[Édito] Centres E. Leclerc : les raisons d'un succès
L'édito toujours d'actualité du 10 octobre 2023.
En septembre 2023, la part de marché des centres E. Leclerc a bondi de 1,4 point ! Alors qu'Intermarché et Système U sont également en forme, faut-il y voir le triomphe des commerçants indépendants? Il est vrai qu'ils connaissent parfaitement leur zone de chalandise et n'ont jamais cessé d'investir dans leur outil de travail. Quant aux organisations en binômes (adhérents-permanents), elles limitent les coûts du siège social et de la centrale d'achat, donnent de la cohésion à l'ensemble et évitent de s'éloigner du terrain.
Ce statut n'est pourtant pas à lui seul garant du succès. N'oublions pas que Lidl, Aldi et Action, qui enregistrent des progressions spectaculaires, sont des groupes intégrés. Et que, si E. Leclerc récolte le fruit de son travail, il profite aussi des « trous d'air » de certains de ses concurrents comme Casino. Autre atout, le groupement est homogène et cette cohérence (le bon format pour faire de bonnes péréquations de marges) peut être une force face à des concurrents protéiformes. Et à l'international, le Mouvement ne s'est pas égaré; lorsqu'il s'implante dans un pays, il s'agit avant tout d'initiatives personnelles ou régionales, comme récemment au Luxembourg, sans conséquences financières globales.
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Mais la vraie raison de cette marche en avant est ailleurs. Elle est dans la continuité d'une ligne directrice. Depuis 1949, E. Leclerc a toujours mené des « combats » et martelé son discours consumériste. En capitalisant sur le thème du prix, l'enseigne est plus crédible que d'autres avec une image prix au meilleur de sa forme. Et une centrale d'achat qui est un rouleau compresseur et que certains admirent quand d'autres la conspuent. Sans parler de l'omniprésence médiatique de Michel-Édouard Leclerc…
Il faut aussi reconnaître que le Mouvement n'a pas hésité à faire tomber quelques tabous. C'est ainsi qu'après la loi Galland de 1996, il a fortement développé sa MDD (qui assure aujourd'hui une bonne masse de marge) avec le lancement dès 1997 de la marque Repères. Aujourd'hui, la même enseigne (souplesse du jeu de jambes !) ne renie pas, à l'inverse, l'apport des grandes marques et ne cède pas à la tentation de la baisse de l'assortiment. Or l'offre est l'un de ses points forts. E.Leclerc, c'est aussi du test and learn permanent. Rien ne laissait prédire, par exemple, que l'enseigne deviendrait leader de l'e-commerce avec ses drives.
Mais le Mouvement pourra-t-il se maintenir au sommet ? Cela dépend bien évidemment des successions et transmissions de magasins, notamment pour les grands «paquebots ». Des interrogations se posent également sur l'après-Michel-Édouard Leclerc. Sans oublier la conjoncture économique, la réplique des concurrents, la force des nouveaux discounters étrangers qui pourraient écorner son image prix, les conséquences d'une éventuelle concentration des concurrents intégrés ou des lois qui peuvent « tomber » à tout moment et changer la donne, et sa capacité à ne passe reposer sur ses acquis et à ne pas avoir le succès arrogant. On le voit, même si tout va bien aujourd'hui, le plus dur sera sans doute de garder le rythme… Et dans un monde du commerce où tout va très vite, la vérité d'un jour n'est pas forcément celle du lendemain.
Listening to the world.International retail and franchise expert. Chairman experience in international company.
1 ansOui Leclerc est en pleine forme et gagne des parts de marché, tout comme Système U et Intermarché bien que dans une moindre mesure. Je partage votre analyse quant aux points communs et les raisons profondes qui expliquent le succès des indépendants auprès des consommateurs. Ils ont les pieds sur terre, sont encrés au quotidien dans leurs points de vente dont ils sont responsables financièrement et ont le feedback en permanence de leurs clients. Cela leur permet de rectifier ou d’affiner rapidement leur politique commerciale. Le 1+1 des binômes associés-collaborateurs est une vraie valeur ajoutée. J’ai démarré chez Leclerc avant de passer chez Carrefour puis de diriger mes propres magasins chez U puis Intermarché, j’ai pu observer de l’intérieur leurs forces et leurs faiblesses. Pour revenir à Leclerc , cette performance fait particulièrement écho au moment ou c’est la catastrophe pour Casino , même si elle était plus que prévisible. Lorsque le discours marketing sur les prix ne correspond pas à la réalité , la sanction arrive forcément côté consommateurs. Leclerc profite des trous d’air de certains concurrents ? A moins qu’il ne fasse partie de ceux qui les favorisent et les amplifient ?