Achats publics et Performance économique

Une discussion avec une ancienne collègue (elle se reconnaitra) m’a incitée à partager avec vous cette réflexion : Est-il possible d’être acheteur public au Maroc et de raisonner « performance économique » ?

Pendant les quelques années où j’ai été confrontée au code des marchés publics, j’ai souvent entendu dire « attention, il faut respecter le code » « Attention, si l’IGF vient nous contrôler… », « Attention, la cour des comptes… », « l’article X du code des marchés publics ne permet pas la négociation », …. Dans la tête de la majorité des acheteurs publics : Achat public = conformité de l’achat avec le code des marchés publics.

Mais est-ce réellement sa seule fonction ? Est-ce qu’un acheteur public doit passer son temps à transformer des demandes d’achats en CPS puis en contrat ?

A mon sens, non !

L’optimisation des achats passe par plusieurs leviers. La négociation des prix en fait partie mais ce n’est pas le seul. En effet, plusieurs leviers permettent aux entreprises d’aboutir à des réductions de coûts beaucoup plus importantes que les fameuses 5% récoltées suite à la négociation.

Massifier, externaliser, utiliser des solutions de « pay per unit », de « Design to Cost » … Ces leviers et bien d’autres ne sont pas en contradiction avec le code des marchés publics et permettent à l’acheteur de sortir de sa paperasse quotidienne…

Des prérequis pour utiliser ces leviers ? Oui :

• Positionner l’acheteur au cœur de la définition des besoins avec les prescripteurs car une fois que le besoin est exprimé (et il est souvent urgent !), il est trop tard pour réfléchir au levier à appliquer ;
• Monter en compétences les acheteurs : en effet ceux-ci doivent être en mesure de discuter techniquement avec les fournisseurs et les prescripteurs ;
• Changer le mindset et accepter de voir les autres aspects de la fonction achats.

Tout acheteur (public ou pas) doit aussi avoir le reflexe permanent de se poser des questions sur ce qu’il achète :

• Est-ce que ce CDC répond à notre juste besoin ?
• Est-ce que cette stratégie achats est la plus adéquate pour réaliser cet achat ?
• Quelles solutions existent sur le marché ?
• Est-ce que ce CDC permet de capter les innovations des fournisseurs ?
• ...

Critiquer ce qu’on achète, explorer d’autres façons de voir la prestation ou le produit que nous achetons peuvent aboutir à des réductions coûts tout à fait étonnantes (en termes de TCO) …

En attendant une refonte totale du Code des marchés publics marocain, à l’instar de ce qui s’est passé en Europe, en Tunisie ou au Burkina Faso, l’Acheteur public marocain doit sortir de son rôle administratif et de garant des textes pour prendre une casquette de « Performance Manager » au service de la rationalisation des finances publiques, encore plus en cette période de crise sanitaire et économique.

Comment ?

Tout simplement en mettant en place une dynamique de questionnement permanent sur ce qu’on achète et en y intégrant les parties prenantes de cet achat : Prescripteurs, Fournisseurs, Qualité, …bref tout ceux qui peuvent apporter un plus à la réflexion (Il ne faut pas oublier que les meilleures idées viennent des personnes qui utilisent au quotidien le produit ou la prestation !)

Des démarches structurées telles que le Design/ Redesign to cost répondent parfaitement à cela. L’acheteur doit savoir être au cœur de cette dynamique et doit même leader tous ces débats (un rôle beaucoup plus valorisant, non !)

Les résultats de ces démarches sont garantis : les retours d’expérience le démontrent !