Post de Désirée Deneo

Voir le profil de Désirée Deneo, visuel

Doctorante en Études Urbaines - Consultante en Droits des femmes et féminismes- Activiste Féministe - Secrétaire Générale de La Ligue ivoirienne des droits des femmes

Le féminisme n’est pas nouveau pour les Africaines, tel est l’argument qui a motivé ma réflexion dans le cadre d’un panel sur le féminisme en Afrique subsaharienne organisé par le Forum des Femmes Journalistes de la Méditerranée. Lorsque les détracteurs des féministes africaines, les masculinistes ou encore les mouvements anti-droits s’attaquent à elles, ils évoquent l’argument selon lequel c’est un courant importé de l’Occident qui vient pervertir le fonctionnement de la société africaine. Cela témoigne d’une méconnaissance de l’histoire africaine ou encore de la malhonnêteté intellectuelle. En effet, les femmes africaines ont été actrices des grandes mutations sociales et politiques qu’a connues le continent africain. Lorsqu’on jette un regard rétrospectif sur l’Afrique précoloniale jusqu’à nos jours, on constate que celles-ci ont non seulement dirigé des empires et des royaumes, mais ont été des activistes (Passy 2023, Dieng 2021, Goerg 2017, Sarr 2009). Comprendre la place des femmes africaines dans la société précoloniale permet de saisir le sens du combat qu’elles ont mené contre le modèle occidental qui remettait en cause des acquis que leur conféraient leurs sociétés. Des femmes remarquables ont assumé dans certaines circonstances la direction de leur peuple, notamment dans des luttes entre États africains ou contre les invasions arabes et les conquêtes coloniales. En imposant un modèle familial patriarcal et en excluant les femmes des sphères du pouvoir, la colonisation a profondément marqué les rapports sociaux en Afrique, enfermant les femmes dans des rôles subalternes et les privant de leurs droits. Les femmes africaines ne sont pas restées inertes face au colon blanc, elles ont lutté pour leurs droits, mais aussi contre la présence coloniale. L’on peut citer l’exemple des Amazones du Bénin, des Ivoiriennes qui ont marché sur Grand-Bassam ou encore le soulèvement des Nigérianes en 1925 contre l’imposition par les Anglais d’une patente et l’abandon des anciennes pratiques monétaires avec les cauris dans le port de Calabar et même celui de la syndicaliste et féministe malienne Aoua Keïta. Après les indépendances, des femmes africaines ont affirmé haut et fort leur engagement féministe. La place de La Parole aux négresses d’Awa Thiam (1978) est centrale dans la pensée féministe africaine noire. Ce livre pose pour ma part, les bases de l’intersectionnalité et de la pensée féministe africaine noire. En m’appuyant sur le cours Féminismes d’Afrique que j’ai donné avec Leslie Touré Kapo l’hiver dernier, j’ai soutenu l’idée selon laquelle les mouvements féministes en Afrique subsaharienne ne sont pas ex nihilo : ils se fondent sur un matrimoine riche et puissant de luttes qui traversent l’histoire. Ces mouvements féministes en Afrique subsaharienne sont diversifiés et pluriels. Grâce à Internet, il existe une convergence et une interconnexion des luttes féministes du continent.

  • Aucune description alternative pour cette image
Sarah Bayoh

I turn dreams into projects and projects into reality.

3 sem.

Merci Désirée Deneo pour ce rappel de nos racines. L’Afrique a perdu de vue beaucoup de ses pouvoirs du fait de la colonisation et nombre d’entre eux étaient entre les mains des femmes.

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Explorer les sujets