Constat 2016: Le e-commerce des grandes entreprises "traditionnelles" semble être resté au point mort.
C’est la semaine du black Friday durant laquelle les ventes en lignes vont encore exploser. Comme ça rime aussi avec la fin d’année, c’est un bon moment pour faire un bilan des expériences en ligne offertes par les grandes entreprises.
Constat : malgré que nous soyons en 2016 l'expérience est bien en deçà des attentes de la clientèle d'aujourd'hui. J'observe cette réalité tant au Québec qu'en France. Pourtant, je ne suis pas des plus exigeants.
Ces fameuses images du "Digital Darwinism" ont été utilisées à outrance dans les dernières années. Je les ai même insérées dans quelques une de mes conférences. Pourtant, le message semble être mal interprété.
"La transformation numérique ne se résume pas à vendre sur Internet, mais d’utiliser différentes technologies pour bâtir une relation personnalisée et durable avec chaque client."
Dans les 12 derniers mois :
J'ai meublé mon appart sur Amazon:
La disponibilité des articles et modalités de livraison des boutiques en ligne IKEA, BUT, DARTY et Conforama étaient incompatibles avec mes besoins. Sur leur site internet, nous avons droit à une sélection réduite versus ce qui est au catalogue. Ensuite, une fois le panier d’achats bien rempli, vient le temps de passer à la caisse et c'est le vrai bordel : Près de la moitié des articles ne peuvent être livrés à domicile et quand ils le sont, le prix est parfois prohibitif. Pour les autres, soit en rupture de stock, collecte en magasin et même collecte chez un « partenaire ». Finalement faire une sélection sur 3-4 sites internet de bannières différentes ne fait que multiplier la frustration et c’était au-dessus de mon seuil de tolérance.
J’ai donc acheté tout sur Amazon. L'expérience n'est pas idéale non plus. C'est difficile de juger de la taille d’un meuble en photo et le prix n’est pas garant de la qualité de fabrication. J’ai eu droit à quelques surprises à la livraison. Certes, la facilité d'achat est là, mais j'ai eu à réceptionner environ 20 livraisons différentes réparties sur 3 semaines. Je ne passe pas toutes mes journées à la maison !
J'ai changé de banque et utilise de plus en plus Paypal:
En aménageant en France, j'ai ouvert mon compte bancaire dans l'une des plus grandes institutions financières. Impossible de déposer un chèque ou de passer un virement international en ligne. Dans ma collectivité, il n'y a qu'un guichet de service ou il est impossible d'obtenir une nouvelle carte ou de retirer des espèces en personne. Et quand vient le temps de faire une réclamation d’assurance en ligne, nous sommes rapidement redirigés au téléphone où l'expérience est abominable.
Faire ses transactions bancaires courantes avec les banques en ligne c’est pas toujours simple. Et ça demande encore beaucoup d’échanges par la poste. Dans le cas de Paypal, c’est pratique mais je dois avoir deux abonnements car il est impossible de gérer des comptes bancaires de deux pays différents sur le même profil.
J'utilise maintenant exclusivement Uber et BlaBlacar au lieu de louer un véhicule :
J'avais besoins d'un véhicule et j’ai réservé sur le site officiel d’une bannière connue dans le milieu. Encore une fois, la réservation en ligne est simple, mais le service se dégrade après le paiement. C'était bien indiqué que l'agence était ouverte jusqu'à midi le dimanche et que le véhicule était disponible sur place. J'ai reçu la confirmation par mail et tout. Arrivé à l'agence, qui était bien ouverte, aucun véhicule n'était disponible. Le commis au comptoir était incapable de me rembourser ou d'annuler ma réservation car il n’a pas accès aux réservations internet. De plus, impossible de me faire rembourser via le canal de transaction, le téléphone était la seule option pour traiter ma demande.
Uber et Blablacar c'est pratique mais n'offre pas toujours la liberté souhaitée. Mais les expériences après-vente se font en ligne et sont aussi rapide que de passer la commande.
J'ai changé de fournisseur Internet en envisage fortement changer de fournisseur de mobile.
