« Alors c’est donc ça être maman ? Mais non…ça ne peut pas être ça. Ce n’est pas possible. »
Ma tête après avoir passé 2h à bercer mon bébé... Elle s'est endormie quand je me suis mise à pleurer de fatigue.

« Alors c’est donc ça être maman ? Mais non…ça ne peut pas être ça. Ce n’est pas possible. »


Que j’ai détesté tout ces parents qui te disent que c’est « que du bonheur » d’avoir un bébé.

Que je les ai détesté de m’avoir dit avec le sourire « bon oui, tu verras parfois ça peut être dur. » 

Que j’ai détesté toutes ces femmes qui m’ont dit « tout se révèlera à toi lorsque tu tiendras ton bébé dans tes bras pour la première fois. » 

Je n’ai pas compris pourquoi. Pourquoi on ne m’a pas prévenu à quel point la maternité pouvait être difficile. Il y a bien 2/3 retours sur les nuits qui ne sont plus des nuits. Mais est-ce bien là le partage le plus important qu’on puisse faire au sujet de devenir parents ? 


Alors que la grossesse a été une incroyable bulle d’amour pour moi, cela ne pouvait être que la même chose à la seconde où je rencontrerai mon bébé, pas vrai ? « Tu semblais si épanouie enceinte Nolwenn. Je n’aurais pas pensé que devenir maman t’aurait autant chamboulé. » 


J’aurais aimé avoir des retours sans langue de bois. Sans filtre. Je n’ai eu que des confessions à demi-mots. Cela m’importe peu d’en connaître la raison (entretenir l’image de la maman parfaite ? protéger l’insouciance jusqu’au dernier moment ? déni de ses propres émotions ?..) Alors voici mon retour, honnête et sans peur d’être jugée. Ma façon à moi d’avoir vécu les premiers mois en tant que maman.

Ecrire ces mots et les dévoiler ici n’est pas simple mais je suis convaincue que c’est en partageant nos ressentis, en se livrant de façon la plus sincère possible que nous pouvons construire une société plus forte et bienveillante. Car oui, les deux sont compatibles !


Passée la magie des premières heures de LA rencontre (car oui, elle fut incroyablement magique pour moi), j’ai eu envie de rendre mon bébé aux sages-femmes. Leur dire « Ok d’accord. J’ai compris à peu près ce que c’était d’être maman. J’ai comme l’impression que c’est hyper dur. Du coup, je vous le rends et je reviens dans quelques années, quand je serai vraiment prête. Car là non, finalement je ne le suis pas. Désolée, je me suis trompée. » 


Après 18h de travail dont 12 sans péridurale, 3 jours en n’ayant dormi environ que 2h par nuit, mon premier réflexe a été de…checker mes mails et rédiger des to do-list de choses à faire pour le boulot. J’étais encore à la maternité et mes premiers pas hors de ma chambre m’ont amené au RDC où, debout (la douleur ne me permettait pas de m’asseoir), je me suis mise à faire des messages vocaux sur Whatsapp qui parlaient boulot.

La fatigue était telle qu’elle m’a empêchée d’articuler correctement mes phrases. Si phrases il y avait ? Car si tôt les mots prononcés, si tôt oubliés. « Qu’est-ce que je disais déjà ? ».

Qu’importe. J’en avais besoin. J’avais besoin de voir que tout mon monde n’avait pas changé. 

J’ai passé les premières semaines à chercher les choses qui n’ont pas changé. « Ouf il y a encore des gens dehors. Ouf, c’est bon, mon salon n’est pas encore envahi de jouets de bébé. Ouf, je peux encore garder mes plantes. Ouf, mes habits de ma vie d’avant sont encore dans mon armoire. Ouf, je reçois encore des mails de clients. Ouf je peux encore manger ce qui me fait plaisir. Ouf, je peux encore prendre des douches. » 

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Et puis j’ai eu honte. Honte parce que ça ne pouvait pas être normal de passer mon bébé au papa dès les premiers pleurs « tiens je te la passe. Je vais dormir. ». Ça ne pouvait pas être normal d’aller dormir dans la pièce d’à côté et d’ouvrir les fenêtres pour entendre le bruit des voitures qui camouflent à merveille les pleurs de bébé. « Que ces bruits de moteurs sont mélodieux. Que je les aime. »


Honte d’avoir peur de changer sa couche. « Non je n’y arriverai pas. Ca m’a l’air trop compliqué, je vais mal le faire c’est sur. Fais-le toi. »

Honte d’avoir pleuré de douleur quand je la mettais au sein, toutes les heures. « Mais non Nolwenn. L’allaitement c’est quelque chose de naturel. Ça ne peut pas être douloureux. Tu es une mammifère. N’importe quelle mammifère nourrit son petit sans aucun soucis et sans aide. C’est quoi ton problème ? » 

Honte d’avoir pleuré de tristesse devant mes beaux-parents qui venaient rencontrer la petite à l’appart pour la première fois. « Mais pourquoi je n’arrive pas à ravaler ces foutues larmes ? Tu es en train de gâcher un beau moment. » 

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Et puis j’ai eu peur. Peur de la sortir en poussette. « Et si elle pleure, qu’est-ce que je fais ? Les gens vont mal me regarder. » 

