Ce que nous apprend le recours à l’avis du "peuple"...
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Ce que nous apprend le recours à l’avis du "peuple"...

Que pensent les Monégasques, quelles sont leurs attentes ? Si jusqu’à hier on l’ignorait, maintenant nous l’avons appris, grâce a la grande consultation populaire commissionnée par le Conseil national, dont les résultats ont été présentés en grand pompe lors d’une soirée au Grimaldi Forum, dans une salle comble de Monégasques, impatients de connaître les opinions de leurs concitoyens. Non, ce n’était pas une réunion de campagne électorale, car les mêmes Monégasques ont déjà voté – il y a moins de deux ans – pour un programme électoral et leurs représentants au Conseil national, même s’ils n’ont pas pu les choisir… Ce n’était pas - non plus - un sondage, basé sur un échantillon représentatif de l’entière population. Ni un referendum sur une question bien précise, qui aurait besoin d’un quorum pour être validé et qui en tout cas à Monaco n’est pas prévu par la Constitution. Et pourtant, nous avons appris que dans ce qu’on appelle une consultation, si une personne sur dix répond au moins à une des questions, c’est un succès. S’ils sont presque un et demi sur dix, alors on peut porter un toast ! Si l’on parvient à atteindre le chiffre hyperbolique de presque quatre sur dix, bigre :  un feu d’artifice est de rigueur. Si ces personnes ne représentent quasiment qu’elles-mêmes, peu importe. A l’instar des célèbres « likes » des réseaux sociaux, ce qui compte vraiment c’est seulement la quantité, même si modeste, et non pas la qualité…

Mais au-delà de la valeur intrinsèque qu’on veut tout de même attribuer aux résultats de cette consultation, quand on passe à les évaluer tels qu’ils sont, il n’y a pas globalement de grosses surprises. Néanmoins, on découvre que ces presque quatre Monégasques sur dix se sentent heureux, plus que les Néerlandais, mais moins que ce que les autres concitoyens pensent. Que leur travail les satisfait, qu’ils sont bien considérés, mais moins que les mêmes Néerlandais et encore moins que des Mexicains et des Thaïlandais… Mais ils se sentent beaucoup moins bien rémunérés qu’au Pays-Bas (encore une fois !), et surtout qu’en Inde, le pays les plus peuplé et toujours parmi les plus pauvres de la planète. La préoccupation majeure de ces quatre à peine est la qualité de vie, où l’on amalgame problèmes de circulation, environnement et nuisances sonores. Ils sont favorables à interdire ou limiter la circulation mais seulement pour les autres. Quant au centre commercial, deux sur quatre environ se contenteraient d’une rénovation ou d’un aménagement limité, les autres deux optent pour une véritable restructuration. En majorité, pour eux la priorité nationale est bien respectée et le logement domanial n’est pas non plus une priorité, soucieux surtout des prix des loyers et des critères d’attribution. Plus des trois quarts (anonymes) se déclarent en faveur de l’avortement, un peu moins apprécient globalement le travail du Conseil national, promoteur de cette consultation. Grands absents, les relations avec l’UE notamment et internationales ou de proximité en général, complètement disparues des radars et, surtout, le gouvernement…

Car c’est justement ce dernier le « Convive oublié » dans cette consultation : consciemment ignoré dans le questionnaire, mais toujours présent en coulisses comme le vrai et unique destinataire de cette initiative. Si aucun des souhaits exprimés par ceux qui ont répondu au questionnaire ne peut être satisfait sans l’accord de la majorité des élus, le contraire est vrai aussi. Aucune loi ne peut être approuvée sans le consensus du gouvernement, auquel - selon la Constitution – appartient, autre que le pouvoir législatif, en commun avec le CN - aussi et surtout et à titre exclusif - le pouvoir exécutif. Ainsi, à la veille des séances budgétaires du primitif, les élus ont voulu avoir recours à une ultérieure légitimation populaire pour faire pression sur le gouvernement et obtenir que soient tenues les promesses non tenues par l’ancien Ministre d’Etat et renouvelées par l’actuel chef du gouvernement. Vox populi, vox dei, scandaient les Latins... Ainsi le Conseil national, s’appuyant sur le consensus populaire issu de cette consultation, essaie de dicter l’agenda du gouvernement, en complément, ou parfois même en opposition à la feuille de route qui lui a été confiée par le Prince souverain… Réussira-t-il à atteindre ce qui semble le véritable objectif de cette initiative, qu’on n’oserait pas qualifier de populiste (pour ne pas heurter les sensibilités), même si elle en a toute l’apparence ? Sans aucun doute la réponse – nous en sommes convaincus - ne tardera pas.

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