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Document 52017AE2888

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures» [COM(2017) 275 final — 2017/0114 (COD)] et la «Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, en ce qui concerne certaines dispositions concernant la taxation des véhicules» [COM(2017) 276 final — 2017/0115 (CNS)]

JO C 81 du 2.3.2018, p. 188–194 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

2.3.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 81/188


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures»

[COM(2017) 275 final — 2017/0114 (COD)]

et la «Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, en ce qui concerne certaines dispositions concernant la taxation des véhicules»

[COM(2017) 276 final — 2017/0115 (CNS)]

(2018/C 081/26)

Rapporteur:

M. Alberto MAZZOLA

Consultation

Conseil européen, 12 juin 2017 et 23 juin 2017

Parlement européen, 15 juin 2017

Base juridique

Articles 91 et 113 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

 

 

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

2 octobre 2017

Adoption en session plénière

18 octobre 2017

Session plénière no

529

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

121/2/6

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE estime que la mise en œuvre, dans l’Union européenne, d’un système de tarification routière équitable, transparent, non discriminatoire et non bureaucratique, proportionné à l’usage de la route et aux coûts externes générés par les camions, les autobus et les voitures, sans fragmentation des systèmes de tarification et conforme au principe de «l’utilisateur-payeur» et du «pollueur-payeur», aurait un effet positif dans la lutte contre la détérioration des infrastructures routières, la congestion du trafic et la pollution. Dans les conditions énumérées ci-après, ce système pourrait être progressivement appliqué aux véhicules utilitaires lourds et légers sur l’ensemble du réseau transeuropéen de transport, en commençant par le réseau prioritaire.

1.2.

Le CESE souligne l’importance d’actualiser le cadre juridique commun pour garantir un champ d’application uniforme pour tous les usagers de la route, en particulier en ce qui concerne le système de taxation au niveau de l’Union européenne pour l’utilisation des infrastructures routières d’importance européenne sur le réseau transeuropéen de transport en se basant sur la distance parcourue, telles que les routes du réseau transeuropéen de transport (RTE-T), les autoroutes et les routes nationales sur lesquelles circule un trafic international important.

1.3.

Le secteur des transports joue un rôle essentiel pour assurer la mobilité et le développement socio-économique de l’Union européenne. Le CESE estime que, pour répondre aux défis de la croissance et de la durabilité, il est indispensable d’optimiser le réseau d’infrastructures de transport. Les investissements dans les infrastructures ont une importance vitale pour la croissance et l’emploi, car une hausse d’un pour cent des dépenses en infrastructures augmente d’environ 0,4 % le niveau de la production la même année et de 1,5 % quatre ans après celle-ci (1).

1.4.

Le CESE constate avec inquiétude que, «alors que les besoins en infrastructures de transport sont estimés à environ 130 milliards d’EUR par an à l’échelon européen, les niveaux moyens d’investissement au sein de l’Union européenne sont largement inférieurs à 100 milliards d’EUR depuis le début de la crise» (2). Dans l’Union européenne, on enregistre une diminution des dépenses consacrées à l’entretien des infrastructures routières, malgré le nouveau cadre de l’Union européenne pour le développement du réseau transeuropéen de transport lancé fin 2013 (3) et les actions soutenues par les Fonds structurels de l’Union européenne (4). On imagine mal que le cadre financier pluriannuel 2021-2027 prévoie l’accroissement nécessaire des ressources.

1.5.

Le CESE estime qu’il est essentiel que les recettes provenant de l’utilisation des infrastructures routières soient affectées aux fins suivantes: les recettes issues de l’usage des infrastructures devraient couvrir les coûts de construction, de développement, d’exploitation et d’entretien des infrastructures routières, tandis que celles afférentes aux coûts externes devraient être affectées à des mesures d’atténuation des incidences négatives du transport routier et d’amélioration des performances grâce à des systèmes innovants de gestion du trafic, la conduite automatisée, l’électrification, en particulier les points de recharge rapide, et à d’autres systèmes d’approvisionnement en énergie.

1.6.

Selon le CESE, les recettes supplémentaires ainsi obtenues, qui pourraient à terme s’élever à plus de 10 milliards d’euros par an (5), dans le cadre de l’option retenue par la Commission, à 20 milliards en cas d’application obligatoire à tous les véhicules utilitaires lourds, voire davantage encore si le système était étendu aux véhicules utilitaires légers, pourraient donner une impulsion significative à l’achèvement et au bon fonctionnement du réseau transeuropéen de transport, notamment de ses composantes technologiques. Toutefois, la contribution des pouvoirs publics au financement des infrastructures reste fondamentale et prédominante.

