Business schools: pourquoi l'EMLYON est placée sous surveillance Par Kira Mitrofanoff Publié le 21.07.2020 - Challenges
Une journaliste de Challenges livre une peinture au vitriol de l’EMLYON à quelques jours du choix des étudiants de prépa…
Comme l’écrit (en réponse) un collectif d’étudiants de l’EMLYON, « Depuis plusieurs mois, notre école, EMLYONBusiness School, est la cible d’attaques répétées et injustifiées de la part du magazine Challenges, par la publication d’articles dont la partialité et la malhonnêteté intellectuelle remettent en cause les valeurs de pluralisme et d’indépendance pourtant défendues par cet hebdomadaire. En l’espace de seulement 10 mois, ce ne sont en effet pas moins de 4 articles à charge contre EMLYON qui ont été publiés. »
Dans l’univers si feutré et si consensuel des écoles de commerce, le côté « cash » de l’article est un tsunami…
D'habitude, les directeurs « démissionnent » car ils/elles ont d’autres projets personnels ou ils/elles « s’interrogent sur leurs valeurs » ou ils/elles arrivent à la fin de leur mandat…. Mais jamais aucun n’est décrit comme narcissique et/ou incompétent voire mégalomane…
La journaliste de Challenges n’hésite pas à décrire un directeur narcissique, un prédécesseur qui aurait mis en place un business plan « suicidaire » et une ambiance digne d’OK Corral au sein de l’équipe de direction…
En fait, pour ceux qui connaissent l’univers des écoles de commerce, la situation décrite n’est pas spécifique à l’EMLYON et n’a rien d’exceptionnelle dans certaines organisations qui ont perdu leur taille humaine: des personnalités dysfonctionnelles arrivant à se hisser au niveau du comité de direction, un directeur qui a «perdu le fil de sa stratégie» (encore que là on comprend qu’il y a eu une stratégie…) alors que d’autres mandatent des consultants pour la définir, ou définissent des objectifs en oubliant les moyens pour les atteindre… Les problématiques organisationnelles…
De même que l’école « placée sous surveillance » de la CEFDG est une expression subjective pour signifier que l’école voit la durée de son autorisation à délivrer le grade de Master ramené à 3 ans au lieu de 5 ans – c’est certes vexant, mais ce n’est pas une «infamie» – il y a quelques années (2014) Kedge BS et Neoma BS avaient connu pareille mésaventure, suite à leurs fusions respectives : l’une avait vu son autorisation renouvelée pour 3 ans et l’autre 4 ans, au lieu de 5 également.
https://www.letudiant.fr/educpros/actualite/grade-de-master-durees-reduites-pour-kedge-et-neoma.html
On ne parlait pas pour Kedge BS « de mauvais signal », mais « d’une certaine fragilité de la gouvernance exécutive »…
Or, la situation de l’EMLYON est aussi due à un changement radical de gouvernance avec l’ouverture du capital à des fonds de pension. Et c’est sans doute là le péché de l’EMLYON qui lui vaut les foudres de la journaliste de Challenges et à travers elle, celles de la CGE : "Je suis scandalisée, affirmait en mars Alice Guilhon, la directrice de Skema. Notre mission d'éducation est incompatible avec la rentabilité exigée par les fonds."
De quelle rentabilité parle-t-on vraiment, quand les fonds s’appellent la BPI et la Caisse des dépôts? Nous ne sommes pas là en face de Blackrock ou Amber Capital….
Par ailleurs toutes les écoles ont besoin d’augmenter leur rentabilité pour répondre à des besoins de financement croissants… Un fonds répond à ce besoin de financement en échange d’une rémunération – qu’y-a-t-il de si choquant si l’école est bien gérée ?
Pour contrebalancer le pouvoir des fonds, le moment est peut-être aussi venu d’ouvrir le capital des écoles à leurs « stakeholders » : enseignants, personnels administratifs, alumni…
Je laisse la conclusion aux étudiants de l’EMLYON : « Vous ne mentionnez pas non plus l’ouverture prochaine du capital aux alumni et au personnel de l’école. Surtout, la transformation du modèle d’emlyon — au-delà d’être l’une des solutions possibles face à la baisse des subventions des chambres de commerce qui met l’ensemble des business schools dans une situation extrêmement délicate — donne une capacité d’investissement que peu d’écoles ont à ce jour. »