet, selon la Commission, eu égard aux garanties dont disposaient lesdites autorités, d’une part, ce procédé collectif de recouvrement des créances aurait été efficace et, d’autre part, un ajournement du remboursement des dettes en cause ne laissait pas espérer un remboursement d’un montant supérieur.
52 Devant le Tribunal, le gouvernement polonais et BA ont fait valoir que, en tenant compte des coûts et de la durée d’une procédure de mise en faillite ainsi que du fait que les sûretés n’étaient pas toutes de premier rang et que la procédure de mise en faillite éteint les procédures d’exécution en cours, un créancier privé n’aurait pas opté, à la fin de l’année 2004, pour une mise en faillite de TB, mais aurait poursuivi le recouvrement individuel des sommes qui lui étaient dues.
53 Il résulte de ce qui précède que, eu égard aux arguments avancés par le gouvernement polonais et BA en première instance, le Tribunal devait notamment contrôler si les éléments sur lesquels la Commission a fondé l’appréciation résumée au point 51 du présent arrêt constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération et s’ils sont de nature à étayer les conclusions que la Commission en a tirées.
54 À cet égard, doit être considérée comme étant pertinente toute information susceptible d’influencer de manière non négligeable le processus décisionnel d’un créancier privé normalement prudent et diligent, se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle du créancier public et cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur aux prises avec des difficultés de paiement (arrêt Frucona Košice/Commission, précité, point 78).
55 En l’occurrence, ainsi qu’il a été relevé aux points 51 et 52 du présent arrêt, il ressort de la décision litigieuse et du dossier que, aux fins d’obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues, un créancier privé normalement prudent et diligent se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle des autorités polonaises devait choisir, notamment, entre un recouvrement individuel de ses créances et la mise en faillite de TB.
56 Il s’ensuit que, en vue d’identifier l’alternative la plus avantageuse, un tel créancier devait évaluer les avantages et les désavantages de chacune desdites procédures.
57 Partant, eu égard aux éléments constitutifs du critère du créancier privé, la Commission ne pouvait valablement parvenir au constat de la supériorité du procédé de mise en faillite par rapport à celui de recouvrement individuel des créances qu’en comparant, en fonction des intérêts d’un créancier privé, les avantages et les désavantages des deux procédures, ainsi que l’a relevé à bon droit le Tribunal.
58 À cet égard, tout d’abord, le Tribunal a relevé, aux points 92 à 96 de l’arrêt attaqué, qu’il ressort des points 88 et suivants de la décision litigieuse que la Commission n’a pas procédé à l’analyse des désavantages de la procédure de faillite, notamment les coûts et la durée d’une telle procédure.
59 La procédure de faillite suspendant la récupération des sommes dues et pouvant ainsi affecter, en cas de durée longue, notamment, la valeur d’une créance, force est de constater que la durée de cette procédure est un élément susceptible d’influencer, de manière non négligeable, la décision d’un créancier privé normalement prudent et diligent se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle des autorités polonaises de recourir à ladite procédure (voir, en ce sens, arrêt Frucona Košice/Commission, précité, point 81). Il en est de même s’agissant des coûts d’une telle procédure.
60 Ensuite, le Tribunal a constaté que la Commission n’était en mesure de produire aucun élément de preuve de nature à conforter l’appréciation qu’elle avait portée dans la décision litigieuse, selon laquelle seule la procédure de faillite permettait un recouvrement efficace des créances en cause.
61 Dans la mesure où la Commission fait valoir que, à la fin de l’année 2004, il était inévitable que TB fasse faillite au cours de l’année suivante et que, dès lors, c’est à tort que le Tribunal a jugé qu’elle était tenue de recueillir davantage d’informations afin d’effectuer une évaluation comparative entre la procédure de mise en faillite et le recouvrement individuel des créances, il doit être relevé que les éléments ayant conduit la Commission à considérer que la mesure étatique en cause devait être regardée comme une aide d’État ne font pas apparaître qu’il aurait été impossible ou moins avantageux pour les autorités polonaises de procéder, préalablement à ladite mise en faillite de TB, au recouvrement individuel à tout le moins d’une partie de leurs créances. De surcroît, il apparaît que TB n’a été déclarée être en faillite que le 16 août 2006.
62 Enfin, il a été relevé, dans le cadre de l’examen de la seconde branche du premier moyen, que le Tribunal a, à bon droit, fait supporter à la Commission la charge de la preuve de ce que les conditions du critère du créancier privé étaient réunies en l’espèce.
63 Il s’ensuit que le constat auquel est parvenu le Tribunal, au point 96 de l’arrêt attaqué, n’est pas entaché des erreurs de droit que lui reproche la Commission.
64 Par conséquent, la première branche du premier moyen doit être écartée et, partant, il y a lieu de rejeter celui-ci dans son intégralité.
65 S’agissant du second moyen, il suffit de relever qu’il est dirigé contre des motifs surabondants de l’arrêt attaqué. Or, des griefs dirigés contre des motifs surabondants d’un arrêt du Tribunal doivent être rejetés d’emblée, puisque ceux-ci ne sauraient entraîner son annulation (voir en ce sens, notamment, arrêts du 28 octobre 2004, van den Berg/Conseil et Commission, C‑164/01 P, Rec. p. I‑10225, point 60, et du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 148, ainsi que ordonnance du 3 octobre 2012, Cooperativa Vitivinícola Arousana/OHMI, C‑649/11 P, point 55).
66 Dans ces conditions, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner le bien-fondé du second moyen invoqué par la Commission au soutien de son pourvoi, celui-ci doit être rejeté.
Sur les dépens
67 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
68 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. BA ayant conclu à la condamnation de la Commission et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
69 Conformément à l’article 140, paragraphe 1, dudit règlement, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu dudit article 184, paragraphe 1, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Partant, la République de Pologne supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) La Commission européenne est condamnée aux dépens.
3) La République de Pologne supporte ses propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure: le polonais.