Antarctic Explorer - 7/12/19 - Base de Carlini

Antarctic Explorer - 7/12/19 - Base de Carlini

Première base atteinte après 3 jours de navigation. Temps maussade mais rien de dramatique. Après les quelques growlers rencontrés autour de Elephant Island, la mer est totalement libre.

Je dois assurer 9 heures de watch dans la journée, dont entre minuit et 3h du matin avec Eric et Duarte. Malgré la magie d’une nuit polaire, le froid nous cueille brutalement sur le fly deck plein de courants d’air. Nous prenons la relève de l’équipe précédente. Nos yeux sont braqués sur la mer pour prévenir le moindre bloc de glace à la dérive et les 3h passent avec une lenteur réfrigérante ... Quelques icebergs vaquent à leurs occupations … Taches blanches fluorescentes qui nous accompagnent au fil des courants sous-marins et des vents, lueurs d’espoir au coeur de la nuit … Soudain l’ombre d’une terre apparait, quelques pics sombres hachent l’horizon, notre regard peut s’échapper de la masse monstrueuse qui gronde sous la coque du bateau pour se concentrer sur notre prochaine destination, l’île du Roi George. Mon quart s’achève enfin. Je pars me coucher sans demander mon reste et plonge sous ma couette avec volupté.

Arrivée le matin sur la base de Carlini. Les propriétaires du bateau (Argentins), en terrain familier, préparent un débarquement imminent et très officiel. La mer est calme et le trajet sur la côte en dinghy, se fait sans encombre. Le chef de base nous salut et m’accueille avec le respect particulier du à mon statut d’ancien leader de la base de Dumont d’Urville. Lorsque certains apprennent que j’ai traversée le continent à ski en solitaire, les regards s'aiguisent, l’émoi est à son comble et les selfies de rigueur !!!

Nous commençons par visiter le laboratoire dédié aux scientifiques, notre interlocuteur parle parfaitement l’anglais. Hélène rencontre Lucas Martinez micro biologiste et Maximiliano qui travaille sur le plancton. Lucas est chargé de la restauration des sols contaminés par les hydrocarbures qui proviennent des fuites qui ont eu lieu sur la base, dont la source d’énergie est totalement assurée par l’utilisation du carburant. Des membranes noires sont étalées sur le sol. Enrichies en nutriments, elles servent de support pour une communauté bactérienne et de cette manière, démarre un travail de restauration. Ces membranes absorbent les rayons solaires et produisent ainsi de la chaleur qui stimule l’activité métabolique bactérienne et donc accélère la restauration. Par capillarité, les hydrocarbures remontent du sol. Les éléphants de mer attirés par la chaleur des membranes, s’étalent langoureusement dessus et par leur propre chaleur, accentuent encore le phénomène de bio-décontamination. Nous rencontrons également Mariana, physiologiste des lions de mer. Elle étudie leurs déjections pour chercher une éventuelle contamination par des métaux lourds. Malheureusement, nous n’avons pu nous procurer un échantillon de cette matière, qui lui semble si précieuse !! 4 femmes présentes sur la base étudient l’effet du recul du glacier dans la baie de Potter Cove, sur la communauté des macro algues. Hélène est intéressée plus particulièrement par la présence de l’algue dénommée ulva intestinalis, seule espèce invasive mentionnée pour la zone antarctique. Après avoir étudié d’un point de vue génétique et philogéographique la diversité des algues rouges en antarctique, elle s’intéresse aux mécanismes de dispersion et d’adaptation qui permet l’arrivée et l’installation d’une espèce d’algue invasive (ulva intestinalis). Personne pour l’instant n’a centré ses recherches sur la compréhension de ce phénomène. Elle compte utiliser ses compétences en taxonomie et en génétique pour réaliser sa thèse sur le sujet.

Nous terminons la visite de la base au réfectoire par un calumet de la paix (café ou maté …) et un petit cocktail à base de saucisson et de jambon. La chaleur du lieu et de ses habitants est intense. Moment de convivialité international dont nous apprécions chacun des instants. Nous offrons une bouteille de vin Lurton devant le drapeau de la base et décidons de partir en proposant une visite guidée de notre voilier, dont le succès va vite dépasser l’espérance de nos hôtes. Toute la base défilera à grand renfort de bières et de pizza cuisinés par Eugenio. Les derniers nous quitteront tard dans la soirée, après la promesse du fameux assado argentins pour le déjeuner du lendemain...

Alain NEGRE

Technicien sénior Géomètre-Topographe

5 ans

Merci pour ces belles photos

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