Crédit immobilier : vers des taux à 4 % cet été ?

En un an, le coût des prêts immobiliers a connu une envolée inédite. Selon L'Observatoire Crédit Logement/CSA, le taux moyen des crédits s'est élevé à 3,15 % en avril et devrait continuer de grimper. Un coup porté au pouvoir d'achat des ménages, qui revoient leurs projets.

Les taux du crédit immobilier n'en finissent plus de grimper , ce qui fait chuter le nombre de crédits alloués aux ménages désireux d'investir dans la pierre. Selon les derniers chiffres publiés par L'Observatoire Crédit Logement/CSA, le taux moyen des crédits s'est élevé à 3,15 % en avril, hors frais et assurances, contre 3,04 % en mars. C'est son plus haut niveau depuis 2014 et presque trois fois plus qu'il y a un an.

« Depuis un an, chaque mois qui passe coûte 0,20 % de taux en plus sur le crédit, soit 2,2 % de mensualité en plus sur un crédit à 25 ans, tandis que les prix, jusque-là, ne baissent que très peu », explique Olivier Lendrevie, le patron du courtier Cafpi, dans un communiqué.

Chute du pouvoir d'achat

Conséquence directe de cette remontée fulgurante des taux, le pouvoir d'achat immobilier des ménages plonge. En mars, le courtier Meilleurtaux expliquait ainsi qu'un couple avec des revenus de 3.000 euros nets par mois ne pouvait plus emprunter que 177.000 euros, contre 210.000 euros en janvier 2022. Cette chute de pouvoir d'achat oblige de nombreux ménages soit à renoncer à leur projet, soit à acheter des logements plus petits ou plus éloignés des centres-villes.

Une situation qui ne devrait pas s'améliorer dans les mois à venir, car le seuil des 4 % de taux de crédit se rapproche de plus en plus vite. « La plupart des barèmes [des banques, NDLR] affichent désormais des taux supérieurs à 3 % sur toutes les durées, et l'on voit même de plus en plus de taux à 4 % ou plus sur 20 ans ou 25 ans », explique Sandrine Allonier, porte-parole du courtier Vousfinancer. Et selon elle, « ils vont devenir la norme cet été ».

Resserrement monétaire de la BCE

La décision de la Banque centrale européenne (BCE) de relever une nouvelle fois ses taux directeurs de 25 points de base, jeudi 4 mai, devrait une nouvelle fois faire bondir les taux de crédit accordés par les banques. Le taux de refinancement de la BCE vient d'être porté à 3,75 %, alors qu'il était encore à 0 % il y a un an.

Ce taux de refinancement correspond au taux que les banques doivent payer lorsqu'elles empruntent de l'argent à la BCE. Depuis que la BCE a entamé son resserrement monétaire en juillet dernier pour lutter contre l'inflation, les coûts de refinancement des banques sont donc remontés en flèche, des coûts qu'elles doivent répercuter sur les crédits qu'elles accordent pour ne pas prêter à perte. Or le taux de refinancement de la BCE est de retour à un niveau qu'il n'avait plus atteint depuis octobre 2008, une époque où le taux moyen des crédits immobiliers était à plus de 4 %.

Chute de la demande

Cette nouvelle donne en matière de crédit fait l'effet d'une douche froide sur les ménages, qui sont contraints de revoir leurs projets. La demande de crédit immobilier a largement baissé et la production de nouveaux crédits a chuté de près de 40 % en mars sur un an, selon les derniers chiffres de la Banque de France. Cette baisse est toutefois à relativiser, car elle intervient après deux années record pour la production de crédit immobilier à la sortie de la crise sanitaire, au moment où les taux étaient au plancher.

Face à cette chute de la production de crédits, courtiers et banquiers aimeraient obtenir un assouplissement des critères d'octroi de crédit gravés dans le marbre par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) début 2022. Ces critères limitent à 35 % des revenus des ménages le taux d'endettement et à 25 ans la durée des prêts.

Les banques peuvent déroger à ces critères sur 20 % de leur production par mois, à condition de réserver 80 % des dérogations à l'acquisition d'une résidence principale. Une flexibilité que les réseaux bancaires trouvent difficile à piloter et qu'ils n'utilisent pas à plein. Une solution pourrait être de supprimer les contraintes au sein de cette marge de flexibilité, ce qui permettrait aux banques de prêter à qui elles veulent, notamment à davantage d'investisseurs locatifs. Bercy y est favorable , mais la Banque de France résiste. La prochaine réunion du HCSF doit se tenir le 13 juin.

Marion Heilmann pour les Echos / 08.05.23 

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