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Avis du Comité économique et social sur la "Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions — Renforcer la dimension locale de la stratégie européenne pour l'emploi" (COM(2001) 629 final)

Journal officiel n° C 149 du 21/06/2002 p. 0026 - 0029


Avis du Comité économique et social sur la "Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions - Renforcer la dimension locale de la stratégie européenne pour l'emploi"

(COM(2001) 629 final)

(2002/C 149/08)

Le 17 janvier 2002, le Comité économique et social a décidé, conformément à l'article 23, paragraphe 3, de son Règlement intérieur, d'élaborer un avis sur la communication susmentionnée.

La section "Emploi, affaires sociales, citoyenneté", chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 10 avril 2002 (rapporteur: M. Vinay).

Lors de sa 390e session plénière des 24 et 25 avril 2002 (séance du 24 avril), le Comité économique et social a adopté l'avis suivant par 97 voix pour, 0 voix contre et 2 abstentions.

1. Introduction et présentation de la proposition

1.1. La communication à l'examen s'inscrit dans l'approche de la Commission consistant à accorder une attention toujours plus marquée à la dimension locale dans le contexte de la stratégie européenne pour l'emploi (SEE). Elle fait également suite à une communication publiée par la Commission en avril 2000 et sur laquelle a été menée, au cours de la même année, une vaste consultation dont les conclusions, présentées lors de la Conférence de Strasbourg, alimentent et enrichissent cette nouvelle phase de propositions.

1.1.1. Dans son avis sur la précédente communication de la Commission(1), le Comité avait formulé une série d'observations sur les acteurs locaux, y compris les partenaires sociaux, sur leur rôle ainsi que sur l'importance de leur fournir des informations et de leur donner une formation complète et solide, sur la difficulté de trouver une définition commune de la notion d'économie sociale et sur la nécessité d'agir, au niveau local, en cohérence avec les quatre piliers de la stratégie pour l'emploi. Le Comité constate avec satisfaction que certaines de ses réflexions ont trouvé écho dans la communication à l'examen.

1.2. Après avoir retracé brièvement l'évolution de la question depuis le lancement du processus de Luxembourg, la communication souligne que les États membres ont été invités, dans les Lignes directrices pour les politiques de l'emploi en 2002, à encourager les autorités locales et régionales à définir des stratégies pour l'emploi. Elle constate par ailleurs que l'on note, dans quasiment tous les États de l'Union, une tendance à la décentralisation, au soutien de l'économie sociale et à la création de partenariats. Les plans d'action nationaux pour l'emploi (PAN) 2001 révèlent eux aussi la mise en place d'une coopération plus étroite entre les gouvernements nationaux et les autorités locales et régionales.

1.3. La Commission confirme qu'un élément crucial comme l'information reste nettement insuffisante et que la participation des autorités locales au processus des PAN et à la mise en oeuvre du FSE n'est pas systématique, et affirme que le développement d'une dimension locale dans la SEE pourrait apporter une contribution décisive aux objectifs communautaires en matière d'emploi ainsi qu'à la lutte contre la marginalisation sociale.

1.4. La Commission indique que, sans préjudice du principe de subsidiarité, le développement d'une dimension locale dans la SEE requiert une volonté politique cohérente aux niveaux communautaire, national, régional et local. Il est fondamental d'instaurer un échange constant des meilleures pratiques, de faire connaître, au niveau local, la SEE et les plans d'action nationaux afférents, les PAN pour l'insertion sociale ainsi que les programmes des Fonds structurels.

1.5. La Commission expose les critères dont doit s'inspirer l'élaboration de stratégies locales pour l'emploi et préconise en outre que l'on tire avantage de l'expérience et que l'on utilise davantage les instruments existants. À cet égard, outre les Fonds structurels, elle cite plus particulièrement le réseau EURES ainsi que les initiatives Urban et Equal. La Commission se réfère également aux actions innovatrices au titre de l'article 6 du FSE et à la ligne budgétaire mise à disposition pour 2000 et 2001 afin de soutenir des actions préparatoires en vue d'un engagement local pour l'emploi.

1.6. La communication indique que les initiatives et programmes actuels feront l'objet d'une série d'évaluations sous l'angle de la dimension locale, et précise que le développement local sera considéré comme un aspect prioritaire par la Commission lors de l'évaluation de la période de programmation.

2. Observations générales

2.1. Le Comité économique et social européen se félicite de la communication à l'examen, tout comme il s'était réjoui de la précédente, et approuve l'attention accrue portée par la Commission au développement d'une véritable stratégie locale pour l'emploi, en faveur de laquelle il plaide depuis très longtemps.

