À propos de la douceur en chirurgie
Depuis quelques années de nouvelles approches chirurgicales ont vu le jour grâce à l’évolution des techniques. La chirurgie mini-invasive est l’une des avancées les plus marquantes de ces dix dernières années. Moins traumatisante, moins agressive, elle entraîne naturellement des suites opératoires moins douloureuses et une reprise plus rapide de l'activité. Ainsi, certaines interventions qui nécessitaient encore il y a peu des hospitalisations de quelques jours, peuvent aujourd’hui être envisagées sur le mode ambulatoire.
Pourquoi la chirurgie doit-elle progresser …
La toute-puissance du chirurgien s'exprime dans la capacité à manier la douceur aussi bien que la technique. Bénéficier d’un geste précis et délicat dont l’action va contribuer à traiter le mal sans dommage pour les tissus sains représente le noble art de la chirurgie.
Longtemps, on a associé la douceur à des valeurs dites féminines. Les notions de douceur, de délicatesse, de légèreté peuvent paraître paradoxales avec un certain imaginaire collectif qui perçoit la chirurgie comme brutale, qui écorche et entame les chairs. A fortiori, lorsque l’on sait que la chirurgie a été pratiquée, jusqu'à il y a quelques décennies, en majorité par des hommes. Force est de constater que la recherche de cette part de féminité, synonyme de délicatesse, d’écoute, de compréhension de plus en plus poussée des organismes, est devenue un objectif capital pour faire progresser la chirurgie. La délicatesse, par exemple, ne s’oppose pas à la précision du geste qui doit être sûr et précis, parfois rapide, toujours expérimenté. Au contraire, les progrès dans le domaine de la chirurgie et de l’anesthésie tendent à guérir toujours plus efficacement tout en étant délicat pour diminuer les traumatismes, les douleurs, et les complications post-opératoires. Les ophtalmologues ne sont-ils pas passés du bistouri aux lasers pour traiter au micron près des tissus fragiles et délicats comme la cornée et la rétine, illustrant ici parfaitement la pensée d’Alphonse Gratry « La douceur c'est la plénitude de la force » ?
…vers plus de douceur ?
Pratiquer la chirurgie avec douceur, au-delà du savoir-faire, se révèle aussi dans le savoir-être. L’empathie, la communication, l’échange, la mise en confiance sont des réflexes qui vont contribuer à adoucir l’aspect anxiogène que peut ressentir le patient tout au long de sa prise en charge. In fine, il s’agit pour le chirurgien et son équipe d’accompagner son patient vers la guérison avec des interventions de moins en moins agressives et une réhabilitation la plus rapide possible aussi bien sur le plan psychologique que physique. La vocation médicale sur le plan humain et éthique, n’est-elle pas de procurer soulagement, soins et si possible guérison à des individus souffrants ou malades ? Aussi étonnant que cela puisse paraître, la douceur est une notion qui n’occupe pas le même rang que celui des avancées techniques ou médicamenteuses dans l’analyse des progrès de la chirurgie. C’est que la douceur s’appuie sur la connaissance précise de l’anatomie de l’Homme, et aujourd’hui, cette dernière ne fait plus l’objet de découvertes majeures.
Anatomie et chirurgie : un binôme indissociable
C'est dans les laboratoires d'anatomie que débute la formation du Chirurgien, et c'est là que celui qui désire progresser dans l'art de la chirurgie doit la poursuivre pendant longtemps. L'importance de la formation continue en anatomie est capital. Guy de Chauliac, un des pères de la chirurgie au XIVème siècle, faisait déjà remarquer : « tout artisan est tenu de savoir ou connaître le sujet sur lequel il travaille ; autrement il erre en oeuvrant. Il s’ensuit donc qu’il est nécessaire aux chirurgiens de savoir l’Anatomie ».
L'anatomie descriptive et topographique, celle qui intéresse les chirurgiens, progresse peu. Tout a été découvert entre la Renaissance et le début du XXème siècle. Dans l'intérêt de la chirurgie, il faut faire progresser son enseignement. " Le chirurgien doit être un anatomiste averti. En diminuant la durée des études anatomiques au profit des recherches physiologiques on fera peut-être des grands savants, mais on préparera certainement une génération d'opérateurs détestables " témoigne H.A. Hartmann, au début du XXème.
Car il est indéniable que l'enjeu majeur, pour qu'une chirurgie soit réussie, est de préserver les tissus sains environnants et surtout les éléments nobles comme les nerfs ou les vaisseaux. Comment y parvenir sans une parfaite connaissance de l'anatomie de la région dans laquelle oeuvre le chirurgien ? La plus value d'une bonne connaissance anatomique prend toute son importance lors de la gestion d'événements imprévus durant l'opération routinière. Sorte de grammaire appliquée à l'acte chirurgical, de bonnes connaissances anatomiques contribuent, associées à la dextérité et à la qualité du geste, à fluidifier l'intervention. Elle permettent notamment d'éviter des complications auxquelles le chirurgien peut s'exposer s'il ne les possède pas. Ainsi maîtriser l'anatomie, c'est avant tout pour le chirurgien un moyen d'être, sur le plan pratique, plus efficace, plus serein, plus délicat.
Et en matière d’efficacité, Jean de La Fontaine, dans sa fable « Phébus et Borrée », avait peut-être raison : « Plus fait douceur que violence ».
Psychologue Clinicienne et Neuropsychologue des organisations. Dirigeante SAS ICARE RELIANCE- SAS KATALIANCE- AFL Transition - Maison Régionale des femmes -Ingénieure de projet-Innovation Consultante #QVT #RPS-Formation.
7 ansBravo pour ce bel article transversal, qui décloisonne et ôte bien des confusions dans les concepts en réintroduisant l'imaginaire collectif stéréotypé comme frein du progrès.
Chef du service chez CENTRE DE CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE ET REPARATRICE LIBOURNE
8 ansJe connais des femmes qui ne sont pas douces du tout😉
Présidente et fondatrice de l'Atelier du Dauphiné. Atelier d'expression et d'exploration de soi. Médiation artistique et art-thérapie. Enfants et adultes.
8 ansun peu de douceurs ds ce monde de brutes...😉
Co-fondateur des Chemins Collaboratifs Facilitateur d'intelligence collective et Accompagnant en Gouvernance Partagée
8 ansMerci pour cette élégante contribution. Je me permet de vous suggérer de la revisiter sous l'angle de ce qui pour moi me semble être la partie la plus puissante et riche de mon métier de chirurgien; la relation avec le patient. Je crois que la pertinence et la justification de la bienveillance (autre mot pour douceur ) de mes actes se crée dans la bienveillance de l'accueil et de l'accompagnement de l'autre. "Ainsi, comprendre mon patient, c'est pour moi, chirurgien, le moyen d'être, sur un plan global plus efficace, plus serein et en vérité bienveillant" Belles rencontres à vous
Responsable Commercial WSC COLOPLAST
8 anset aussi les suite de soins avec le bon pansement