Animer une classe virtuelle, un exercice qui ne s’improvise pas....

« Joue au projectionniste de slides, je ne me rappellerai de rien, suscite mon intérêt, je m'en souviendrai peut être, fais-moi vivre l'évènement, je ne l'oublierai jamais. » (Thierry LAFFONT)

Utilisée dans des dispositifs de formation elearning, la classe virtuelle réunit à distance des apprenants et un animateur dans des lieux différents, sur une durée définie, de façon synchrone. 

Même si on l’assimile à une classe traditionnelle, ce qui distingue cette modalité d’apprentissage de la classe traditionnelle, c’est justement le terme “à distance”. Au premier abord, l’enjeu consiste à recréer les conditions du présentiel. 

Si l’ennui gagne du terrain, l’animateur rencontrera les plus grandes difficultés à remobiliser l’attention de son auditoire. La réussite de la classe virtuelle relève donc de la posture de l’animateur. Il se positionne non pas “comme celui qui sait et qui va vous apprendre” mais comme celui qui “va vous aider à apprendre par vous-même et à construire les savoirs”. 

Parce que j’ai vécu l’expérience des classes virtuelles des deux côtés du miroir, je me suis interrogée sur les bonnes pratiques de la classe virtuelle.

En Amont….

Organisez la classe virtuelle en fonction de votre approche pédagogique

Imaginons que vous optiez pour la classe inversée, vous prévoirez une mise à disposition préalable de vos ressources en relation avec le thème abordé lors de la classe et ce pour permettre la phase d’exploration. 

La classe virtuelle aura alors pour objectif de passer à la phase d’intégration. 

Avec une mise à disposition de ressources complémentaires à l’issue de la classe virtuelle, l’apprenant passera à la phase d’enrichissement.

Déterminez la durée de votre classe virtuelle 

Le temps vous est compté : ni trop long, ni trop court. 

Au delà de 90 minutes, la concentration des participants décroît de manière exponentielle et ce d’autant que les efforts d’assiduité sont beaucoup plus importants à distance.

En deçà d’une heure, la durée est insuffisante pour créer une synergie et une ambiance de groupe propice à l’apprentissage.

Concevez le déroulé de votre classe virtuelle 

C’est comme au restaurant : vous aimez savoir ce que vous allez manger… Pour ouvrir l’appétit de vos convives, vous soignerez votre menu.

L’invitation est une première étape pour inscrire les participants dans la posture d’apprenant : modalités de connexion, objectif pédagogique, programme.

C'est aussi l’occasion de prodiguer quelques conseils et encouragements ou de rappeler que des ressources sont à découvrir…

Maîtrisez l’outil de la classe virtuelle 

Se familiariser avec l’outil de CV est primordial pour plusieurs raisons :

• évaluer le potentiel de l’outil, 
• maîtriser les outils de gestion de la CV, 
• s’approprier les différents outils d’animation et réfléchir aux différentes manières de les utiliser,
• former les apprenants aux fonctionnalités mises à leur disposition.

Une bonne appropriation de l’outil dispense l’animateur d’un stress supplémentaire lors de l’animation de la CV et contribue à sa légitimité et à l’adhésion de son public. N’oublions pas que le formateur reste malgré tout celui qui sait !

Dressez votre feuille de route

Le formateur formalise : 

• l’objectif pédagogique de la CV en respectant les critères SMART : Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini
• la méthode pédagogique utilisée pendant la CV
• le contenu,
• les activités
• le type de supports

Quelque soit la méthode pédagogique choisie, le challenge pendant la classe virtuelle consiste à inverser le processus. En fin de classe, ce n’est plus le formateur qui est au centre mais les apprenants. Ce sont eux qui mènent les débats par la réflexion, l’interrogation, l’expression orale, l’exposé des activités d’apprentissage. 

Le formateur n'est là plus que pour répondre aux sollicitations, réajuster et lancer de nouvelles pistes de réflexions. 

A ce moment, il est devenu animateur d’un processus d’émergence, de construction de sens…

Atteindre cet objectif est plus aléatoire avec certaines méthodes. La méthode magistrale tend à installer les participants dans la passivité. A contrario, par un questionnement en entonnoir, le formateur amène le groupe à construire le contenu, c’est à dire à faire émerger les savoirs du groupe pour ensuite les compléter . Toutefois, pour pouvoir guider le groupe, un canevas de la séance sera préalablement défini à savoir l’ensemble des points abordés, les techniques d’animation , le temps consacré, ....

Concevez votre support d’animation comme un fil d’ariane

Le support permet aux participants de suivre la formation, maintenir leur attention et s’approprier les contenus.

Pour être efficace, l’élaboration du support d’animation répond à certaines règles : 

• Définir l’objectif du support visuel : est-il destiné uniquement à être projeté lors de la CV ou à être transmis ?
• Définir une ligne graphique cohérente et identique pour tout le support et une homogénéité des diapositives entre elles
• Aborder un seul thème par diapo, chacune des diapo comportant 3 à 4 points, 6 à 8 mots par point
• Choisir des titres courts et évocateurs pour chaque diapo
• Utiliser des représentations visuelles pour illustrer les propos.
• Adjoindre aux diapo des animations sans toutefois en abuser. 
• et la règle d’or : garder à l’esprit que le support visuel n’est qu’un outil d’animation.

