Constance de Maistre, éprouver les contours de la situation
Constance de Maistre questionne les oublis. Elle construit son processus pour retrouver les traces mémorielles d’un paysage, vivace ou fugace, vaporeux voire complètement effacé.
Laissées à l’état d’énigme, ses œuvres sont des terrains d’apparitions de récits abstraits, peints le plus souvent à l’acrylique ou à l’encre et collés sur toile ou sur papier à l’aide de petits papiers reliés à son histoire personnelle. Là où se construit un univers fantasmé de strates, des aplats de matières et de couleurs s’imbriquent, se superposent et laissent jaillir au pastel le trait puis l’écriture comme une fulgurance.
L’agencement invite le regard à errer librement. Les possibilités de dire, de survie, de rêve, empilées et enfouies, entrent petit à petit en résonance comme des souvenirs.
« J’aime l’idée de ne pas tout dire. S’abstraire c’est quitter le réel, créer son univers, c’est le plaisir d’observer tout ce que l’on ne voit pas, c’est se rejoindre sans expliquer, sans transmettre. »
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Le procédé permet de donner une impression de volume en utilisant les valeurs en dégradé. En contraste, le blanc, partie récurrente, propose un luminisme nuancé. Une ambivalence assumée entre l’apparition et la disparition prend appui. Laissant une dimension atmosphérique se dégager, créant un doute sur ce que l’on peine à nommer.
« Je ne souhaite ni transmettre, ni expliquer, ni représenter mais la peinture peut être un échange, un moyen de se rencontrer, une relation aux autres. Si cette rencontre peut avoir lieu alors je comprends mieux pourquoi je fais cela. »
L’équilibre des forces s’entremêle entre la représentation du vécu et la vue de l’esprit. L’artiste capture l'éphémère qui se dérobe et disparaît. Entre intention et intuition, sous nos yeux, les présences picturales fortes et imposantes font remonter dans nos pensées nos propres réminiscences émotionnelles liées à un endroit que nous avons visité, que nous connaissons.
Les œuvres de Constance transmettent le ressenti d’une situation que l’on partage. L’inconnu se transforme en connu et vice versa. Souvenir d’une vie antérieure ou rêve prémonitoire, l’expérience demeure personnelle. Cette esthétique du « déjà-vu » s’appuie sur la configuration des forces de la nature et la fragilité de la relation essentielle qui lie l'environnement au regard humain. Un ciel, un océan, une île, une falaise, une forêt… La peintre nous invite à éprouver les contours de la situation.