2017 : un tournant historique
Il y a quelques jours, le président de la Chine Xi Jinping, au forum de Davos 2017, s’est prononcé officiellement pour le libre-échange et la mondialisation. Cela m’a rappelé un épisode que j’ai vécu il y a exactement dix ans lorsque je donnais mon premier cours à l’université de Fudan à Shanghai. L’un des dirigeants chinois de l’EMBA m’avait interpellé au cours du dîner : « avez-vous bien compris ce que nous avons commencé à faire ? ». Comme je n’avais pas vraiment perçu l’enjeu de la question, je lui avais répondu de manière directe, comme un occidental : « non, je ne sais pas ». Et alors d’une voix tranquille, il m’avait confié : « nous allons vous coloniser ! N’ayez pas peur, il ne s’agit pas d’une colonisation militaire mais financière, nous allons racheter toutes vos entreprises ». Nous étions en 2007. Lorsque je suis rentré en Europe, puis en France, j’ai transmis l’information à tous les dirigeants que j’ai rencontrés. Je peux témoigner que la majorité d’entre eux n’a accordé aucun crédit à ce retour d’expérience, ils en ont même rigolé. Étant allé régulièrement en Chine tous les ans à partir de cette date, et travaillant chaque fois avec des dirigeants chinois, j’ai pu continuer quant à moi à mesurer la planification minutieuse de cette colonisation, toute structurée autour des principes de l’art de la guerre.
Voilà nous y sommes. À Davos, Xi Jinping a officiellement annoncé la colonisation financière de l’Occident par la Chine. Il va continuer à le faire, mais cette fois avec le support des États-Unis à travers la mise en place d’une double gouvernance mondiale sino-américaine qui aura pour objectif de rallier le Royaume Uni et la Russie à sa cause néolibérale. D’ailleurs, cela est en préparation depuis longtemps et est passé totalement inaperçu aux yeux des occidentaux. Au cours du mois de juillet 2014, les pays du BRIC ont créé une banque de développement ayant pour objectif de soutenir leurs projets de croissance. J’ai annoncé et dénoncé cette stratégie purement néolibérale au cours des Vèmes Assises nationales de la recherche stratégique qui se sont tenues en novembre 2014 à l’école militaire à Paris et dont j’avais en charge la synthèse des tables rondes : en voici la vidéo.
Nous voici donc, la France et l’Union européenne, confrontés à une très dure réalité opérationnelle. Ou bien nous avons l’agilité de définir et de mettre en œuvre un positionnement stratégique en rupture reposant sur nos valeurs humanistes, cela n’empêchant aucunement la performance économique ; ou bien nous allons devenir les esclaves de la Chine et des États-Unis. Ces derniers ont réussi à développer leurs propres réseaux d’influence à travers les GAFA et la Chine avec les BATX. 2017 constitue donc un tournant historique : ou bien nous redéfinissons notre leadership afin de retrouver une capacité d’influence différente dans un monde qui nous échappe ; ou bien nous allons perdre nos avantages compétitifs commerciaux, notre identité et notre code génétique. Même si je ne partage pas 100% de leurs analyses deux livres expriment, entre autres, parfaitement cette idée : Jacques Attali dans Le destin de l’Occident et le Comité Orwell dénonçant cette vague néolibérale fulgurante dans son collectif Le triomphe du soft totalitarisme.
Mon expérience de terrain me démontre chaque jour que très peu de nos dirigeants politiques français et européens ont intégré ces dimensions stratégiques pour nous proposer la vision d’un autre modèle de société cohérent avec nos valeurs. Autrement dit, qu’on se le dise très clairement, point de leaders à l’horizon pour nous guider et nous conduire vers une rupture porteuse de sens qui permettrait de développer nos propres outils d’influence, de défense et de conquête. Il est donc grand temps que nous passions à l’entrepreneurship. L’heure est venue pour nous, chacun où nous sommes, de prendre notre destin en main. C’est la nouvelle donne qui commence : 2017, bienvenue dans le meilleur des mondes.
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Former Head of Unit Maritime at European Defence Agency looking for opportunities
7 ansMerci Emmanuel, limpide comme toujours . "L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat" Sun Tzu.
Conseil en stratégie
7 ansMerci pour votre partage qui devrait réveiller notre inventivité, nos valeurs profondes, et j'espère un peu de combativité bien ordonnée
General Manager & Co-Partner chez Greenspot
7 ansEmmanuel TONIUTTI l'entrepreneurship, c'est une approche top down ou bottom up ? Excellent post qui me rappelle un module....