Décliner un ambitieux projet local rédactionnel en long format
Début 2017, la rédaction (agence) locale de l’Avenir Luxembourg a pris contact avec l’équipe web de lavenir.net pour réfléchir à la création d’un long format sur base d’un important projet rédactionnel: la fermeture du site sidérurgique d’Athus, il y a 40 ans, et les répercussions de celle-ci aujourd’hui encore.
Athus, c’est une localité de près de 7500 habitants située au sud de la Belgique (c’est le point rouge sur cette carte de la Wallonie)
Crédit de la carte : NordNordWest [GFDL ou CC BY-SA 3.0], via Wikimedia Commons
Le projet était conséquent: 4 suppléments de 8 pages distillés sur un mois, l’organisation d’une après-midi commémorative…
Pour le compte du weblab, j’ai été associé au projet. Et rapidement, plusieurs difficultés ont été identifiées:
- Comment susciter l’intérêt auprès de l’ensemble des lecteurs de lavenir.net pour un évènement vieux de 40 ans et qui s’est déroulé dans un lieu reculé (par rapport au reste de notre zone de diffusion – en vert sur la carte ci-dessus- ) ?
- Avec 4 suppléments de 8 pages, nous allions avoir une matière rédactionnelle et photographique particulièrement dense. Impossible de tout reprendre dans un seul long format sous peine de noyer le lecteur et de déforcer la trame narrative. Il fallait donc sélectionner les parties qui pourraient soutenir la narration globale, tout en valorisant les articles qui n’allaient pas être repris dans le long format.
- La série des suppléments débutait le jour de la fermeture, 40 ans plus tard, mais les suppléments allaient paraître au rythme d’une publication par semaine. Nous réalisons parfois des longs formats alimentés avec un nouveau chapitre par jour, durant une semaine. Mais nous n’avions encore jamais fait vivre un long format durant un mois. Il fallait donc maintenir un intérêt tout en évitant de lasser.
- Conséquence du point précédent, un planning de publication était incontournable. Celui-ci devait permettre d’avoir une vision globale du projet mais aussi de savoir qui faisait quoi (rédaction locale, pôle région au sein de l’équipe web, weblab) et de profiter pleinement des différents canaux de publications (place sur la homepage du site, newsletter, Facebook…)
Sur papier, la déclinaison web de cette série courrait méchamment le risque de se transformer en usine à gaz accouchant au final d’un long format qui n’aurait parlé qu’aux habitants d’Athus. La force du projet rédactionnel était d’être piloté par la responsable adjointe de la rédaction (agence) locale. Anne-Sophie Gérouville est à l’initiative de la série, elle connaît le dossier et est particulièrement organisée. Se sont greffés autour d’elle des journalistes qui ont su donner corps à l’histoire. Car c’est là la force de ce projet : parler d’un drame social en mettant l’accent sur l’humain (pas sur le pathos). Cette approche a été, pour moi, un des succès de ce long format, je vais y revenir un peu plus tard.
Si vous avez déjà bossé à plusieurs services sur un projet, vous savez que la confiance est un facteur important. Dans ce cas-ci, arriver en disant “le weblab se charge de tout” n’est évidemment pas suffisant pour gagner la confiance d’une équipe qui va investir de très nombreuses heures sur cette série. Ça tombait bien puisque nous avons pu nous faire un peu les dents sur le projet en préparant conjointement l’après-midi de commémoration organisée par la rédaction, en mai. C’est une des bonnes idées de l’équipe: inviter à une rencontre, les témoins de la fermeture de l’usine. Pour la rédaction, c’était l’occasion de collecter des témoignages et pour nous, l’occasion de préparer des capsules vidéos qui allaient être utilisées dans le long format et sur Facebook.
Le 4 septembre, le même jour que la publication du premier supplément papier, le long format “Il y a 40 ans, Athus mourrait” était en ligne. Une première satisfaction mais il allait falloir tenir le rythme car les suppléments étaient loin d’être terminés. Chaque semaine, c’était donc la course: quelle matière reprendre (l’angle des articles était-il bien conforme à celui évoqué dans le chemin de fer du projet…) et comment l’intégrer dans le long format, sans que cela dénote.
De mon côté, je tire plusieurs satisfactions de cet ambitieux projet:
- les délais ont été tenus (en 4 semaines, vous imaginez bien que les raisons d’un retard ou d’une complication auraient pu survenir).
- ce long format est une réussite en termes d’audience et en temps de lecture alors que, mise à part l’intro, l’ensemble des chapitres étaient réservés aux abonnés (via le paywall poool).
- en plus de travailler avec la rédaction locale de l’Avenir Luxembourg, nous avons collaboré avec le service infographie de la rédaction et avec la Sonuma (qui gère les archives audiovisuelles de la RTBF).
Par contre, j’ai été conforté dans ma crainte : sur la longueur, l’intérêt du public s’est atténué. Les statistiques semblent cependant montrer que l’on pouvait contourner cela en travaillant sur la relance (titre, intérêt…) lors de la mise en ligne des différents chapitres.