10 ans d’entrepreneuriat en 10 leçons
Il y a un peu plus de 10 ans, à l’aube de mon 23e anniversaire, je démarrais Poudre Noire avec trois collègues d'université. Dix ans plus tard, je fusionne avec une autre firme, Logient, et entame un tout nouveau défi. C’est le moment de dire au revoir à cette entreprise, cette marque, pour dire bonjour à une nouvelle.
Pour ces 10 ans, je me permets de partager 10 choses que Arnaud de 33 ans aurait aimé dire à Arnaud de 22 ans.
1. Parle moins, écoute plus.
J’ai manqué beaucoup, beaucoup, d’occasions de ne pas parler au cours des 10 dernières années. Parfois, pour prouver quelque chose, pour combler un silence ou pour carrément me mettre un pied dans la bouche.
Une fois que les paroles sortent, il est impossible de revenir en arrière. Aussi bien de s’assurer que ces dernières sont justes. Et le bon côté de ne pas parler? Utiliser un autre sens, l’ouïe, qui est d’autant plus utile pour apprendre.
2. N’arrête jamais d’apprendre.
Ça m’a pris quelques années en sortant de la maitrise avant de remettre les pieds dans une université ou un centre de formation. J’aimerais dire que c’est par manque de temps, mais c’était surtout lié à de la naïveté et de l’arrogance : «je sors de l’école, je connais toute la théorie. Le reste, je vais l’apprendre sur le marché du travail.»
Deux mensonges. La théorie évolue constamment et il y a une grande limite à «apprendre sur le tas», car rien n’indique que les gens de qui l’on apprend se tiennent à jour.
Retourne à l’école. Suis des formations. Lis des livres. Abonne-toi à des revues d’affaires. Pose des questions à tes consultants. Analyse les façons de faire de tes supérieurs et mentors. Le succès de ta carrière et de ton organisation dépend de ta capacité à faire de nouveaux liens et appliquer de nouveaux concepts. Ces derniers ne se créent pas seuls.
3. Cultive ton influence, pas tes idées.
Une fois, j’ai émis une recommandation dans une rencontre client. Cette dernière n’a eu aucune traction. Plusieurs semaines plus tard, dans une rencontre similaire, une personne au sein de l’équipe du client prononce cette même recommandation, pratiquement mot pour mot. Standing ovation. Sur le coup, j’étais furieux. Une collègue qui n’avait pas senti ma frustration sur le coup me dit spontanément après la rencontre : «c’est débile l’influence que tu as sur ce groupe».
Cela a été un coup de pelle en plein visage. Non seulement elle avait raison, mais ma façon de voir mon rôle était erronée. À la fin de la journée, la stratégie proposée a primé et c’est tout ce qui compte.
4. Va chercher de l’aide.
J’ai fait une dépression à 26 ans et une autre à 31 ans. La première fois, je m’étais promis de ne jamais retomber dans le précipice et pourtant, après 1 an et demi de pandémie, j’étais à nouveau à la même place.
Aujourd’hui, j’ai une psychologue pour ma vie personnelle, une psychologue industrielle pour ma vie professionnelle et plusieurs mentors. Si c’était à refaire, je me serais entouré de ces experts dès le jour 1 et je ne les aurais jamais lâchés. Oui, il y a un coût à prendre soin de soi, mais il est beaucoup moins grand que le coût de la guérison.
Va chercher de l’aide, même si tu es invincible.
5. Entretiens d’autres hobbies.
«Si Poudre Noire arrêtait d’exister demain, tu serais qui?»
La question m’a donné le vertige. Après 5 ans de Poudre Noire, j’ai réalisé bêtement que je n’avais rien entretenu d’autre. Je ne faisais pratiquement plus de ski, je ne lisais plus de roman, je n’écoutais plus les nouvelles politiques, je n’ouvrais plus mes horizons et je n’apprenais plus rien à l’extérieur de mon champ d’expertise. Tout était axé autour de l’entreprise. Ce qui fait en sorte qu’à ma mi-vingtaine, j’étais le gars le plus plate que je connaissais. Je m’emmerdais moi-même, car je n’étais pas en mesure d’entretenir aucune discussion.
Prend le temps pour tes relations et pour tes hobbies. Ça te rendra plus créatif et plus productif.
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6. Embauche lentement.
