Commentaires du 27 sept 2022

[Rappel : Cette rubrique fonctionne sur une base simple ; elle reprend des commentaires que j’ai pu faire de « commentaires » proposés par mes étudiant. e. s à l’occasion de différents travaux en cours de formation.]


Extrait 1 —> L’exigence d’objectivité du Parent-administrateur…

« Le positionnement de certains parents administrateurs m’a beaucoup questionné. En effet, cette fonction bénévole doit permettre d’améliorer l’accompagnement et le quotidien de l’ensemble des personnes accueillies. Même si nous savons que chacun s’investit avant tout pour des raisons personnelles, il faut tendre vers la plus grande objectivité possible. » 

RB -> Cela pose la question d’une définition de ce que serait l’« objectivité » dont vous parlez ? Qui en sera juge et selon quelle critériologie ? C’est devant cette difficulté « objective » à poser une définition de cette « objectivité » qu’il faut plutôt veiller à mettre en place un fonctionnement institutionnel, capable de traiter les dilemmes, conflits, qui ne manqueront pas d’apparaître. Le parent-administrateur a « sa » légitimité à vouloir le « bien » de « son » enfant (toutes ces « valeurs » sont présentes indépendamment de la situation de handicap ; on retrouve la même chose chez les « représentants des parents d’élèves — et ce qui est drôle, c’est qu’on trouve beaucoup de professionnels du travail social à cette place, où ils se trouvent dans la posture inversée ! C’est là, me semble-t-il, qu’une réflexion institutionnelle poussée et récurrente, impulsée par le Directeur-ice générale et son équipe de cadres, en confrontation avec l’Association doit être menée. Le fait de voir un administrateur s’autoriser à interpeller directement tel ou tel membre de l’équipe qui est en contact direct avec son fils ou sa fille est si courant qu’on devrait pouvoir l’anticiper, en parler avant même le « passage à l’acte » de tel ou tel administrateur nominativement ! C’est aussi parce qu’on ne se parle de rien, ou de pas grand-chose que les histoires se répètent.

Extrait 2 —> L’interdépendance dans l’organisation…

« Cette notion d’interdépendance, n’est pas sans nous évoquer un autre concept, celui de la triple obligation du « don » : « donner », « recevoir », « rendre » (Mauss, 1925) redéveloppé en 2019 par Alain Caillé dans son ouvrage « extension du domaine du don » qui y ajoute l’étape de « la demande ». Le don comme fait social total, par lequel les rapports sociaux se créent et s’entretiennent. Un don qui n’est pas fait dans l’inconscience, sans attente de retour, qui n’obéit ni au seul intérêt pour soi ni au seul intérêt pour autrui. Le donateur a bien espoir que le donataire rendra à son tour, mais il n’en est nullement assuré. Le don est alors un pari, une alliance entre celui qui donne et celui qui reçoit. En conséquence, il nous semble que l’efficacité générale d’une organisation dépend des échanges entre ses membres. » 

RB -> Je ne crois pas que l’on puisse renvoyer tout du fonctionnement d’une « organisation de travail », par ailleurs « institution », au jeu du « don / contre-don » que Mauss situe dans le fonctionnement des groupes humains. Le système « don / contre-don » relève en effet de deux registres de régulation précis : les usages et les normes ; il est donc intégré non pas de manière « inconsciente » (au sens ordinaire de ce terme), mais par le jeu de l’assujettissement (imprégnation idéologique) tel qu’Althusser le propose. Les échanges dans une institution restent certes soumis à ces modes de régulation, mais il faut en rajouter un autre, celui du réglementaire ! Les acteurs ne s’impliquent pas dans une organisation de travail sans intention explicite ; la première étant dans le système « capitaliste » qui est le nôtre d’échanger la mise à disposition de leur force de travail contre une rémunération, seul moyen pour eux d’atteindre à des « revenus » qui leur ouvrent la possibilité d’une autonomie sociale plus ou moins étendue. Dans votre exemple, les personnels de votre EHAPD ne s’y trompent pas quand ils réclament une augmentation de salaire ; la réponse que leur fait finalement la directrice (« Allez donc voir ailleurs si c’est mieux ! ») révèle le « chantage » fondateur du « contrat de travail »… Trois d’ailleurs vont finalement prendre le risque d’aller voir ailleurs pendant que les autres ont fait le dos rond ! Là on voit que ce qui relie les acteurs n’est pas un système égalitaire où chacun investirait du temps, de l’énergie, de la force de travail, dans l’espoir de bénéficier en retour de l’engagement d’autres membres du groupe ! Une « entreprise » dont le but est par cette appellation clairement indiqué (but lucratif) n’est pas une tribu primitive dont le but premier serait de s’assurer une « survie collective » ! 