1.7.

Le CESE estime que la révision de la législation relative à l’eurovignette constitue une occasion à saisir pour mettre au point des normes communes et harmonisées, ainsi que pour contrôler et renforcer la bonne application de cette réglementation en créant un registre spécifique de l’Union européenne et en collectant des informations ponctuelles des États membres.

1.8.

Le CESE est d’avis qu’il est essentiel que le marché intérieur des transports soit exempt de pratiques discriminatoires et invite la Commission à prendre les mesures nécessaires pour assurer en temps utile le plein respect du cadre réglementaire de l’Union européenne. Il importe en particulier que les tarifs appliqués et les abattements pour usagers fréquents et/ou nationaux ne constituent pas des éléments discriminatoires à l’égard des utilisateurs occasionnels et/ou non nationaux.

1.9.

Par ailleurs, le CESE est extrêmement préoccupé par les effets du changement climatique et les niveaux de protection et de sauvegarde de l’environnement ainsi que par toutes les problématiques liées à la santé et au bien-être social, en rapport avec l’utilisation rationnelle des transports. Comme il l’a déjà souligné, «en ce qui concerne les transports, l’objectif d’une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau d’émissions de 1990 reste très ambitieux et nécessite de gros efforts» (6).

1.10.

Le CESE rappelle qu’il convient d’appliquer les principes de l’utilisateur-payeur et du pollueur-payeur avec flexibilité, en particulier dans le cas des régions périphériques et des zones reculées rurales, montagneuses et insulaires, afin d’éviter des effets inversement proportionnels aux coûts et afin de préserver leur utilité comme moyen d’infléchir les choix concernant l’organisation des opérations de transport, tout en supprimant toute concurrence déloyale entre les divers modes de transport (TEN/582 «Les effets des conclusions de la COP 21 en matière de politique européenne des transports»).

1.11.

Le CESE estime en outre qu’il est essentiel de passer en revue les effets de la directive deux ans après son entrée en vigueur, notamment en ce qui concerne les retombées sous l’angle des avantages résultant des nouveaux investissements, ainsi que des coûts pour le fret, afin d’éviter la détérioration de la compétitivité des industries européennes à l’échelle mondiale.

1.12.

Le CESE estime qu’une attention particulière doit être apportée à l’acceptation des mesures par les usagers, consommateurs et citoyens en général sous l’angle de la transparence et de la clarté du nouveau cadre fiscal; il doit dès lors veiller, y compris au moyen de panneaux autoroutiers multilingues, à ce que l’usager ait une perception positive, immédiate et claire de la finalité des montants perçus, du caractère équitable de leur répartition et de leur affectation, ainsi que de l’absence de charges excessives et de double imposition, notamment en recourant à deux indicateurs synthétiques de la qualité des routes, du niveau de congestion et des réductions d’émissions par kilomètre d’infrastructure.

1.13.

Selon le CESE, l’affectation des recettes découlant de la mise en œuvre de la nouvelle législation à des investissements dans le secteur des transports réalisés selon la ventilation indiquée ci-dessus, serait en mesure de créer des emplois supplémentaires pour plus d’un demi-million de personnes.

1.14.

Le CESE estime que la Commission devrait suivre et améliorer les instruments permettant une application correcte et uniforme de la nouvelle législation, notamment au moyen d’une vérification périodique, sur des bases scientifiques, des valeurs liées aux coûts externes et de la correspondance effective entre les dispositions tarifaires adoptées et les émissions réelles des véhicules, qui actuellement ne sont pas favorables aux véhicules plus performants. La Commission devrait également établir un rapport annuel détaillé sur les progrès enregistrés dans l’application de la directive modifiée et l’adresser au Parlement européen, au Conseil, au CdR et au CESE.

2.   Introduction

2.1.

Les transports sont un pilier essentiel de l’Espace européen unique et permettent l’exercice concret de la liberté de circulation des travailleurs, des biens et des services sur tout le territoire de l’Union: l’efficacité et la qualité des réseaux de transport ont une incidence directe sur le développement durable, la qualité de vie et du travail, ainsi que la compétitivité de l’Europe.

2.2.

