Congrès de rhumatologie SFR 2019 – Régime amaigrissants et rhumatismes inflammatoires
Depuis une vingtaine d’années, certains aliments ou groupes d’aliments jusqu’alors ordinaires (lait, gluten, viande…) peuvent devenir sujet d’un régime d’exclusion, et devenir pourvoyeurs de maladies chroniques. La croyance et le vécu personnel des personnes influencent largement ces comportements. Pour exemple, en rhumatologie, un quart des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) déclarent qu’au moins un aliment influence leurs symptômes et un quart ont des stratégies d’évitement de certains aliments qu’ils considèrent comme pro-inflammatoires . Une session orale du congrès de la Société Française de Rhumatologie a permis de faire le point sur l'influence des régimes alimentaires sur les pathologies rhumatologiques.
Modification du comportement alimentaire
Concernant l’apport des oméga-3, une méta-analyse menée à partir d’études très disparates en termes de protocole a permis de mettre en évidence un effet significatif mais modeste de ces apports sur le plan du dérouillage matinal, de l’indice articulaire, de la douleur liés à la PR, mais cela n’offre pas d’influence sur le DAS . Une seconde publication suggère potentiellement un effet sur la douleur et la rémission chez les patients naïfs de traitement.
Concernant le jeun thérapeutique, une seule étude de mauvaise qualité ne permet pas de conclure.
Pour le régime végétalien, une méta-analyse récente montre que par rapport au régime omnivore, le régime végétarien et végétalien expose à une réduction de la DMO du col fémoral et un risque accru de fracture. Dans la PR, un seul essai contrôlé non randomisé a été mené durant lequel un jeun de 5-10 jours est suivi d’un régime sans gluten de 5 mois puis un régime lactovégétarien de 9 mois : on observe une efficacité modeste sur les paramètres inflammatoires et un possible effet modeste sur le gonflement articulaire, tout en prenant en compte que le risque de carence est élevé (vitamine D, calcium, omega-3, vitamine B12).
Concernant les régimes cétogènes (qui éliminent au maximum les hydrates de carbones), on observe qu’un régime cétogène versus régime low fat (<30% des Apports énergétiques totaux) offre une légère perte de poids mais accroît le taux de LDL-c. Il faut aussi rappeler que le régime cétogène accroît également le risque de mortalité.
Le régime méditerranéen, qui apporte un bénéfice cardiovasculaire important, a peu été étudié dans la PR hormis une étude ancienne dans laquelle le DAS28 était faiblement mais statistiquement abaissé. Une seconde étude interventionnelle a décrit une amélioration de la douleur, mais pas celle des paramètres d’activité ou d’inflammation de la maladie. Ces divergences posent la question de la mise en place de telles interventions en pratique auprès des patients.
In fine, aucun régime d’exclusion n’a montré son bénéfice, tandis que ce type d’alimentation expose à un risque de carence nutritionnel, voire un risque de troubles du comportement alimentaire. Concernant les oméga-3 et le régime méditerranéen, il existe un certain bénéfice sur la douleur dans le cadre d’essais randomisés.
Perte de poids et chirurgie bariatrique
Les études de bonne qualité sont rares en rhumatologie. L’une d’elle décrit que des patients obèses atteints de rhumatisme psoriasique débutant et initiant un traitement présentent plus souvent une activité minimale de la maladie lorsqu’ils suivent un régime hypocalorique (-30% des AET) par rapport à des conseils diététiques simples.
En population générale, la chirurgie bariatrique apporte un bénéfice en termes métabolique, en termes de morbimortalité cardiovasculaire ou de réduction du risque de cancer (chez les femmes). Cependant, le maintien à long terme de ces bénéfices se pose : le suivi d’une cohorte CNAMTS après chirurgie bariatrique montre que seul un patient sur deux traités initialement par antidiabétique ou hypolipémiant a arrêté le traitement à 6 ans, et qu’aucune variation n’est observée concernant les traitements de la douleur ou de l’anxiété-dépression. Le suivi nutritionnel des patients semble important pour maintenir les bénéfices de la chirurgie par bypass.
En rhumatologie, les études sont peu nombreuses : dans la PR, une première étude rétrospective a montré une amélioration de l’activité de la maladie mais elle était méthodologiquement limitée (Sparks Arthritis Care Res 2015). Deux études prospectives menées sur 25 ans tirées de la cohorte SOS ont, elles, montré une absence d’influence de la chirurgie sur l’incidence du psoriasis /rhumatisme psoriasique [9] ou de celle de la PR.