La CCJA ( Cour commune de Justice et d’Abitrage ): juge du droit ou juge des faits?
Loin d'être un troisième degré de juridiction, la Cour commune de justice et d'arbitrage (CCJA) de l'OHADA est une juridiction de cassation singulière qui se transforme, occasionnellement et accessoirement, en juge du fond.
La CCJA est juge de cassation car elle est juge du droit et non du fait: cette assertion, qui est totalement vérifiée lorsqu’elle rend un arrêt de rejet, le demeure - mais partiellement- en cas de cassation. La reconnaissance à la CCJA de la qualité de juridiction de cassation tient aussi en ce qu'elle est juge de l'arrêt et non de l'affaire : cette affirmation, qui est également totalement vérifiée en cas de rejet du pourvoi, le demeure -mais partiellement- en cas de cassation. En effet, après la cassation, la CCJA va entreprendre de remplacer la décision annulée par son propre arrêt, ce qui est propre à une juridiction du fond.
La manifestation de la transformation réside dès lors dans le remplacement de la décision annulée. En effet, au lieu de renvoyer l'affaire devant un juge du fond pour qu'elle y soit rejugée, la CCJA va lui substituer son propre arrêt.
L'institution de la cassation repose sur la distinction fondamentale du fait et du droit en sorte que les fonctions du juge de cassation et du juge de fait sont, par nature, antinomiques.
Cette affirmation de André Perdriau vient rappeler une règle bien établie : une Cour suprême ne peut pas (ne doit pas ?) statuer en fait?.
Pourtant l'article 14 alinéa 5 du Traité de l'OHADA dispose qu'« en cas de cassation la Cour Commune évoque et statue sur le fond ». Or la CCJA est juge de cassation dans le contentieux relatif a l'interprétation et l'application des Actes uniformes, elle a pour rôle de se substituer aux cours nationales de cassation afin d'unifier l'interprétation du droit uniforme et éviter ainsi un renvoi devant une juridiction du dernier ressort en cas de cassation.
la CCJA Peut-elle juger des faits?
Des auteurs qui se sont intéressés à la question, y ont répondu par l'affirmative. D'autres, en revanche, adoptent une position nuancée :
«la CCJA est juge du droit (dans un premier temps) pour examiner la décision rendue en dernier ressort et juge du droit et du fait (dans un second temps) pour confirmer ou reformer la décision rendue en premier ressort (ou en premier et dernier ressort) ».
À cet égard, les arguments avancés pour justifier la rétention de l'affaire par le juge communautaire suprême ne manquent pas.
On invoquera le fait pour les parties de ne point s’obliger à retourner devant une autre juridiction (de renvoi) qui serait désignée pour rejuger l'affaire.
Alors, les rédacteurs du Traité « n'ont-ils pas voulu, en instituant une cassation sans renvoi, accélérer la justice pour qu'elle soit rendue dans des délais raisonnables par des juges de cassation qui statuent au fond lorsqu'ils annulent la décision attaquée ?
Avocate au Barreau de Paris - Counsel chez FTMS - Droit pénal international - Droit pénal des affaires - Entreprises et droits humains
2 sem.Encore félicitations Sofia !