L’économie du transport routier dans l’Union européenne assure 5 millions d’emplois directs et contribue pour près de 2 % au PIB de l’Union européenne, avec 344 000 entreprises de transport de voyageurs par route et plus de 560 000 entreprises de transport routier de marchandises (7). Elle apporte ainsi une contribution importante à la croissance et à l’emploi dans l’Union européenne. Elle nécessite donc des politiques proactives.

2.3.

Les transports sont la cause principale de la pollution de l’air, à l’heure actuelle et représente un quart des émissions de gaz à effet de serre. Les transports sont la cause principale de la pollution atmosphérique et représentent aujourd’hui un quart des émissions de gaz à effet de serre en Europe; environ un quart des émissions dues au transport routier est imputable aux camions, autocars et autobus, une proportion qui devrait augmenter de quelque 10 % entre 2010 et 2030 (scénario de référence 2016 de l’Union européenne relatif aux tendances à l’horizon 2050 en matière d’énergie, de transports et d’émissions de gaz à effet de serre). Dans un premier temps, la Commission européenne a concentré ses efforts sur deux propositions: l’une concernant la certification en matière d’émissions de dioxyde de carbone et de consommation de carburant et l’autre concernant la surveillance et la déclaration de ces données certifiées.

2.4.

La stratégie adoptée, sur laquelle le Comité a eu l’occasion de se prononcer (8), a défini une feuille de route pour une mobilité à faible intensité de carbone qui donnera une impulsion à cette transition, notamment à la lumière des objectifs fixés dans l’accord de Paris sur le changement climatique.

2.5.

La stratégie poursuit trois objectifs: développer un système de transport plus efficace, promouvoir des énergies de substitution à faible teneur en carbone dans le secteur des transports, et favoriser les véhicules à émissions faibles ou nulles.

2.6.

Le champ d’application concerne principalement le transport routier, qui est responsable de plus de 70 % des émissions de gaz à effet de serre provenant des transports et d’une grande partie de la pollution atmosphérique, même si les autres secteurs des transports sont également tenus d’apporter leur contribution.

2.7.

Pour parvenir à des transports plus efficaces sous l’angle des coûts énergétiques et des émissions, il est important de donner les bons signaux de prix et de tenir compte des externalités. À cette fin, la Commission européenne a l’intention de parvenir à la mise en place de systèmes de péage routier fondés sur la distance en kilomètres effectivement parcourus, afin de mieux respecter les principes du «pollueur-payeur» et de l’«utilisateur-payeur».

2.8.

Une application plus large des principes de l’«utilisateur-payeur» et du «pollueur-payeur» permet de s’attaquer à quatre problèmes, dont la solution est à chercher dans une «tarification routière équitable et efficiente»:

le transport routier représente 17 % des émissions de CO2 produites dans l’Union et l’utilisation de véhicules à émissions faibles ou nulles ne suffira pas pour atteindre les objectifs climatiques et énergétiques à l’horizon 2030,

la qualité des routes de l’Union européenne est en voie de dégradation en raison d’une baisse des investissements dans les infrastructures et du report des entretiens périodiques au mépris de l’incidence économique à long terme,

un certain nombre d’États membres ont introduit des systèmes provisoires de tarification routière (vignettes), qui discriminent les opérateurs étrangers occasionnels,

la pollution de l’air et la congestion engendrées par les véhicules routiers représentent des coûts élevés pour la société.

2.9.

Les analyses d’impact économique révèlent des écarts importants entre les hausses des coûts pour les usagers des transports et pour les autorités et les organismes responsables, équilibrées par des recettes plus importantes et une réduction des coûts liés à la congestion du trafic et à d’autres externalités, tout en mettant en lumière les effets potentiellement négatifs sur la distribution et l’incidence des coûts plus élevés sur les PME (9).

2.10.

Les technologies numériques sont de nature à accroître la sécurité, l’efficacité et le caractère inclusif des transports en permettant une mobilité continue de porte à porte, une logistique intégrée et des services à valeur ajoutée grâce au déploiement des systèmes intelligents dans tous les modes de transports, considérés comme une partie intégrante du développement du réseau transeuropéen de transport multimodal.

2.11.

Les actions développées au niveau européen en matière de transports à faibles émissions ont immanquablement un fort impact sur les territoires régionaux traversés par des infrastructures de transport, avec des conséquences directes sur la planification énergétique, territoriale, environnementale et des transports, ainsi que des effets importants sur l’économie et l’emploi.