Extrait 3 —> La « com » a des limites !

« Tout le challenge de la communication est de défendre la qualité d’accueil malgré la quantité ! Ce travail d’engagement est difficile, mais nécessaire pour l’équipe de direction, qui ne pourra fédérer ses équipes que par une valorisation du projet et ce, même si dans leur for intérieur elles n’en sont pas convaincues. Car, ces encadrants portent aussi toute la responsabilité du travail de 40 salariées, qui adhéreront au projet, si on leur présente ses atouts. »

RB ->  « Défendre la qualité malgré la quantité ! » serait le « challenge » que le directeur, la directrice devrait soutenir par sa communication ! Paroles, paroles, encore des mots, rien que des mots ! Les mots ont leur limite… Et ce n’est parce que le signe est arbitraire (De Saussure) qu’on peut faire dire aux mots tout et n’importe quoi. Aussi, quand la quantité n’est objectivement pas là (manque de personnels, de matériel de temps…), on peut toujours vouloir combler ces vides par une parole que l’on veut pleine (cela s’appelle des éléments de lange par exemple des slogans à seriner !), cela n’a pas pour vertu de combler ces manques du côté de la réalité tangible ! Chercher à consoler les soignants qui à l’hôpital ou dans le Ehpad se trouvent en surcharge incroyable du fait de ces collègues qui ne sont pas, plus, là, en leur serinant que le soin est le plus beau métier du monde, et qu’au final c’est avec le cœur qu’on soigne, et que de cœur, ils n’en manquent pas, parce qu’ils ont choisi de faire ce beau métier… On peut trouver que ça suffit la « com » !!  Je ne crois pas par ailleurs que l’on puisse tenir pour acquise cette « stratégie de la pédagogie », celle que nos gouvernements répètent à l’envi ; si les gens résistent, c’est parce qu’ils n’ont pas compris et qu’il faut mieux leur expliquer ! Mais cette façon de poser le problème peut vite devenir un genre d’insulte à notre intelligence ! Il y a des « projets » faits par ceux qui nous dominent ou simplement nous subordonnent qui peuvent sérieusement nous atteindre dans nos intérêts, et en cela motiver une juste lutte ! 

Extrait 4 —> Loin de moi l’envie… ! Mais tout près le désir…

« En revanche, loin de moi l’envie d’encadrer des moutons de Panurges dans un rapport de domination, en tant que directrice.»

RB -> En psychologie, on parle de dénégation pour ce genre de formule (loin de moi l’envie…) par laquelle un sujet se dédouane sans qu’on ne lui ait rien demandé d’une motion « négative » ; en clair votre affirmation laisse à penser que du côté de votre subjectivité traîne le regret que les subordonnés ne soient pas plus obéissants ou simplement intéressés à vos projets ! Cf. fantasme de maîtrise.


Amélie PENISSON

Bilan de compétences * Orientation scolaire * Formation

2 ans

Merci Reynald BRIZAIS de partager vos commentaires. Ils nous donnent toujours à réfléchir sur nos bonnes intentions.

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