30.4.2004   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 106/22


Pourvoi introduit le 26 février 2004 par British Airways plc contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2003 par la première chambre du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l'affaire T-219/99, British Airways plc contre Commission des Communautés européennes, soutenue par Virgin Atlantic Airways Ltd.

(Affaire C-95/04 P)

(2004/C 106/40)

La Cour de justice des Communautés européennes a été saisie le 26 février 2004 d'un pourvoi dirigé contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2003 par la première chambre du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l'affaire T-219/99 (1), British Airways plc contre Commission des Communautés européennes et formé par British Airways plc (ci-après BA), ayant son siège à Waterside (Royaume-Uni), représentée par R. Subiotto et J. Temple Lang, solicitors, R. O'Donoghue et W. Wood QC, baristers.

La partie requérante conclut à ce qu'il plaise à la Cour:

annuler, totalement ou partiellement, l'arrêt rendu dans l'affaire T-219/99,

British Airways plc contre Commission des Communautés européennes;

annuler ou réduire le montant de l'amende de BA dans une proportion que laCour jugera appropriée dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation; et

prendre toute autre mesure que la Cour jugera appropriée.

Moyens et principaux arguments:

A.

Le Tribunal de première instance a commis une erreur en droit en appliquant le mauvais critère pour apprécier le caractère exclusif des commissions de BA

Le Tribunal de première instance a déclaré que les commissions de BA étaient «fidélisantes» et, par conséquent, avait un effet d'exclusion. Cependant, le critère de «fidélisation» du Tribunal de première instance ne saurait distinguer entre la fidélisation des clients garantie par un comportement d'exclusion abusif et la fidélisation des clients résultant d'une concurrence légitime par les prix. S'il est accepté, le critère de «fidélisation» du Tribunal de première instance créerait une importante insécurité juridique quant à la portée de la concurrence légitime par les prix, et découragerait donc les entreprises de s'engager dans une concurrence légitime par les prix, contrecarrant l'objectif fondamental du droit de la concurrence communautaire.

B.

Le Tribunal de première instance a commis une erreur en droit en ne tenant pas compte des preuves relatives au fait que les commissions de BA n'avaient aucun impact matériel sur les concurrents

Le deuxième moyen de BA concerne les conclusions du Tribunal de première instance relatives aux effets des commissions de BA. Des preuves claires ont démontré que la part des ventes des rivaux a augmenté au cours de la période de l'infraction alléguée et que la part de BA dans les ventes des agences de voyage a diminué. Le Tribunal de première instance a rejeté cette preuve, affirmant que le comportement de BA «n'a pas pu manquer de produire» un effet sur ses rivaux et que les concurrents de BA auraient eu de meilleurs résultats en l'absence de ce comportement. Le Tribunal de première instance a ajouté que, lorsqu'une entreprise dominante met en oeuvre une pratique tendant à évincer ses concurrents, le fait que le résultat n'est pas atteint ne suffit pas à s'opposer à une constatation d'abus.

Le raisonnement est erroné. En premier lieu, le droit de la concurrence exige que le Tribunal examine les effets actuels ou probables d'un comportement prétendument abusif. Cela était certainement approprié dans le cas d'espèce, étant donné que le comportement de BA a duré suffisamment longtemps pour apprécier ces effets. En deuxième lieu, il existait des preuves claires, dans la présente affaire, de ce que les pratiques de BA n'avaient pas d'incidence matérielle. BA ne suggère pas qu'il faut démontrer dans chaque cas des effets réels. Mais c'est manifestement autre chose que d'affirmer, ainsi que le fait le Tribunal de première instance, que l'on peut ne pas tenir compte de preuves claires indiquant une absence de tout effet. Les constatations du Tribunal de première instance à cet égard, si on les accueillait, signifieraient que les pratiques d'incitation telles que celles en cause dans la présente affaire seraient en soi abusives, quel que soit leur effet réel ou probable. Ce n'est pas la règle que fixe l'article 82 CE, qui exige un examen «de toutes les circonstances» pour apprécier si les opportunités des rivaux ont été matériellement limitées.

C.

Le Tribunal de première instance a commis une erreur en droit en n'examinant pas s'il y avait un «préjudice pour les consommateurs» au sens de l'article 82, sous b), CE

Un comportement qui «limite» le marché des concurrents d'une société dominante n'est illégal, au regard de l'article 82, sous b), CE, que s'il cause «un préjudice pour les consommateurs». L'article 82, sous b), CE protège clairement la concurrence et les consommateurs, et non pas les concurrents. Le Tribunal de première instance a commis une erreur en droit en n'examinant pas la question de savoir si les commissions octroyées par BA aux agents de voyage qui ont de bons résultats a porté préjudice aux consommateurs. L'arrêt attaqué ne comporte aucune analyse de cet élément, mais examine uniquement la situation des concurrents de BA.

D. Même si les commissions de BA avaient été en principe susceptibles de «limiter» les marchés des concurrents, le Tribunal de première instance a commis une erreur en droit en n'analysant pas ces effets

Il ne faut examiner le quatrième moyen de BA que si, contrairement à ce que soutient BA par ses premier, deuxième et troisième moyens, ses systèmes d'incitation étaient en principe susceptibles de limiter les marchés des rivaux au préjudice des consommateurs, en violation de l'article 82, sous b), CE. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal n'analyse pas ni ne quantifie la mesure dans laquelle les commissions de BA ont limité les marchés des rivaux, à deux égards: i) le Tribunal de première instance a erronément traité les accords commerciaux et les systèmes de primes de résultat comme ayant le même effet, alors que chacun avait des modalités différentes et étaient en vigueur pour des périodes différentes, et qu'au moins un des deux (le système de primes de résultat) n'a pas pu être exclusif quelle que soit la base retenue; ii) le Tribunal de première instance n'a pas examiné «l'ensemble des circonstances» pour déterminer de quelle manière les rivaux de BA ont été affectés par ses systèmes de commissions.

E.

Le Tribunal de première instance a mal appliqué l'article 82, sous c), CE en ce qui concerne l'effet discriminatoire des commissions de BA

Le Tribunal de première instance a mal appliqué l'article 82, sous c), CE en constatant que les commissions de BA ont opéré une discrimination entre les agents de voyage. L'article 82, sous c), CE n'exige pas que l'ensemble des consommateurs bénéficie des mêmes prix et des mêmes modalités. Il interdit les différences uniquement si: i) les transactions comparées sont équivalentes; ii) les conditions appliquées aux transactions sont différentes; et iii) un des partenaires commerciaux souffre d'un désavantage concurrentiel vis-à-vis de l'autre partenaire commercial en raison de telles différences. Au lieu d'appliquer le texte exprès de l'article 82, sous c), CE, le Tribunal de première instance s'est contenté de supposer que le simple fait que deux agents reçoivent des taux de commissions différents avait «naturellement» un impact matériel sur leur capacité à se faire mutuellement concurrence.


(1)  JO C 20, du 22 janvier 2000, p. 21.


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