Compétences : Et si nous arrêtions un instant de courir après le Graal digital ?
En faisant ma veille régulière sur le développement des compétences, le learning à l'ère du digital... j'ai progressivement pris conscience de cette incongruité sur les réseaux sociaux : si on y affirme haut et fort l'importance de l'humain, c'est quand même le digital que l'on met toujours en premier quand il s'agit de se lancer ! Comme une quête incessante de la solution qui résoudra tous nos problèmes de compétences, d’un coup de baguette magique. Nous y avons tous cédé à un moment ou à un autre, moi y compris… Nous avons cru au elearning, puis nous nous sommes enthousiasmés pour le serious game, puis est venu l’avènement des MOOC… Maintenant, nous investissons sur le mobile learning, la réalité virtuelle et augmentée, et nos regards se tournent avec envie sur le big data, le deep learning et le machine learning…. Vers quoi d’autre ensuite ?
Loin de moi l’idée de dire que ces travaux, et les investissements associés, sont vains ! Parce qu’avec toutes ces innovations, et avec leurs expérimentations, nous avons redécouvert des vérités profondes. Nous y avons interrogé les pratiques, les résultats, les façons d’apprendre. Nous avons fait appel aux neurosciences, aux modes de management, aux relations entre les individus, au rôle du collectif, de l’environnement, du lieu d’apprentissage. Nous avons réinventé la prise en compte de l’humain, de son envie, de son besoin de socialisation, de ses émotions, de sa nature à la fois universelle et unique, de son plaisir enfin, comme preuve ultime de son engagement.
Alors pourquoi cette exploration incessante, sur laquelle nous mettons tant d’énergie ? Certes nous avons compris que les technologies peuvent réellement et profondément créer de la valeur pour l’apprentissage. Les acteurs du développement des compétences se sont mis au rythme des innovations digitales pour en explorer les usages pertinents en formation. Mais pour autant, nous faut-il vraiment courir ce marathon tous ensemble, alors même que nous savons pertinemment qu’il n’y aura pas de ligne d’arrivée ? Et faut-il continuer à croire qu'il existe ou existera un jour une solution, qui sera la réponse à tous nos besoins ?
S'arrêter et observer, en systémique et en agilité
Chez ETIC Management, nous avons décidé de nous arrêter un instant, de faire un pas de côté. Nous nous sommes positionnés à la manière de notre drône (on ne se refait pas, nous aimons la techno…), nous avons pris de la hauteur et nous avons observé. Nous avons tourné, viré, pour regarder d’un côté, de l’autre, par-dessus, par-dessous, de loin, de près, dedans, dehors, au milieu… Nous sommes redescendus en piqué, là où les choses nous semblaient compliquées, incertaines, pour à chaque fois remonter. Nous avons discuté avec des salariés, des étudiants, des associations, des managers, des communicants, des formateurs, des coachs, des consultants, des chefs d’entreprise, des startupers, des collectivités territoriales, des développeurs, des innovateurs, des organismes de formation, des écoles, des universités, des chercheurs… Entrer au coeur des collectifs, dans des réseaux sociaux, des expérimentations, des programmes de recherche, en présence, à distance, en blended, vers d’autres pratiques, d’autres partis-pris, d’autres angles de vues… Autant d’expériences que nous vous relaterons au fil nos publications. Nous avons analysé, en systémique et en agilité. Ce faisant, nous nous sommes forgés notre conviction :
Il est plus que temps de prendre un peu de recul dans notre élan : Notre première conviction est qu’il y a une énorme fracture entre ceux qui sont embarqués dans l’accélération digitale, qui savent apprendre en continu et utiliser les opportunités de leur environnement, et les autres. En continuant sur cette voie, la fracture ne pourra que s’amplifier, et nous n’avons collectivement rien à y gagner. Il y a un risque réel pour les individus, pour les organisations et la société.