2.2. Le Comité apprécie plus particulièrement la manière dont a été mise à profit la phase de consultation de 2000. Si cette phase a mis en lumière de nombreux problèmes qui limitent le développement d'initiatives au niveau local, la Commission a toutefois recensé, dans le document à l'examen, des actions et des instruments qui permettront, dans la mesure du possible, de faire face à ces problèmes et de définir des marges de manoeuvre appropriées pour les acteurs locaux tout en sensibilisant davantage les États membres à la nécessité de créer un flux biunivoque dans l'élaboration des PAN.

2.3. Le choix consistant à évaluer l'ensemble de la programmation en cours principalement à la lumière de son impact sur le développement local revêt une signification qui, d'une part, transcende quasiment le thème à l'examen mais, d'autre part, renforce la nécessité de développer complètement la stratégie pour l'emploi définie par le Conseil de Lisbonne, en accordant une attention particulière aux plans locaux pour l'emploi, indispensables pour que cette stratégie soit pleinement opérationnelle.

2.4. La communication souligne que les lignes directrices pour les politiques de l'emploi en 2002 reconnaissent explicitement le rôle du niveau local dans la SEE et cite textuellement un extrait de la ligne 11. Or, celle-ci figure dans le chapitre consacré au deuxième pilier (Développer l'esprit d'entreprise et la création d'emplois). Dans son précédent avis, le Comité avait déjà exprimé la conviction selon laquelle la création de stratégies pour développer l'emploi au niveau local permettrait, précisément en raison du nombre d'acteurs concernés et de la diversité de leurs fonctions, d'atteindre les objectifs fixés dans le cadre des quatre piliers de la stratégie européenne. Le Comité confirme ce point de vue et espère que la Commission le reprendra à son compte, notamment parce que la communication contient de nombreuses références au quatrième pilier relatif à l'égalité des chances.

2.4.1. L'attention que le document accorde aux politiques en faveur de l'égalité des chances entre femmes et hommes est conforme à la conviction, entièrement partagée par le Comité, selon laquelle les conditions susceptibles de limiter ou d'encourager cette égalité sont déterminées précisément au niveau local, non seulement par des politiques actives spécifiques et des mesures de formation ciblées, mais également grâce à une prise de conscience sociale et culturelle accrue. À cet égard, l'invitation, faite aux autorités locales, à promouvoir l'emploi des femmes par des "mesures visant à concilier la vie professionnelle et familiale" est inappropriée, étant donné que la conciliation de ces deux aspects est autant de l'intérêt des femmes que de celui des hommes. La Commission en est d'ailleurs consciente dans les Lignes directrices pour les politiques de l'emploi en 2002, puisque le chapitre intitulé "Concilier travail et vie familiale" confirme que les politiques mises en oeuvre à cette fin "revêtent une importance particulière pour les femmes et les hommes"(2).

2.5. La communication à l'examen accorde une plus grande importance au rôle des partenaires sociaux que le document précédent, et met l'accent sur le fait qu'ils doivent être davantage impliqués dans la mise en oeuvre des stratégies locales.

2.5.1. Toutefois, comme le Comité l'a déjà indiqué dans son précédent avis, le rôle des partenaires sociaux est primordial non seulement en ce qui concerne la concertation sociale - sur le développement de laquelle une décision importante a été prise lors du récent Conseil de Laeken - mais également parce que les partenaires sociaux sont une composante dynamique des partenariats. Ce rôle s'est notamment révélé positif et source de propositions dans le contexte des pactes territoriaux et des partenariats transfrontaliers opérant sur la base du réseau EURES. En outre, si les partenaires sociaux doivent jouer un rôle fondamental dans la "définition, la mise en oeuvre et l'évaluation des orientations pour l'emploi", ainsi que l'a précisé le Conseil de Feira, ce rôle est encore plus évident au niveau local.

2.6. Si la Commission reconnaît les difficultés, déjà largement mises en évidence par le Comité, que posent les divergences d'interprétation de la définition d'économie sociale dans les États membres, elle souligne toutefois que ce secteur, bien qu'il soit classifié, présente un fort potentiel en matière d'initiatives de développement local, et souligne que la notion de partenariats au niveau local mûrit sous l'impulsion des priorités politiques de la stratégie européenne pour l'emploi. Il serait toutefois utile que la Commission élabore, dans la mesure du possible et dans le respect du principe de subsidiarité, une définition commune de cette notion, notamment dans la perspective du forum sur le développement local qui doit avoir lieu début 2003.

2.7. Bien que le principe de subsidiarité doive bien évidemment être respecté, le Comité apprécie que la Commission se réfère au Livre blanc sur la gouvernance européenne qui plaide, d'une manière générale et plus particulièrement en ce qui concerne le chômage et la cohésion, en faveur d'une forte interaction entre les différents niveaux de gouvernement de l'Union et des différents pays et les niveaux régional et local. Cette interaction s'impose non seulement pour conférer le maximum d'efficacité aux politiques communautaires, mais également pour retisser les liens entre les institutions européennes et les citoyens et pour permettre à ceux-ci de contribuer à la formulation et à la qualité des choix politiques et économiques.

