ÉCRIRE -
"Si je suis écrivain et non philosophe, c'est que je pense avec des mots et non avec des idées." Albert CAMUS - Carnets 99
Je me mets enfin à reprendre ce matin un roman qui était en cours de travail depuis plus longtemps lorsque je suis partie pour ma "longue vacance" - et vacance de tout en effet, sauf peut-être d'une probable réparation -. C'est en réalité un texte écrit dans les années 80 sous le titre invraisemblable de "UNE ou l'incroyable petite grande âme" (expression reprise de Victor Hugo) - titre que je ne garderai probablement pas mais je verrai plus tard -, texte jamais achevé, très souvent repris sans succès donc régulièrement abandonné et… qui repart.
En voici l'ouverture et ci-dessous une photo de mon carnet de travail de l'an dernier et du fameux cahier noir et rouge d'origine "dans son jus" après quelques années dans mon grenier ici…
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"C'est en vidant pour m'en débarrasser une vieille malle du grenier que j'ai découvert ce cahier. Faudrait-il dire "retrouvé" ? Non. Car j'ignorais même l'avoir perdu et qu'il se dissimulait dans mon cerveau sous à peu près autant de toiles d'araignées que dans la malle où il dormait. Et néanmoins je l'ai re-connu comme mien.
Un cahier comme je les aime - avec une longue couverture noire et dont le dos et les coins étaient d'un rouge violent - au point d'espérer soudain qu'il était vierge tant j'eus aussitôt une furieuse envie de l'ouvrir pour y entamer mon prochain roman. C'était comme si ce dernier ne pouvait être écrit que là, précisément sur CE cahier qui m'aurait attendu peut-être, et comme si, je me le demande aujourd'hui, l'écriture devait à l'évidence naître de CE cahier, voire comme s'il la contenait déjà en lui par quelque tour de magie, et à vrai dire je ne suis pas loin de penser aujourd'hui, à présent que tout est écrit, qu'en effet tout l'était, de la même manière que les mots, les phrases, les idées que j'y ai déposés étaient déjà en moi, juste codés d'une autre manière.
Le cahier une fois ouvert s'est avéré griffonné d'une petite écriture nerveuse, d'une encre violette à la plume que j'utilisais à l'époque - car le cahier remontait à une quarantaine d'années - avec souvent des dessins griffonnés dans la marge. Ce qui s'est produit alors a ressemblé plutôt à quelque chose comme un retour à la maison, ou, pour être plus exacte, à un retour en moi, en un lieu qu'on habite rarement tant il effraie, et qui est sa propre multiplicité, ces ombres errantes en nous qui nous ressemblent, s'approchent, s'enfuient, se cachent ou se déguisent, et parfois même en lutte l'une avec l'autre."