J'habite dans une collectivité qui où la fibre optique vient d’être installée. À l'époque, mon fournisseur actuel était le plus rapide en ADSL, raison pour laquelle j'ai opté pour celui-ci. Ironiquement, tous les autres fournisseurs offrent maintenant la Fibre sauf le miens. Bien que l'abonnement en ligne fût des plus facile et rapide, l’expérience après-vente ressemble plutôt à une tactique de rétention forcée. Premièrement, c'est un exploit d'arriver à trouver le numéro de téléphone du service à la clientèle sur leur site (J'ai finalement trouvé sur... Google...). Une fois que j’ai la responsable des annulations au bout du fil, le processus de désabonnement requiert que j’envoie une lettre (oui le truc avec un timbre qu’il faut acheter et coller) au département des retour qui a son tour m’enverra par la poste un autocollant que je devrai apposer sur la boite de mon modem pour un retour, encore une fois postal.
« Le syndrome de Stockholm ne doit pas être une stratégie de rétention client. Ni de miser sur la paresse de ses abonnés. »
Mon fournisseur sans-fil canadien n'est pas mieux. Bien qu'il soit facile de s'abonner sur le site Internet, il m’est depuis impossible de payer ma facture en ligne et le fait que je possède une carte de crédit française ne me rend pas éligible aux prélèvements automatiques.
Avec l'arrivée de Skype et Google Fi comme opérateurs télécoms en bonne et due forme, c'est très intéressant. Et pour la télé, j’ai Netflix. Mais la sélection française est limitée par rapport à la sélection canadienne. Ensuite j’ai Spotify et quelques nouvelles séries sur Amazon Prime semblent intéressantes. Au final, ça coute cher tout ça et seul Netflix est intégré à ma télé intelligente.
Mes courses au quotidien :
Je fais de plus en plus de courses sur Amazon plutôt que d’aller sur les grandes surfaces. Ca me permet d’éviter les heures de pointes et ça m’offre de meilleurs plages horaires de livraison que le site internet du supermarché près de chez moi.
Mais, car il y a un « mais »
Le problème dans tout cela est que ces alternatives qui facilitent la vie au quotidien amènent un lot d'enjeux économiques locaux importants. Une grande partie de ces revenus quittent le pays ou les transactions sont faites. Sur le plan fiscal, c’est également complexe. Et ce n'est pas que la faute des lois qui manquent de mordant ou du lobbying des grands groupes américains qui obtiennent des monopoles sur plusieurs secteurs. Si les grandes entreprises Canadiennes et Françaises mettaient les efforts aux bons endroits pour améliorer l’expérience client tout en maximisant la valeur ajoutée qu’apporte leur main d'œuvre, ce serait Win-Win!
Dans les grands chantiers de transformation numérique lancés par ces bannières, plusieurs semblent avoir oubliés qu’attirer la clientèle et leur vendre un produit est l’étape la plus chère du parcours de vie client. Et même dans certains des cas que j’ai énuméré, ils n’arrivent même plus à vendre. La fidélisation de la clientèle coute généralement moins cher.
Ce qui est doublement triste c'est que de bons employés sont réduits a appliquer des processus dépassés et a se faire crier dessus quand ils n'attendent qu'une chance de faire la différence avec chaque client.
L’innovation c’est une bonne chose, mais il ne faut jamais perdre de vue l’essentiel. Même si la compétition force une entreprise à changer son business model, il faut quand même s’assurer de garder ses clients.
Les mots « Disruptif », « Digital Transformation » et compagnie ça fait dans l’ère du temps. Et j’appuie toujours les organisations qui osent. C’est mon métier !
Il ne faut pas oublier les clients au profit d'une image d'innovation.
Je suis de ceux qui croient que ce n’est pas un problème de technologie. Tout est à disposition pour répondre aux attentes des clients les plus exigeants. Mais je sens que certains ont oublié de veiller que les fondamentaux soient respectés.
Maintenant que le constant est fait, ce serait intéressant d'avoir une discussion honnête avec vous, chères entreprises :
Qu'est-ce qui vous empêchent vraiment de mieux faire?