2.12.

En ce qui concerne l’acceptation de ces mesures par les usagers, les consommateurs et les citoyens en général, il convient de produire des efforts plus importants sur le plan de la transparence et de la clarté pour créer un marché des véhicules faiblement ou non polluants. Il y a lieu également de s’efforcer d’améliorer l’information des consommateurs grâce à l’étiquetage des voitures et d’apporter un soutien en la matière par l’intermédiaire des règles régissant les marchés publics. Parallèlement, il convient d’agir en faveur de la transparence du nouveau cadre de taxation, en veillant à une perception positive, immédiate et claire, de la part de l’utilisateur, de la finalité des montants perçus, du caractère équitable de leur répartition, ainsi que de l’absence de charges excessives et de double imposition.

3.   Synthèse des propositions de la Commission européenne

3.1.

Dans les propositions de la Commission, la tarification concerne les infrastructures routières. Elle est proportionnelle à la distance parcourue à l’exclusion du régime de tarification au forfait, tel que prévu actuellement dans certains pays de l’Union européenne. Elle s’applique à tous les types de véhicules, non seulement aux poids lourds mais également aux autocars, autobus, camionnettes et voitures particulières. Par conséquent, elle concerne aussi bien le transport de marchandises que celui des passagers. Elle préfigure une modulation de la fiscalité en fonction du «potentiel de pollution» et de l’usure des infrastructures. Les modifications réglementaires concernent notamment:

les dispositions en matière de péages et droits d’usage, relatives à l’ensemble des véhicules et non plus uniquement à ceux d’un poids supérieur à 3,5 tonnes: la mise à jour des règles prévues par la directive et l’extension de son champ d’application afin de couvrir tous les véhicules utilitaires lourds à partir du 1er janvier 2020 et les véhicules légers, la suppression des exonérations, les valeurs maximales pour les redevances pour coûts externes et la simplification des exigences applicables à leur tarification,

la suppression progressive de la possibilité d’appliquer des droits d’usage fondés sur la durée pour les poids lourds d’ici le 31 décembre 2023, et pour les véhicules légers à l’échéance du 31 décembre 2027, et la mise en place d’un nouveau système de tarification fondé sur la distance, assorti d’une méthodologie de calcul et d’estimation des coûts intervenant dans la fixation des tarifs,

la modulation des redevances liées aux infrastructures en fonction des émissions de CO2 pour les véhicules utilitaires lourds, et la suppression progressive des variations actuelles de taxation basées sur les classes d’émission Euro à compter du 1er janvier 2022,

les mesures complémentaires pour les véhicules légers en ce qui concerne la congestion interurbaine ainsi que pour les émissions de polluants et de CO2 produites par tous les types de véhicules,

l’exigence d’un prélèvement obligatoire de redevances pour coûts externes au moins sur une partie du réseau pour les poids lourds à partir du 1er janvier 2021.

3.2.

Conformément au principe du «pollueur-payeur» et de l’«utilisateur-payeur», l’extension du champ d’application de la directive 1999/62/CE devrait contribuer à réduire les distorsions de concurrence induites par le fait qu’actuellement, les autobus et autocars sont exemptés de paiement pour l’utilisation des infrastructures.

3.3.

Une proposition complémentaire prévoit des modifications visant une réduction progressive des taux minimaux des taxes sur les véhicules pour les poids lourds jusqu’à zéro, en cinq étapes étalées sur cinq années consécutives et représentant chacune une réduction de 20 % des taux minimaux courants.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE estime que la mise en œuvre dans l’Union européenne d’un système de tarification routière équitable, transparent, non discriminatoire et non bureaucratique, proportionné à l’usage de la route et aux coûts externes, mesurables scientifiquement, induits par les camions, les autobus et les voitures, sans fragmentation des systèmes de tarification, mais avec un plafond d’imputation de coûts externes et en conformité avec le principe de l’«utilisateur-payeur» et du «pollueur-payeur», aurait un effet positif sur la lutte contre la détérioration des infrastructures routières, la congestion du trafic et la pollution.

4.2.

Le CESE souligne l’importance de réévaluer, modifier et renforcer l’application uniforme des règles de l’Union européenne, et de créer ainsi un cadre juridique commun de nature à assurer des conditions identiques pour tous les usagers des transports routiers: l’instrument de la directive laisse une grande marge de manœuvre pour des modalités d’application divergentes. Le CESE juge nécessaire d’étudier l’éventualité qu’après une vérification triennale du respect des règles, il soit nécessaire de recourir à des instruments législatifs plus contraignants garantissant une application uniforme.