3. Observations spécifiques

3.1. Parmi les différentes initiatives européennes efficaces pour développer l'emploi au niveau local, la Commission cite le réseau EURES. Cet instrument, créé en 1993, a été renouvelé régulièrement en raison de son importance reconnue, et la possibilité de revoir sa base juridique est actuellement à l'examen. Il est toutefois curieux que, compte tenu du potentiel de cet instrument, la Commission n'en propose pas une réforme complète, ne suggère pas de l'intégrer à plein titre dans la SEE et, enfin, propose une série de critères et de sources de financement articulées de manière différente au lieu d'inscrire EURES au budget des Fonds structurels. Il est notoire que le réseau EURES regroupe les services publics chargés de l'emploi et les partenaires sociaux, deux groupes qui figurent, dans la communication à l'examen, parmi les acteurs locaux d'une stratégie pour l'emploi. Il s'agit d'une raison logique et cohérente supplémentaire qui devrait inciter la Commission à procéder à la réforme mentionnée ci-dessus.

3.2. La Commission souligne l'impact positif sur l'emploi d'Urban, une initiative communautaire consacrée à des interventions socio-environnementales dans des zones extrêmement critiques des centres urbains. Dans son avis sur le renouvellement de cette initiative(3), le Comité avait souligné qu'Urban était susceptible d'avoir des retombées positives sur l'emploi, bien que ce ne fût pas son objectif premier. Cette initiative présente en outre l'avantage de susciter une forte implication de l'ensemble de la société civile dans la programmation des activités financées. Le Comité souhaiterait que l'analyse, prévue par la Commission, des résultats d'Urban ainsi que de tout autre initiative mette également en évidence les retombées de la diffusion des meilleures pratiques qui y est toujours prévue.

3.2.1. Lorsqu'elle se réfère au potentiel des programmes et initiatives mis en oeuvre en faveur du développement de l'emploi au niveau local, la Commission devrait également citer le programme Interreg III, qui inclut ce thème spécifique dans ses critères de programmation.

3.3. Dans sa présentation des critères de mise en oeuvre d'actions innovatrices financées au titre de l'article 6 du règlement du FSE(4), la Commission avait déjà explicitement mis l'accent sur les liens, du reste naturels compte tenu notamment de l'expérience passée, existant avec le développement de l'emploi au niveau local. Elle signalait en outre que la priorité serait donnée aux propositions fondées sur le principe du partenariat entre divers acteurs, et citait à cet égard les autorités publiques, le secteur privé, les partenaires sociaux, le troisième système, etc. La communication à l'examen rappelle ce contexte et souligne que l'un des domaines prioritaires est intitulé "Stratégies de l'emploi local et innovation". Si le Comité approuve toutes les mesures susmentionnées, il note cependant que l'invitation à présenter des propositions est, pour le moment, limitée aux "autorités publiques compétentes ou aux administrations territoriales".

3.3.1. Cette situation crée une sorte de hiérarchie implicite entre les acteurs locaux, qui pourrait également être reprise dans la communication à l'examen. En effet, tant cette communication que le premier document de la Commission regroupent, sous le vocable "acteurs locaux", toute une gamme d'intervenants. Il ne ressort pas clairement de la communication si une initiative relative à une stratégie locale pour l'emploi peut être élaborée, proposée et présentée par n'importe lequel de ces acteurs qui met en place un partenariat ciblé ou si, au contraire, toute initiative doit toujours être lancée par une autorité publique ou administrative du niveau local.

3.4. La communication souligne qu'il est impératif de bien informer les acteurs locaux sur les politiques communautaires et nationales, ce qui est évidemment indispensable pour encourager des initiatives et des stratégies pouvant être mises en pratique non seulement par le biais d'instruments et de ressources activés au niveau communautaires, mais également en cohérence avec les politiques définies aux niveaux européen et national. La définition des éléments d'une stratégie locale pour l'emploi néglige toutefois la formation, un aspect jugé essentiel par le Comité et sur lequel il avait déjà mis l'accent dans son précédent avis.

