15 ans plus tard, le cancer on en fait quoi…quand sert ? Le cancer et tout ce qu’il m’a apporté.

Lorsque le cancer m’a été diagnostiquée en 2006, je venais d’avoir 39 ans. Dans mes rêves de femme, je voyais la quarantaine comme la décennie qui allait m’ouvrir toutes les portes…. Voilà qu’elle s’ouvrait par une maladie qui allait s’attaquer à un aspect essentiel de ma vie de femme et de maman, mon col de l’utérus.

Après plusieurs analyses, il a été décidé que j’aurais une chimiothérapie, une radiothérapie, une curiethérapie et enfin pour finir une ablation de l’utérus et des ovaires… programme réjouissant pour l’année de mes 40 ans.

Ce cancer fût une aventure à la découverte de moi, qui j’étais vraiment, à quoi je pouvais faire face, comment je rebondissais face à tout cela, comment je gérais l’ingérable, comment je lâchais prise par rapport à ce que je ne contrôlais en rien. Je me suis découverte forte, courageuse, patiente, fragile, démunie, triste mais profondément résiliente.

Une fois la rémission annoncée j’ai pensé que je pouvais laisser tout cela derrière moi, il n’en fût rien. Vivre avec un corps prématurément vieilli par la ménopause, avoir les cheveux gris, devoir réinventer ma vie intime, me reconnecter à ce corps blessé, la fatigue, l’impact cognitif, la gestion de la peur de la rechute, la perte de mon emploi… plein de défis dont je n’imaginais pas l’ampleur.

Il y avait surtout un grand besoin que tout cela serve à quelque chose, pas seulement à moi mais aussi aux autres patients. « Quand sert ? » J’ai pensé écrire un livre basé sur le blog écrit durant la maladie, j’ai voulu aider bénévolement et d’autres idées encore me sont venues mais rien ne venait vraiment mettre du sens dans ce projet et satisfaire ce besoin d’être utile et que cette expérience apporte à d’autres.

Bien des années plus tard, en 2012, j’ai entrepris une formation de coaching. Le premier jour nous étions tous dans la salle, en cercle, l’un après l’autre, les participants énonçaient leur projet et puis ce fût mon tour. La réponse a jailli spontanément, je veux être coach aider les personnes qui ont eu le cancer à retourner au travail !

Entretemps, j’ai fait un burnout, rien à avoir avec le cancer me direz vous …si tout à voir !

Lorsque je suis retournée travailler, j’ai eu à cœur de montrer que je n’étais pas une petite chose fragile et que j’étais aussi, si pas plus, capable que les autres de travailler et de faire des résultats. Le résultat …en 2016 fût à la hauteur des limites auxquelles j’ai poussé mon corps : retentissant.

Pas bienveillante pour deux sous avec moi-même, je me suis dit : mais enfin Andréa, après le cancer tu te promets de prendre soin de toi et voilà que tu es en burnout ! Cherchez l’erreur. L’erreur que j’ai commise c’est de penser que je pouvais tout reprendre comme avant dès le premier jour de mon retour au travail. Je n’ai pas fait de retour progressif, j’ai tout de suite été en 5 jours semaines dans une situation qui était très stressante au bureau.  Je n’ai pas écouté mon corps qui m’envoyait des messages clairs pour me dire de me poser, de lever le pied, de rompre ce cycle infernal de la performance que je m’imposais.

Le burnout m’a permis d’accepter que je ne sois plus la même qu’avant. Aujourd’hui, je le vois comme une étape riche d’enseignement tout comme le cancer. 

15 ans plus tard, je me suis réinventée professionnellement. En 2020, j’ai quitté le statut d’employée pour devenir indépendante et aujourd’hui beaucoup de mes activités tournent autour du cancer et cela pour mon plus grand bonheur.

J’ai enfin l’impression d’être à ma juste place.

Aujourd'hui j'ai à coeur d'aider ceux qui passent par la même épreuve que moi à trouver aussi leur juste place et à se connecter à toutes ses compétences développées pendant la maladie.

Physiquement, j’ai encore et toujours des effets secondaires de mes traitements. C’est parfois dur et lourd mais je me dis sans cesse que moi j’ai la chance d’être en vie et je bénis le ciel.

Je ne suis pas la femme de mes rêves…je suis mille fois mieux que cela : je suis VIVANTE et j’aime ma VIE. 

J’ai toujours peur quand j’ai des contrôles, je me fais toujours des scénarios catastrophes quand je suis dans des mauvais jours mais je suis connectée à tout cela et je l’accueille comme étant un moment dans ma ligne de temps parmi d’autres qui sont aussi faits de joie, de petits bonheurs et d’une immense gratitude.

J’avais envie de vous faire découvrir le monde d’après, celui de celle qui 16 ans plus tard est toujours là, plus ancrée que jamais dans sa réalité, qui chaque jour apprend à vivre avec ce nouveau corps, ce nouveau moi.

Le cancer m’a bien plus apporté qu’il ne m’a pris. Je me sens plus forte, plus résiliente, plus humaine et plus connectée à la vie et surtout tellement chanceuse d’être là. 

Il y a un "après", chacun en fait ce qu’il sait en faire en fonction de ce qu’il vit ou ressent. Mon après c’est une renaissance, une autre vie, un autre moi et plutôt que de regretter qui j’étais, je découvre tous les jours qui je suis devenue… et je ne suis pas déçue du voyage.