4.3.

Le Comité recommande vivement que le cadre commun de tarification soit clair, transparent, simple, contrôlable et présenté dans des termes aisément compréhensibles, qui précisent la destination des recettes, tant sur les reçus électroniques ou sur papier que sur les panneaux autoroutiers, de manière à accroître l’acceptabilité sociale de la contribution apportée par chacun des utilisateurs au bien commun.

4.4.

Pour créer un véritable marché unique du transport routier sans discriminations et sans distorsions de concurrence, il est essentiel de veiller à une plus grande harmonisation des normes et à la mise en place d’un cadre juridique commun au niveau de l’Union européenne pour le système de tarification routière liée à l’utilisation des infrastructures routières d’importance européenne, telles que les routes du réseau transeuropéen de transport, les autoroutes et les routes nationales sur lesquelles circule un trafic international important.

4.5.

Les systèmes de tarification ont une incidence différente sur les régions centrales et périphériques: les régions centrales qui connaissent un trafic de transit intense subissent des effets négatifs plus prégnants que les régions périphériques, tandis que ces dernières reçoivent des compensations fiscales liées à l’incidence environnementale et au financement des infrastructures nettement inférieures à celles accordées aux régions centrales. Le CESE estime que les Fonds structurels et environnementaux et la BEI devraient intervenir pour garantir un développement équilibré.

4.6.

Le manque d’harmonisation des systèmes de prélèvement, qu’il s’agisse de vignettes ou de péages, est notamment lié à une multiplicité de technologies de collecte et à différents modèles de systèmes de tarification routière qui, souvent, ne sont pas interopérables et induisent des charges administratives supplémentaires et des surcoûts pour les entreprises de transport et de logistique. Cette situation s’inscrit également dans le contexte d’une demande croissante de transports routiers innovants fondés sur le développement d’infrastructures nouvelles et intelligentes, notamment la conduite automatisée et la diffusion de nouveaux carburants, ainsi que le bon entretien des réseaux existants pour qu’ils soient en mesure de supporter les flux.

4.7.

Il est nécessaire, selon le Comité, de procéder à des investissements appropriés dans les infrastructures existantes et à venir de manière à parvenir à une meilleure interopérabilité fonctionnelle des réseaux de transport nationaux, notamment au moyen de technologies satellitaires. Il y a lieu également d’en faciliter l’accès, dans l’ensemble du marché unique, en promouvant une meilleure application de la logistique intelligente (10) et de solutions TIC. L’objectif est d’améliorer la sécurité routière et d’accroître l’efficacité générale du système par un recours accru aux systèmes de transport intelligents, ainsi que de mettre en place des réseaux de transport par route plus efficaces et mieux connectés, modernes et durables dans toute l’Europe. Il conviendrait de se fixer pour objectif que seuls des dispositifs embarqués interopérables au niveau de l’Union européenne soient installés dans les véhicules à partir de 2019 (voir la stratégie pour la numérisation des transports).

4.8.

Le CESE estime qu’eu égard au manque d’investissements dans les infrastructures de transport et aux niveaux insuffisants d’entretien de celles-ci, il est indispensable d’appliquer le principe de l’«utilisateur-payeur» et du «pollueur-payeur» pour financer les infrastructures routières, à condition que:

les compensations provenant de la fiscalité appliquée à l’utilisation de l’infrastructure soient affectées aux infrastructures routières elles-mêmes,

celles qui proviennent des montants prélevés au titre des coûts externes soient affectées à l’atténuation des effets négatifs du transport routier, notamment à la construction d’infrastructures de substitution, à la diffusion de carburants alternatifs, aux systèmes de guidage de substitution, à d’autres modes de transport et d’alimentation énergétique, ainsi qu’au soutien au réseau transeuropéen de transport,

l’article 9 de la directive soit modifié en conséquence.

4.9.

Le CESE juge tout aussi important de procéder à des investissements en vue de réduire le niveau des émissions de CO2 provenant du transport routier (voir paragraphe 2.12), qui ont une incidence très importante sur la qualité de l’environnement ainsi que sous l’angle des coûts externes, à concurrence de 1,8 à 2,4 % du PIB. Il appelle à l’adoption d’une approche intégrée de la réduction des émissions de CO2. La fixation de limites pour les émissions des nouveaux véhicules utilitaires lourds mis sur le marché de l’Union européenne est un instrument plus efficace pour la réduction des émissions que la tarification. Toutefois, elle n’est pas suffisante pour atteindre les objectifs fixés.

