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Avocat associé - PHPG - assurance, construction et responsabilités civiles

Arrêt de la semaine – est ce que l’extension des opérations d’expertise à de nouveaux désordres a un effet interruptif de la prescription sur l’action visant portant sur les désordres initiaux ? Dans cette affaire (Civ. 3e, 2 mai 2024, n° 22-23.004), le propriétaire d’un ensemble immobilier a sollicité une expertise judiciaire portant sur des décollements généralisés des peintures. Cependant, plus de dix années se sont écoulées entre le prononcé de l’ordonnance désignant l’Expert judiciaire et l’assignation au fond. Or, la suspension du délai pour agir le temps que dure les opérations d’expertise judiciaire (art. 2239 du Code civil) n’est pas applicable au délai de forclusion comme l’action en responsabilité décennale des constructeurs (Civ. 3e, 5 janvier 2022, n° 20-22.670). Pour éviter la forclusion, le propriétaire de l’ouvrage se prévalait de la demande d’extension de la mission de l’expert judiciaire à d’autres désordres à laquelle il s’était associé par voie de conclusions. Il soutenait ainsi que ses conclusions avaient un effet interruptif de la prescription tant pour les désordres auxquels l’extension de la mesure d’expertise judiciaire est demandée que pour les désordres sur laquelle porte la mesure d’expertise judiciaire initiale. La Cour de cassation ne suit cependant pas un tel raisonnement en retenant que « la demande en justice aux fins d’extension d’une mesure d’expertise à d’autres désordres est dépourvue d’effet interruptif de prescription ou de forclusion sur l’action en réparation des désordres visés par la mesure d’expertise initiale ». Pour ce faire, elle rappelle que « l’effet interruptif attaché à une assignation ne vaut que pour les désordres qui y sont expressément désignés ». En effet, l'effet interruptif de prescription attaché à une demande en justice ne s'étend pas à une autre demande différente de la première par son objet. Ainsi, en matière de désordres, la Cour de cassation retient qu’une assignation ne peut « interrompre la prescription de l'action en réparation de désordres qui n'y sont pas mentionnés » (Civ. 3e, 8 février 2023, pourvoi n°21-14.708). Il convient donc d’être particulièrement vigilant dans le descriptif des désordres figurant dans l’assignation initiale, car la prescription n’est pas interrompue pour les désordres qui n’y sont pas mentionnés. Il en va également de même s’agissant des parties visées dans l’assignation. Il a été jugé que « pour être interruptive de prescription, l'assignation doit être adressée à celui que l'on veut empêcher de prescrire et que celle délivrée par l'assureur dommages-ouvrage aux intervenants à la construction et à leurs assureurs n'est pas interruptive de prescription au profit du maître de l'ouvrage qui n'a assigné en référé expertise que l'assureur dommages-ouvrage » (Civ. 3e, 21 mars 2019, n° 17-28.021).

Anthony Pinto

Avocat - Je résous vos problèmes de travaux, de préférence sans recourir à la justice

7 mois

Moralité : toujours faire attention à la prescription et ne pas hésiter à faire ses propres assignations

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