Culture du service, de la communication à l’adhésion
Sans avoir attendu les lois de rénovation de l’action sociale instituant le projet de service comme un outil indispensable, il était déjà le premier outil de communication interne et externe. Joint au projet associatif, ils constituent un duo séduisant pour dialoguer avec les parties prenantes. Le mieux serait même que cela soit un couple libéré : au mieux des intérêts de la cible pour laquelle l’association a été constituée, en mêlant les synergies sociales et solidaires avec l’écoute, l’empathie et le respect. Les tourtereaux, alors, n’auraient pas besoin de passer devant un édile pour convoler en juste raison d’exister.
Le partage des valeurs, base ou cible ? La question, sans être cruciale, amène un certain nombre de déterminants pour l’établissement. Logiquement, l’interrogation n’a pas lieu d’être. Le partage des valeurs est une fondation structurelle. Pourtant, le secteur de l’aide à domicile, amené dans le grand bain libéral, a du mal à avoir pied et avoue chercher des yeux le maitre-nageur comme principal garde-fou. Dans ce triste aveu, il convoque la concurrence, le marché et le coût de revient pour retarder l’existence de base d’un « vivre ensemble » respectueux. C’est d’abord une amère défaite, mais c’est surtout une balle dans le pied. Ce n’est pas au milieu du bassin qu’on apprend à nager. Les projets « associatif » et de service sont les deux premières leçons d’intégration pour commencer à bien flotter. Le projet associatif, travail de collaboration des administrateurs, est une feuille de route citoyenne. Par la convocation d’une communauté attachée à des principes, des règles et donc à des valeurs, le document peut envisager les enjeux sociaux et ainsi les partager autant avec les bénéficiaires qu’avec chaque collaborateur. Ce partage aboutit à des engagements. Par exemple, à Aid’Aisne, nous avons celui-ci : « Répondre aux exigences des besoins des publics complexes en organisant ses services et en qualifiant et spécifiant son personnel ». Nous y reviendrons. Le projet de service s’appuie sur le premier document pour s’ouvrir à la réponse à des besoins non couverts ou couverts autrement et en mieux. Il définit des objectifs, des modalités d’organisation et de fonctionnement. Il répond à la nécessité d’une plus grande visibilité de l’action menée. Cela amène logiquement à évoquer les pratiques collectives. Le document interroge les salariés dans leur quête de sens et de culture. Il peut permettre l’implication et la motivation. En un mot, la coopération.
Joindre le geste à la parole
Il n’est guère utile d’avoir une belle bibliothèque, si ce n’est pas pour la consulter et, ensuite, ouvrir sur des pratiques qui touchent, qui émeuvent, qui font consensus. C’est cette étape qui amène à viser à une culture de service. A partir des messages délivrés par la structure, quels sont les actes qui en découlent ? A partir des engagements pris dans le livret de famille de l’association, quels sont les droits et devoirs de chacun ? Prenons deux exemples :
· Le premier est issu d’un projet associatif. L’association s’engage à « Promouvoir la dignité de la personne fragile notamment en faisant respecter ses droits, ses choix et sa libre expression…». Beau programme.
· Le second est extrait du dernier projet de service de Aid’Aisne. « L’association défend et promeut : «la solidarité et l’esprit d’entraide ; la bienveillance envers les salariés ».
Ces engagements peuvent être rangés au fond d’un tiroir et ressortis à la demande d’une autorité. Ils peuvent également être l’objet d’un lien étroit et fin avec les collaborateurs. Le respect des droits des personnes aidées se rapproche nécessairement d’éléments de bientraitance qui passent par la formation, la sensibilisation, la mise en place d’actions autour de la citoyenneté, de l’inclusion sociale ou de projets pour rendre crédible la réalité du projet personnalisé d’accompagnement. Cela se traduit bien en actes pour le collaborateur. Actes qui donnent du sens au travail relationnel de proximité. Ces initiatives, en retour, conditionnent un rapport de confiance et de transparence avec la structure. La promotion de la bienveillance professionnelle (l’équité, le respect des engagements, l’entraide, la solidarité, la reconnaissance, l’évolution professionnelle, …) détermine la place du curseur d’une politique sincère autour de la qualité de vie au travail. Là-aussi, il reste possible de n’en faire que de grandes phrases. Posture inacceptable dans un contexte de retour de bâton probable.
De la délégation à l’acculturation
La déclinaison opérationnelle de ce frontispice originelle (les valeurs du projet associatif) correspond au relationnel dans le management quotidien des équipes et des collaborateurs. Ou du comment le collectif nourrit les ambitions personnelles. Le niveau de qualité de vie au travail définit le niveau de qualité de l’intervention et aboutit à la satisfaction ou au mécontentement des bénéficiaires et des salariés. La place de la reconnaissance professionnelle est, à ce titre, incontournable et doit faire partie des échéances contractuelles (par exemple, l’entretien annuel). La structure a tout intérêt à aller vers la transparence et le dialogue permanents. Cela permet un échange constant sur les difficultés des uns et des autres à atteindre la plénitude sociale et citoyenne et à toucher du doigt les valeurs fondatrices de l’association. Ces allers-retours sont les signes d’une communication qui vise une culture partagée, un socle solide et sain où peuvent pousser les fruits de la solidarité professionnelle.
L’équité, le respect des engagements, la transparence donnent de la chair à la notion de projet commun. S’il est difficile dans le secteur de l’aide à domicile d’admettre que le collectif doit primer sur l’individu, c’est pourtant de l’esprit d’entraide et de solidarité que peut émerger la notion de famille. Cette cellule, dans le monde de l’entreprise, n’est pas tissée des liens du sang mais des liens du sens. Ni unique, ni interdit, ils circularisent le « travailler ensemble ».