Cannabis : Bruno Retailleau, constant dans l’erreur ?
Je ne sais plus quel écrivain affirmait : « Si la cause est bonne, c'est de la persévérance. Si la cause est mauvaise, c'est de l'obstination ».
On ne saurait évidemment prétendre que la lutte contre le narcotrafic est une mauvaise cause mais il est certain que, compte tenu des résultats obtenus par la politique du tout répressif en direction des consommateurs, il est peut-être temps de s’interroger sur son efficacité.
Apparemment, ce n’est pas cette direction que notre très martial ministre de l’intérieur a choisie. Bruno Retailleau, c’est plutôt du Gérald Darmanin en réalité augmentée...
Alors que l’on prétend, Place Beauvau, que « les fumeurs de marijuana ont du sang sur les mains » ou, comme le recommande un député un peu allumé de l’ex-majorité présidentielle, qu’il s’agit désormais « d’envoyer l’armée nettoyer les points de deal », les législations sur le cannabis s’assouplissent à travers le monde.
Rejoignant l’Uruguay, le Canada et 19 des 50 Etats d’Amérique, l’Allemagne est aussi le troisième pays membre de l’UE à avoir légalisé cette année le cannabis récréatif (après Malte et le Luxembourg).
Si cette approche est loin d’avoir réglé comme par enchantement tous les problèmes, notamment du niveau de consommation, elle a en revanche permis d’assécher une grande part du trafic, celui-là même qui gangrène nos cités et gagne désormais à vitesse grand V les villes moyennes.
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Un avis du Conseil économique, social et environnemental, rendu en 2023, préconisait une refonte totale de la législation, recommandant d’en abandonner l’aspect répressif dominant. Pile poil un an après un rapport de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale allant dans le même sens.
En France, 45% des plus de 15 ans ont déjà consommé du cannabis, contre 27% dans l’ensemble de l’UE et, sur l’ensemble des infractions constatées pour usage de stupéfiants, 90% concernent le cannabis.
Les contempteurs de la légalisation contrôlée de la vente de cannabis arguent que le trafic de cocaïne continuerait alors à croître et prospérer, ce qui est parfaitement exact. Mais aujourd’hui, on compte 600 000 consommateurs réguliers de coke contre 5 millions de fumeurs de cannabis et une poignée d’amateurs de chemsex à base de 3-MMC...
Comme on dit dans les salons et les PMU, il n’y a pas photo : le chiffre d’affaires du trafic de drogue est estimé à 3 milliards d’euros, soit 0,1% du PIB. Le cannabis représente 40% du total.
Jacques DRAUSSIN