Décollage économique : les aéroports gabonais, un atout de poids ?
Le Gabon dispose de l’un des réseaux d’aérogares domestiques, les plus développés en Afrique Centrale. Certes, ne disposant pas des infrastructures suffisantes et de zones de chalandises suffisamment peuplées, ils ne permettent pas encore une réelle éclosion des échanges de biens et des personnes. L’amélioration de leurs capacités, serait un accélérateur évident pour booster l’intérieur du pays et nouer des relations commerciales étroites avec les régions limitrophes des pays voisins.
Le maillage du territoire national en infrastructures aéroportuaires est bien assuré. Selon l’ANAC (Agence nationale de l’aviation civile), le Gabon dispose de 35 aérodromes publics, dont 13 sont ouverts à la circulation aérienne publique et de 150 aérodromes privés, dont 13 également sont ouverts à la circulation aérienne en « privé autorisé » au 30 juin 2016. Disséminés dans toutes les provinces, ils ont tous un trafic passager discrétionnaire à l’exception majeure de celui de Port-Gentil.
L’expansion de ces plateformes aéroportuaires régionales rendrait les échanges intra-nationaux plus dynamiques et assurerait au Gabon une croissance plus inclusive et équilibrée.
L’expansion aéroportuaire, un accélérateur de croissance régional
Dans un contexte marqué par la faiblesse des infrastructures routières locales, le transport aérien domestique représente une fantastique opportunité pour le Gabon. Ayant une faible emprise au sol, les plateformes aéroportuaires sont beaucoup plus faciles à sécuriser et à entretenir que le réseau routier, voire ferroviaire. Elles sont aussi moins onéreuses, car une piste de 1 600 m suffit à tous les appareils courts et moyen-courriers. Leur exploitation est facilitée notamment par l’aspect règlementaire et normatif très exigeant. Transformer ces aérodromes régionaux en aéroports internationaux boosterait les capitales provinciales.
Une classe moyenne de consommateurs gabonais commence à poindre dans ces villes. Son appétence pour la consommation (électronique, internet…) est avérée et le transport aérien en fait partie intégrante. Reste cependant à mettre à niveau les standards de ces aérogares pas aux standards requis, et à lever les investissements nécessaires pour les moderniser, vieux symboles parfois, de la puissance publique gabonaise.
Le rôle stratégique des aéroports
L’époque de la protection de son espace aérien domestique est révolue. Il faut l’ouvrir à une véritable concurrence qui se traduira inévitablement par une baisse des tarifs et des prestations connexes (fuel, taxes, qualité de service..) pour faciliter les flux et les échanges. Ces aéroports auront une fonction qui dépassera le secteur des transports. Les impacts économiques directs (services sur site), indirects (sous-traitants) et induits (réinjection des revenus), seront perceptibles dans le tourisme, le commerce, les aspects économiques et sociaux de la vie nocturne, ect. Ce seront des espaces de promotion des atouts du Gabon, de son patrimoine touristique, culturel et gastronomique.
Au total, entre les incidences directe, indirecte, induite et catalytique, ces centres de vie pourraient peser plusieurs point de PIB.
Quel type d’infrastructures à mettre en place
Les avis divergent entre les analystes. Entre la volonté de l’Etat gabonais de réglementer son espace aérien en vue de créer une compagnie nationale lors du retour à l’équilibre des finances publiques, et la volonté des bailleurs de fonds du privé de voir les projets managés sur des bases purement commerciales , la frontière est claire. Plusieurs projets de partenariats publics-privés achoppent sur le continent car les organismes de gestion des aéroports sont gérés par l’administration, ce qui n’est semble-t-il, pas un gage d’attractivité pour les acteurs privés qui financent. Deux formules semblent se dégager. Celle utilisée par Ethiopian Airlines, Royal Air Maroc ou Kenya Airways qui ont déployé des hubs dans leur capitale à partir desquelles, elles desservent l’Afrique et le monde entier.
Et l’autre hypothèse qui repose sur des contrats de concession qui prennent les risques financiers et la responsabilité de la gestion de l’aéroport, y compris les responsabilités commerciales et techniques. C’est le cas d’ADL (Aéroport de Libreville), mise en concession à la holding française EGIS en 1988 par l’Etat gabonais pour 30 ans. D’autres optent enfin pour le process « BOT », (Build, Operate and Transfert) ou la structure est rétrocédée à une entreprise locale.
Ces dernières options privilégient toutes les opportunités de developpement de trafic, de création de valeur ajoutée commerciales non aéronautiques (free shop, immobilier, société de transport..). Un lien fort est crée avec le centre-ville afin de créer de la connectivité et des échanges commerciaux de plus grande envergure. Les aéroports kényans ont ainsi mis au point une chaîne logistique reliée aux grandes fermes du pays. A terme, le concept d' « aérométropoles » (ensemble de projets urbains interconnectés formant un tissu économique irriguant toute la région) est en gestation.
L’équipement des bases aéroportuaires intérieures du Gabon rendra le transport en avion abordable pour le « mass retail ». Avec une population en accroissement continu, et l’émergence d’une classe moyenne bien éduquée, ce secteur peut être un formidable facteur d’accélération du développement.
LOOGA BENG MATTHIEU