4.10.

Compte tenu de la persistance du problème de la congestion du trafic, à l’intérieur et à l’extérieur des zones urbaines, il conviendrait de recourir à des aides financières de l’Union européenne aux systèmes avancés de gestion du trafic et à des procédés efficaces de logistique par satellite afin d’éliminer les frais supplémentaires qui sont déjà à la charge des usagers. Les recettes provenant de l’adoption volontaire de ces mesures doivent en tout état de cause aller directement au financement de solutions de substitution dont l’incidence est neutre.

4.11.

Il importe de promouvoir les transports publics et de définir la tarification routière de manière à respecter et à atteindre cet objectif, en ce qui concerne aussi bien le principe de l’utilisateur-payeur que celui du pollueur-payeur.

5.   Observations particulières

5.1.

Le CESE soutient l’objectif du service européen de télépéage (SET), qui prévoit «un dispositif embarqué interopérable associé à un contrat et à une facturation» dans l’ensemble de l’Union européenne, ce qui créerait un marché unique et offrirait aux opérateurs de transport routier commercial la garantie d’avoir un seul fournisseur, un marché unique et une seule facture.

5.2.

L’expérience du Brenner en matière d’application d’une majoration du prix du péage conformément aux principes et aux limites définis par la directive, aux fins de la réalisation d’infrastructures de substitution, est en train de démontrer son utilité et son acceptation par la population locale. Par conséquent, le CESE envisage positivement la possibilité de l’étendre à d’autres zones sensibles.

5.3.

De l’avis du CESE, le système d’abattements prévu à l’article 7, défini après de longues discussions et analyses pour les véhicules utilitaires lourds, apparaît équitable et non discriminatoire, et pourrait s’appliquer de la même manière aux véhicules utilitaires légers en réduisant les disparités actuelles entre les usagers occasionnels ou étrangers et les usagers réguliers/nationaux constatées dans certains pays. L’article 7 bis devrait donc être modifié comme indiqué.

5.4.

La comparaison des redevances pour coûts externes pour certaines catégories de véhicules, par exemple entre camions Euro V et Euro VI, met en évidence une pénalisation substantielle des véhicules moins polluants, que le CESE considère injustifiée. Le CESE invite à réviser les redevances pour coûts externes définies dans les annexes de la directive en favorisant les véhicules à plus faible intensité d’émissions. Dans le cas des véhicules à émissions nulles, il souscrit à la possibilité de réduire temporairement les redevances d’utilisation de l’infrastructure.

5.5.

Le CESE demande à la Commission de mettre à jour régulièrement l’évaluation scientifique des péages, y compris celles des conditions locales, en tenant compte des spécificités du territoire, mais en évitant des discriminations non justifiées par des bases scientifiques solides.

Bruxelles, le 18 octobre 2017.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  FMI, Perspectives de l’économie mondiale, octobre 2014.

(2)  Forum international des transports (2015), Perspectives des transports FIT 2015, Éditions OCDE, Paris.

(3)  Règlement (UE) no 1315/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 sur les orientations de l’Union pour le développement du réseau transeuropéen de transport et abrogeant la décision no 661/2010/UE (JO L 348 du 20.12.2013, p. 1).

(4)  En 2014 et 2015, le total des investissements réalisés, grâce aux ressources financières des institutions de l’Union européenne (c’est-à-dire RTE-T/MIE, FEDER/FC et prêts de la BEI), dans les infrastructures du réseau central et du réseau global du RTE-T a représenté 30,67 milliards d’EUR dans l’UE28.

(5)  Impact assessment for the Eurovignette Directive (Évaluation de l’impact de la directive Eurovignette).

(6)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 10.

(7)  Les transports dans l’UE en chiffres, Commission européenne, 2016, sur la base de données fournies par Eurostat.

(8)  JO C 383 du 17.11.2015, p. 84.

(9)  «Support Study for the Impact Assessment Accompanying the Revision of Directive 1999/62/EC» (étude d’appui à l’analyse d’impact accompagnant la révision de la directive 1999/62/CE), contrat d’étude no MOVE/A3/119-2013 — mai 2017.

(10)  COM(2016) 766 final.


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