Pendant….

L’entrée en scène conditionne l’idée que les apprenants vont se faire du formateur et influence leur perception du déroulement de la séquence.

Pour s’assurer l’adhésion de son public, le formateur garde à l’esprit tout au long de son intervention qu’il doit sécuriser les participants, les rendre acteur, les valoriser et les impliquer.

Oui mais comment ?….

L’entrée en classe

Avant le début de la classe de la classe virtuelle , le formateur organise l’espace de travail : il installe les outils et supports utilisés pendant la CV .

Comme en présentiel, cette préparation vise à créer un environnement propice à l’apprentissage.

Lorsque la porte la classe s’ouvre, l’animateur 

• accueille les participants au fur et à mesure de leur connexion,
• intègre chacun d’entre eux par une phase de présentation,
• Invite les participants à tester leur matériel et les aider à résoudre les questions techniques…, 
• les forme à l’utilisation des outils de communication 
• aux règles du dialogue : “je parle : j’ouvre mon micro, j’écoute : je coupe mon micro, je souhaite prendre la parole : j’active une emoticon...”

La préparation de la salle et l’accueil visent à satisfaire le 2ème niveau de la pyramide de Maslow : la sécurité 

Le formateur, gestionnaire des interactions 

Comme pour l’animation d’une émission de radio, c’est le formateur qui porte le dynamisme de la formation (Par exemple, une voix monocorde sera rédhibitoire….. ) Il rythme la séquence, lance les activités, vérifie que tout le monde suit, adapte en permanence son scénario aux réactions du groupe. 

Ce qui nous amène à sa fonction de gestionnaire des interactions 

En effet, le formateur veille à la répartition du temps de parole entre les participants mais également à l'engagement de chacun d'entre eux.

Au même titre qu’en présentiel, il est intéressant d’identifier les raisons pour lesquelles un apprenant reste en retrait. Si l’on s’en tient à la typologie de Vivian GLICKMAN, un apprenant en retrait est-il un marginal, un désarmé ou un hésitant ? Une fois le profil identifié, quelle attitude adopter ?.… .

L'entrée en matière

L’introduction répond à trois questions : pourquoi moi, pourquoi ce sujet et pourquoi vous ? S’ensuivront l’annonce du thème, la présentation de l’objectif pédagogique mais également de la méthode pédagogique utilisée ainsi que l'annonce de l’organisation. 

Développer

Durant la phase de développement, le formateur multiplie les interactions par des questionnements par étape en diversifiant les types de question : questions ouvertes, questions fermées, questions à choix multiples…

Le formateur : 

• écoute, 
• rebondit sur d’autres questionnements toujours en assurant le lien entre ce que les apprenants disent et la progression prévue.
• reformule les réponses de manière concise ou explicite.

Cette étape est propice à la confrontation de points de vue.

Sur le plan matériel, il utilise le tableau blanc pour noter les points clefs et ainsi pour compléter la mémorisation auditive.

Conclure pour « refermer ce qui a été ouvert »

Cette étape est marquée par une synthèse réalisée par le formateur.

Il rythme son discours au moyen du support visuel et des outils à sa disposition : pointeur, surligneur ou dessin de la classe virtuelle.

Ce mode opératoire contribue ainsi à l’appropriation des points clés de la formation par les participants en leur permettant de visualiser, de mémoriser, de clarifier.

En Conclusion… le rôle de l’animateur consiste à aider les participants à apprendre par eux même et à construire leurs savoirs mais sans faire plus de 50% du chemin … 

Le formateur alterne les rôles : tantôt présentateur de supports, tantôt facilitateur dans le groupe, tantôt animateur des activités … Tout en surveillant le niveau de participation des apprenants.

Toutefois, pour être efficace, une classe doit s’inscrire dans un processus à double sens, c’est à dire 

• d’une part, le formateur n’est pas simplement là pour déverser son savoir mais il s’inscrit comme un animateur des apprentissages. Il va donc déployer des stratégies tendant à impliquer son auditoire.
• d’autre part, l’auditoire adopte une posture active voir proactive en s’impliquant dans son processus d’apprentissage, c’est à dire dans les trois phases : acquisition, rétention et transfert.

La contribution du formateur sera déterminante pour créer un environnement propice à l’apprentissage et investir tous les plans que ce soit cognitif, méta-cognitif, motivationnel, socio-motivationnel ou socio-cognitif.

Toutefois, comme dans tous domaines, tout est question de modération. L’animateur adoptera la bonne distance en développant une attitude d’empathie bienveillante.

Pour tout expert qui se prêtera au jeu de la formation en classe virtuelle, pour rendre accessible son savoir à son auditoire, c’est une posture et un état d’esprit qu’il devra acquérir. 

Christine GUEGAN