3.4.1. La stratégie proposée par la Commission comprend les étapes suivantes: cibler un territoire, établir un diagnostic des points forts et des points faibles, identifier les acteurs potentiels, analyser les possibilités et les menaces concernant l'emploi sur le territoire-cible et impliquer les autorités régionales et nationales. Il est important de souligner que les points forts et les points faibles ainsi que les possibilités et les menaces pour l'emploi peuvent résider dans les conditions socio-économiques, d'infrastructure, productives et organisationnelles d'un territoire, mais également, et dans une large mesure, dans les besoins en formation pour faciliter l'employabilité, développer l'esprit d'entreprise, favoriser la capacité d'adaptation des travailleurs et des entreprises et promouvoir l'égalité entre femmes et hommes, tant en termes de compétences professionnelles que de prise de conscience socioculturelle.

3.4.2. Le Comité souligne que la formation ainsi que l'éducation et la formation tout au long de la vie sont des composantes essentielles de toute initiative visant à développer l'emploi au niveau local. Naturellement, il peut y avoir, et il y aura, des projets qui considèrent la formation (spécifique même si elle est vaste) comme l'objectif d'une stratégie locale. La communication à l'examen reprend toutefois, à l'annexe 2, la proposition formulée par le Comité dans son précédent avis, relative à la promotion "d'initiatives et d'accords territoriaux pour la formation". Le Comité attire l'attention de la Commission sur cette exigence, qui fait partie d'une approche stratégique plus vaste et est un élément essentiel de la formulation de toute initiative.

3.5. Le Comité se félicite de la décision de la Commission d'organiser l'année prochaine un forum sur le développement local et se déclare d'ores et déjà intéressé et disposé à apporter sa contribution à un moment de vaste réflexion. La communication laisse entendre que cet événement est prévu pour début 2003 et qu'une analyse d'évaluation des 89 pactes territoriaux lancés en 1997 en tant que projets-pilotes sera finalement disponible vers le milieu de la même année. Étant donné que quelques mois seulement sépareront ces deux événements et que le forum se veut un lieu d'échange d'expériences et d'informations, il serait peut-être plus opportun de les faire coïncider.

3.6. Comme le Comité l'a déjà signalé, la transposition réussie de la SEE au niveau local et la participation active de la société civile à l'identification de stratégies et de procédures constituent des éléments décisifs pour promouvoir, chez les citoyens européens, un sentiment d'appartenance à une communauté et rétablir leurs liens avec les institutions. Il est néanmoins indispensable que les politiques de l'emploi restent fidèles aux principes fixés à Lisbonne et confirmés ensuite par le récent Conseil de Laeken. Aussi faut-il, d'une part, créer des emplois durables et de qualité (à ce propos, il est préoccupant que la Commission ait reconnu, dans un document récent, que le concept d'"emploi de qualité" manque de points de référence sûrs et efficaces) et, d'autre part, définir, soutenir et promouvoir le modèle social européen: il s'agit de deux aspects essentiels pour maintenir la cohésion sociale au sein de l'Union et la renforcer en vue de l'élargissement.

3.6.1. L'économie européenne a toutefois donné des signes de ralentissement clairs et les perspectives de reprise sont envisagées avec beaucoup de prudence. Le niveau local est étroitement lié aux niveaux national et communautaire. Aussi des décisions doivent-elles être prises pour relancer en priorité et de manière décisive la croissance économique et l'emploi.

3.6.2. Il existe des marges de manoeuvre qu'il faut utiliser de manière décidée, tout en consolidant un modèle de développement durable tant du point de vue social qu'environnemental. Ces deux aspects exigent des garanties et une protection. Ces deux points d'équilibre fondamentaux doivent être identifiés et respectés à tous les niveaux, du niveau communautaire au niveau local.

3.6.3. Le niveau local est un microcosme au sein duquel les possibilités et les risques les plus immédiats et les plus réels sont réunis dans un même élément: la capacité de chaque citoyen à vérifier immédiatement l'efficacité réelle des choix politiques. Par conséquent, la réussite des choix qui font l'objet de la communication à l'examen dépendra notamment, à court mais surtout à long terme, de l'efficacité des propositions auxquelles nous avons tenté d'apporter notre contribution, mais aussi et surtout, des avancées qui auront été décidées au plus haut niveau.

Bruxelles, le 24 avril 2002.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) Avis sur la communication de la Commission "Agir au niveau local pour l'emploi - Donner une dimension locale à la stratégie européenne pour l'emploi", JO C 14 du 16.1.2001.

(2) Proposition de décision du Conseil sur les lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres en 2002 - COM(2001) 511 final.

(3) Avis du Comité économique et social sur la "Communication de la Commission aux États membres définissant des orientations pour une initiative communautaire concernant la régénération économique et sociale des villes et des banlieues en crise en vue de promouvoir un développement urbain durable - Urban", JO C 51 du 23.2.2000.

(4) Communication de la Commission sur la mise en oeuvre des actions innovatrices au titre de l'article 6 du règlement relatif au Fonds social européen pour la période de programmation 2000-2006 - COM(2000) 894 final.

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