Évolution de la figure féminine dans Mad Men
De la fille facile à la femme puissante
Mad Men commence mal pour les femmes ! Quand un publicitaire suffisant voit une de ces collègues avoir une « bonne » idée, il s’écrit : « It was like watching a dog play the piano ». Littéralement, c’était comme "voir un chien jouer du piano… !"
Quand Betty Draper, sosie de Grace Kelly jusque dans son statut d’ancienne modèle devenue mère au foyer, souhaite retravailler et être mannequin pour Coca Cola, le mari, Don, fait en sorte qu’elle soit éliminée du casting. Tout le postulat de départ de Mad Men crie que l’homme, à l’orée des années 60, est supérieure et que la femme a accepté ce statut. Les jeunes femmes travaillent même dans l’agence de pub pour trouver un mari, puis se retirer en banlieue dans une vie « au foyer ».
Mais... La série brode aussi au fil des saisons des portraits de femmes qui s’émancipent. Si Betty est le parangon de la "Desperate Housewife", deux autres personnages en particulier s’opposent dans ce désir de se libérer du joug masculin.
Joan et Peggy: Deux modèles de femmes que tout oppose.
Deux archétypes de la réussite au féminin qu’on retrouve tout autant dans nos entreprises modernes.
Joan, dite « Red » à cause de sa chevelure flamboyante, est un ersatz de Marylin Monroe. Dans toute sa générosité voluptueuse, Joan use gentiment de ses charmes pour biaiser la domination masculine. Et elle s’émancipe à sa manière. En souriant et minaudant « utile », facile, pourrait-on dire. Joan joue avec les cartes qu’elle a en main et passe de responsable des secrétaires à associée du cabinet Sterling Cooper. Elle tentera le mariage, le beau militaire, l’homme riche et protecteur, mais aucun ne lui convient. Joan est trop intelligente pour accepter les statuts réducteurs de la femme mariée ou de la maitresse. Ce que veut Joan c’est être son propre maître. Et elle y arrive, à force de beaucoup de travail mais aussi de renoncements, en particulier sur sa dignité et son orgueil.
Si Joan est enjôleuse avec les hommes et a parfaitement compris comment les manipuler, elle est sèche et dure avec ses congénères féminines, particulièrement avec celles qu’elle admire, comme la jeune Peggy, son total opposé.
Peggy, elle, ne joue pas de ses charmes, qu’elle a plus discrets. Elle est au départ une ingénue dont on se moque. Au fur et à mesure des épisodes, elle apprend, se durcit, s’aigrit parfois mais ne cesse jamais d’avancer. Elle met son intelligence à son propre service, toujours au détriment de sa féminité. Elle devient la première femme à être promue rédactrice au sein de l’agence Sterling Cooper et à sortir de l’unique statut de secrétaire d’un homme. Elle est la première à avoir son propre bureau, avec une porte qui ferme, et sa propre secrétaire - paroxysme de la réussite - science-fiction, par les temps qui courent...
Mais pour y arriver, Peggy n’aura pas seulement que des renoncements à faire. Elle aura à faire des sacrifices. Être moquée par les hommes, ne pas être considérée comme une vraie femme par eux, supporter leurs blagues potaches sur les vraies femmes, cacher sa grossesse non désirée, abandonner son enfant, ne jamais s’épancher, retenir ses émotions.
Pour autant, Peggy est aussi libre. Elle vit en plein Manhattan au contraire de ses collègues qui finiront toutes en banlieue. Elle s’offre les aventures qu’elle choisit, avec les hommes qu’elle choisit. Elle fume, elle boit. Elle ravale ses larmes, comprend avec quelles cartes jouer. Peggy est le modèle abouti de la femme émancipée, plus moderne que Joan, en tout cas, à l’aube des seventies.
Mad Men semble être une série rétrograde pour les femmes mais c’est pour mieux mettre en lumière l’avènement et l’émancipation féminine dans l’entreprise et de la société. On pourrait dire que Peggy et Joan deviennent des femmes puissantes, chacune à leur manière - avec ce qu'est la société à ce moment là - au milieu de ces hommes de plus en plus tourmentés...
Intéressante idée à mettre en perspective avec le récent débat de la Une du Parisien sur le "monde d'après"! Gageons que hommes et femmes, ensemble, construiront le monde d'après...
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