Nous avons des marges de manœuvre pour agir : Une seconde conviction est que la capacité de développement personnel des individus est bien supérieure à ce que la société a tendance à penser. Ces convictions sont issues des travaux des neurosciences, des pédagogies alternatives, de notre expérience d’accompagnement des collectifs. Les trois nous conduisent à affirmer que l’être humain est naturellement doué pour apprendre, et que son environnement est un facteur clé pour lui permettre de s’y engager. Et de manière concomitante, nous sommes convaincus du potentiel de développement des collectifs.
Nous avons beaucoup plus de ressources et d’énergie mobilisable, en nous et autour de nous, que ce que nous voulons bien croire. A chaque analyse approfondie d’organisation, nous découvrons des ressources inexploitées. Que ce soit des personnes, avec des compétences personnelles et/ou des engagements personnels, des réseaux d’acteurs en territoire, des ressources internes, celles du Web et du digital, ces ressources sont méconnues, ou sous-exploitées. A chaque engagement dans un projet collectif, nous redécouvrons avec bonheur la puissance de l’intelligence collective et de l’action collaborative.
Se mobiliser collectivement avec ce qui est déjà là !
Faire cette proposition semble paradoxalement interpeller fortement ceux à qui nous l’avons posée. Il semble qu’il y ait bien plus d’appétence à s’engager dans l’innovation, surtout digitale, malgré les aléas que l’on sait et les nombreux échecs aussi inévitables que productifs… Paradoxalement, nous croyons plus aux promesses de ce qui n’existe pas encore, qu’aux usages de ce qui est déjà là, à notre portée.
D’aucuns vont nous dire que c’est trop compliqué. D’autres qu’ils ont déjà essayé et s’y sont cassés les dents. D’autres enfin qu’avec la matière humaine, le résultat est bien plus incertain qu’avec la technologie. Mais beaucoup finissent par se heurter à l’usage, par les humains, de cette technologie. Aussi simplifiée, aussi centrée expérience utilisateur soit-elle. Comme si nous attendions indéfiniment le moment où la technologie deviendra totalement invisible aux utilisateurs. Ce moment n’est pas encore arrivé, et ne nous pouvons plus attendre !
Ce qui nous manque d’abord, c’est la visibilité sur ce que tout ça peut produire, et la capacité à se mobiliser collectivement. Par où commencer, comment s’y prendre, combien ça va coûter, qu’est-ce que ça va rapporter, est-ce que ça va marcher ? Regardez ce qui se passe quand vous faites du benchmarking. Vous comparez les critères qui vous semblent clés, point par point, et vous ne comprenez pas : vous faites tout comme eux, et ça ne marche pas ! Ce qui manque en fait, c’est la posture : une vision, un cadre partagé, des marges de liberté, la capacité d’agir en complexité et en incertitude, de laisser place à l’initiative, individuelle et collective, en toute confiance. Le fondement est humain, profondément humain.
Apprendre à mobiliser tout ce que nous avons, c’est d’abord identifier ce qui est en nous, et autour de nous, voir le potentiel de valeur que cela représente, faire confiance à notre capacité collective à mettre en place les conditions du déploiement de ce potentiel. Regardons-le, interrogeons-le, écoutons-le, ouvrons-lui des espaces de liberté, favorisons la mise en lien, la socialisation, l’initiative et l’expérimentation. Ne nous attendons pas à ce que tout arrive comme par magie ! Partons de ce qui est déjà là ! Et accompagnons la co-création de nouvelles organisations, en écosystème apprenant, qui accueillent, valorisent et potentialisent les ressources existantes, celles digitales, mais aussi et surtout celles humaines !
DRH Région Aquitaine Nord chez Enedis Coach pro. # Libérer, relier, créer, se réjouir
7 ansRafraîchissant , le graal est en NOUS Tous, chacun de nous et nous ensemble
Intéressant. Dommage d avoir cédé à la facilité de l agilité. Il n y avait aucun besoin de buzz Word dans ce billet puisque l Homme était là.