Les mandats deviennent de plus en plus gros, la demande grandit trop rapidement. Vite, il faut embaucher! Ce faux sentiment d’urgence mène souvent à la plus grande erreur possible pour une firme de services : une mauvaise embauche.
Même si cela semble totalement contre-intuitif, il est plus rentable et meilleur pour votre réputation de retarder des mandats que d’embaucher quelqu’un que vous allez devoir remercier 3 mois plus tard. Cela crée de la dette, décourage l’équipe et vous prive d’une potentielle bonne embauche.
7. Fête tes victoires, analyse tes défaites.
Mon associé et moi ne fêtions jamais rien. Nous n’avions jamais le temps. Un gros mandat : oui, mais il faut le planifier. Un milestone important : oui, mais il faut planifier le prochain. Un projet accompli : oui, mais il y en a d’autres sur la table.
Je soupçonne que cela a eu une incidence indirecte sur mon estime, car nous développions uniquement notre capacité à voir ce qui allait mal ou ce qu’il y avait à faire. Comme si le chemin parcouru n’était que pavé d’échecs!
Parlant d’échecs, il est tout aussi important de les fêter, à leur façon. Ces derniers coûtent souvent très cher, assure-toi d’en avoir tiré toutes les leçons que tu peux.
Bref, arrête pour les bons coups et les moins bons coups.
8. Ne fais jamais d’ombrage au roi.
Tu es assis chez un client, avec le président et quelques-uns de ses V.-P. Ce dernier dit quelque chose de complètement erroné par rapport à une stratégie numérique et tu te dis «tiens, il me semble que c’est une bonne idée de montrer ma valeur ajoutée. Je vais le reprendre».
Ce n’est pas une bonne idée.
En anglais, l’on dit « never outshine the king », ce qui signifie d’éviter à tout prix de mettre la personne en charge dans l’embarras devant ses collègues. Ça m’a coûté au moins un gros mandat dans mon jeune temps. Tout se dit, mais il y a un moment et une façon appropriée de le faire.
9. Garde la personne responsable dans la boucle.
La VP marketing est là à la première rencontre, pour signer notre devis. Cinq mois plus tard, elle appelle en colère pour dire à quel point elle était déçue de son nouveau site Web. Elle était où durant ces cinq mois? Aucune idée. À ce moment-là, il est déjà trop tard : malgré les preuves écrites et les livrables intermédiaires signés, la relation d’affaires se brise.
On tient pour acquis que l’information circule de façon fluide au sein d’une organisation. C’est rarement le cas. Exige toujours que la personne qui prendra la décision finale soit dans les rencontres, sinon crée des rencontres avec elle. C’est dans ton droit.
10. Ne travaille pas sans être payé.
Chez Poudre Noire, nous avons été victime des faillites de deux de nos clients. Des clients qui payaient toujours bien, jusqu’au jour où ils ne payaient plus. Nous nous disions que c’était passager, ces entreprises semblent si bien aller!
La règle d’or est simple : un client saute une période de paiement régulier, investigue. Deux périodes? Arrête. Je t'assure que cela n’entachera pas ta relation d’affaires.
Tu n'es pas un bénévole et tu n’es pas une banque. Il n’y a aucune raison pour toi de financer les projets de tes clients.
Co-fondateur chez J&V
1 ansUne belle lecture ! Merci Arnaud
Designer d’expérience utilisateur (UX) et associé @P2-Co
1 ans11. Planifie ta Exit strategy pour n'avoir aucun regrets...
J'aide les data manager à maximiser leurs investissements autour des données / I help data manager to maximize their data investments.
1 ansExcellentes tes 10 leçons Arnaud. Merci du partage.
General Partner @ Telegraph // Co-founder of Heyday AI (acq. by Hootsuite for $60M in 2021)
1 ansBeau post Arnaud, je me suis reconnu dans les sections “fête tes victoires” et “hobbies”(malheureusement!). Félicitations pour vos 10 ans et vous êtes en bonne compagnie avec Vincent L. Godcharles, CPA chez Logient pour la suite !
Stratège principale chez Lg2 et Fondatrice chez iF créativité collaborative
1 ansMerci pour cet article empli de tes apprentissages. Avec un gros mouvement en vue, tu as su explorer et tirer les apprentissages de ces années investies. Rien est perdu, tout nous forme. Ce texte en est une belle illustration.