Peur de moi-même : « Ecoute je ne peux pas être maman. Ce n’est pas possible. Les jours sont les nuits. Les nuits sont les jours. En fait, depuis le 27 janvier il n’y a qu’une seule journée qui s’étire à l’infini. Ça ne s’arrêtera jamais. » 


Peur de ne pas comprendre « Mais comment font les gens ? Mais comment peut-on avoir plusieurs enfants ? Il y a forcément quelque chose qui doit être bien. Je passe à côté, c’est sur. Cherche bien, Nolwenn. Fais un effort bordel. On te dit que c’est un bonheur absolu ! On t’ordonne de profiter de chaque instant car le temps passe si vite. C’est bien que tu loupes le coche là, ouvre les yeux ! Tu es nulle de ne pas profiter de ta chance. »


Il fallait que j’aille chercher de l’aide. Il fallait que j’aille parler à un maximum de mamans. À commencer par la mienne. Je devais dire à toutes ces femmes qu’elles sont des héroïnes.

« Parce que moi, tu vois, je n’y arrive pas aussi bien que toi. » 

Et puis j’ai parlé de tout ce que je vous écris là, à coeur ouvert, les larmes aux coins des yeux. Et j’ai compris. Compris que personne n’y arrive. Que nous sommes toutes pareilles. Que c’était normal de croire que ce n’était pas normal. Une maman m'a dit « C’est vrai, Nolwenn. On nous dit souvent que c’est que du bonheur d’être parent, même s’il y a des moments difficiles. Alors qu’on devrait commencer cette phrase par la fin : Ca va être très difficile, mais tu vas voir qu’au final c’est aussi un immense bonheur. » 

Je suis maintenant maman depuis 3 mois et demi.

J’ai survécu au mois le plus difficile de ma vie. Celui qui te fait comprendre que désormais tu n’es plus la seule au centre de ton monde. Celui qui te fait changer de dimension. Je ne crois pas qu’il existe un bouleversement aussi dingue que celui-ci. 

Je ne dors toujours que très peu. Je fais moins de choses qu’avant. J’ai abandonné une partie de ma liberté que j’aime tant. Mais maintenant cela me va. Parce que je découvre chaque jour une facette du nouveau monde qui se dessine à mesure que mon bébé s’éveille. 

J’ai réussi à laisser partir cette image de la maman parfaite. Elle n’existe pas et n’existera jamais. 

J’ai aussi compris que si les parents ne m’ont pas prévenu, c’est parce qu’ils ont oublié. C’est vrai que le temps passe vite. Et je sens déjà que les difficultés du début commencent à se diluer. 


Mais je ne veux pas oublier à quel point j’ai pu me sentir seule avec mon bébé dans les bras, alors même que j’étais très entourée. Ce paradoxe immense entre la joie et la tristesse.


J’aimerais que l’on cesse de véhiculer l’image de cette femme qui donne l’impression qu’elle a toujours su être maman avant même d’avoir un enfant. 

Et chaque maman à sa part de responsabilité dans la diffusion de cette image.


Osons répondre aux gens qui nous demandent « Alors ? Comment ça se passe ces premiers mois avec bébé ? » que : « Honnêtement ? Pu**** que c’est dur, j’en chie grave si tu savais ! » 

Mélanie BARTHE

Responsable Satisfaction Client chez XPO Logistics Europe

4 ans

Félicitations Nolween, eh oui malheureusement c est très dur par moment( j ai une petite de 7 mois) je ne sais pas pour toi mais habitant loin de la famille et personne a proximité je te laisse imaginer ce qu a pu etre notre confinement. J ai été bien contente quand j ai pu laisser bébé a nouveau a la nounou pour soufflet un peu. Il ne faut pas hésiter a demander de l aide quand tu ne peux plus et si tu as de la famille a côté c est encore mieux histoire de pouvoir lâcher prise une nuit ou 2. Courage a toi ces moments sont tout de même merveilleux il faut en profiter sa grandi tellement vite. Gros bisous a vous.

Aletheia D.

Design & Product Operations @ Zapier — Building helpful things to amplify and superpower the work of those who build

4 ans

Quel courage Nolwenn Nasri 👋, merci d’avoir partagé cette expérience avec nous

Célia Aubry

Product Designer • Freelance

4 ans

Ah ce mythe... J'ai vu une copine ce week-end qui m'a remercié de lui avoir "dit les choses" (j'avais accouché 9 mois avant elle). Ça m'a beaucoup touchée car j'étais apparement la seule et surement pas la plus proche de ses amies. On vit tous ce changement différemment mais c'est bien de savoir que tout n'est pas totalement rose pour les autres non plus.

Cécile LEFEVRE

Gestionnaire de parc automobile

4 ans

Un grand bravo pour ce partage de tes émotions qui n'a pas dû être évident ! 👏 J'aime l'idée d'une société plus forte et bienveillante grâce à des témoignages comme le tien 😊

Jérémy SIMON

Conseiller Energie "France Renov"

4 ans

Tres beau partage merci ! Les injonctions à la perfection sont insupportables. Et certainement beaucoup plus sur ce sujet que pour les hommes (nous, en tout cas moi, la fuite facile sur ces sujets...et l'alibi social du travail par exemple...et je ne crois pas avoir été le pire soutien quand je regarde autour de moi, ni le meilleur ). Courage encore quelques décennies à tenir ;)

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