Le Monde a publié hier son enquête « Débarquement : la bataille contre l’érosion »
🔵 « Face à la menace de perdre les traces des champs de bataille du 6 juin 1944, inventaire et travaux sont déjà en cours, mais l’avenir reste incertain » écrit le journaliste du quotidien.
🔵 L’érosion affecte notre imaginaire, notre histoire… et notre patrimoine. En 2014, les dégâts anticipés par les périls naturels ont conduit des scientifiques américains à émettre un rapport répertoriant la menace qu’ils représentaient sur les sites historiques de plus grande valeur aux États-Unis. C’est notamment le cas des premières colonies anglaises américaines, telle la ville de Jamestown en Virginie menacée par la montée des eaux.
🔵 En Bretagne, plus de 80 monuments historiques sont menacés par l’élévation du niveau de la mer. Le monument funéraire de Chateaubriand, par exemple, situé face à la mer, sur le petit îlot de Grand Bé à Saint-Malo, est en passe d’être englouti par les eaux.
🔵 Des craintes similaires se font entendre avec la menace de disparition qui pèse sur les sites antiques de l’île de Délos, dans les Cyclades grecques, ou sur la ville de Saint-Louis du Sénégal, inscrite à l’héritage commun du patrimoine mondial de l’Unesco. Au Royaume-Uni, le village médiéval de Happisburgh est en sursis. La liste s’allonge à l’échelle planétaire…
🔵 Dans son ouvrage 𝐿𝑒 𝑆𝑖𝑔𝑛𝑎𝑙, l’autrice Sophie Poirier relate le choc esthétique qu’elle éprouve face à la disparition de l’immeuble du même nom. A Soulac-sur-Mer, le bâtiment a été détruit préalablement à son engloutissement sous les flots. Cette barre, pas toujours appréciée des habitants locaux, exprimait un vécu, une époque passée. La disparition du 𝑆𝑖𝑔𝑛𝑎𝑙 peut également correspondre à la remise en cause du mode de vie des populations qui ont été jadis attachées à ce lieu. Ces transformations témoignent de la rupture avec un tourisme balnéaire, d’une époque désormais révolue, où l’océan, plutôt qu’une entité « active », apparaissait comme une simple ressource mise à disposition.
🔵 Les populations entreprennent le deuil de cette vie menacée par l’érosion. Or le propre du deuil, nous explique la philosophe Vinciane Despret, c’est que les disparus apparaissent en plus beau, « en mieux », tout comme l’ère de l’immeuble 𝐿𝑒 𝑆𝑖𝑔𝑛𝑎𝑙 aujourd’hui disparu, c’est-à-dire celle de l’abondance des Trente Glorieuses, dont la disparition est ainsi rendue inacceptable.
La réflexion sur le deuil de la philosophe nous inspire : s'agit-il d'accepter la disparition ou d’entreprendre un rapport à l’océan plus complet ?
https://lnkd.in/exDWs_37
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