Développer sa marque employeur : leadership et facteurs de succès
Le domaine a beaucoup évolué depuis le premier apport de Simon Barrow sur la marque employeur il y a 30 ans, avec quelques organisations dont la réputation n’est plus à prouver telles que TMP Worldwide, Ph Creative et Universum pour en nommer quelques unes.
Aujourd’hui, il n’est pas surprenant d’avoir des initiatives “Marque Employeur” démarrées au sein des entreprises, et cela va plus loin qu’une question de moyens et de taille d’entreprise. Chaque employeur est, à la base, perçu d’une certaine manière par ses candidats potentiels, ses actuels et anciens collaborateurs. Au sein de la fonction "Talent Acquisition", cette partie est importante avec un impact sur le recrutement des collaborateurs, mais aussi sur leur fidélisation et la performance de l'entreprise.
Au cours de ces dernières années, j’ai eu l’opportunité d’explorer ce sujet, d'apprendre, de collaborer avec des personnes inspirantes et de différents horizons, en France comme à l'international.
Il peut être assez tentant d’avoir une vision uniforme du succès. En réalité, nous avons différentes manières de développer la marque employeur, en fonction de la singularité de l’entreprise, de ses leviers, de ses contraintes et de ses aspirations.
Les qualités de leadership sont cruciales pour offrir des perspectives stratégiques, concrétisées avec efficacité sur le terrain. Un profil hybride est nécessaire avec cinq dimensions-clefs :
- Analyste
- Stratège
- Storyteller
- Connecteur(se)
- Futuriste
Quel niveau de maturité ?
- Sommes-nous en train d’explorer et de simplement penser à développer la marque employeur ? Sommes-nous en train de démarrer certaines actions sur une échelle restreinte ? Sommes-nous en train de re-lancer, actualiser, monter d’un cran ou être en rupture avec les efforts d’ensemble déjà consentis ?
- Avons-nous une promesse claire, distinctive, suffisamment ambitieuse et basée sur des preuves réelles de l’expérience vécue par les collaborateurs ? Cette promesse a-t-elle été formalisée, adaptée, validée en interne et diffusée aux bonnes cibles ? Si oui, comment ?
- Sommes-nous dans une dynamique de campagne et sur du court terme, ou bien sur une dynamique durable, intégrée et axée sur le long terme ?
- Quels indicateurs de mesure sont-ils pris en compte pour évaluer le succès du travail réalisé ? Sont-ils stratégiques ou plutôt tactiques ?
- Le sujet concerne-t-il principalement la fonction “Marque Employeur”, ou bien concerne-t-il bien l’ensemble de l’entreprise ?
- Quels points de contact mis en avant, quels canaux utilisés ? Quelles technologies employées ?
- Avons-nous un sponsor au niveau la Direction Générale ? Comment décrire le niveau et la qualité actuels de la collaboration ?
- Est-ce que le travail de développement de la marque employeur est connecté à la raison d’être de l’entreprise, sa culture, son identité visuelle et son message institutionnel, sa vision, sa mission et sa stratégie ? Ou bien, est-ce dé-corrélé de ces éléments et basé sur un ressenti d’ensemble ?
- Quel budget global initialement alloué, pour quels retours ?
- Où sont les freins potentiels et pourquoi ?
- Avons-nous des cibles spécifiques en tête (ex: métiers spécifiques et/ou en tension, niveaux d’expérience/de seniorité précis, régions prioritaires) ?
- Adaptons-nous notre ton et notre contenu à ces cibles, sans trop nous éloigner de la promesse élaborée ? Quels efforts en interne, pour quels profils précis ?
- Avons-nous la DG impliquée et offrant son appui de manière régulière ? Qu’en est-il des managers et des collaborateurs dans l’ensemble ? Quels ajustements éventuels réaliser ?
- Est-ce que la promesse est alignée avec les réalités internes, et quelles variantes à travers les différentes régions dans le cas d’une entreprise internationale par exemple ?
- Quelles comparaisons avec les autres employeurs du même secteur d’activité ? Dans l’ensemble ? Quelles tendances et quelles interprétations-clefs derrière celles-ci ?
Evaluer le niveau de maturité actuel pour préciser, définir le travail pertinent et ambitieux à réaliser pour atteindre le point B. En fonction du contexte et de la complexité, les buts peuvent varier. Par contre, nous nous devons d’être sélectifs et de choisir nos batailles (“Moins C’est Plus”).
Quel(s) but(s), quelle stratégie et quel plan d’action ?
Avant de directement s’attaquer à la présentation finale sur Powerpoint, il y a cette possibilité d’avoir une compréhension plus approfondie et de saisir le contexte caché. Directement partir sur des solutions et ajuster les choses au plus vite, peut nous exposer quelques erreurs d’appréciation dès le départ… ce qui conduirait à aller dans une direction moins pertinente, à générer des frustrations et à être loin des résultats espérés.
D’un point de vue “politique”, TOUTES les parties prenantes ne voient pas forcément les choses de la même façon, et au même niveau de compréhension. Ou bien, elles peuvent partager une même vision mais avoir des intérêts divergents. Cela fait partie du champ des paradoxes, où notre marge de manoeuvre peut être assez restreinte au final si l’on souhaite implémenter quelques changements bien qu’ils soient utiles. En prenant en compte les dynamiques politiques, nous utilisons des filtres beaucoup plus pertinents pour évaluer la situation initiale, affiner la stratégie et optimiser le plan d’actions. Cela me rappelle quelques conversations avec un ancien collègue sur ce sujet: l’intelligence rationnelle est une chose, l’intelligence émotionnelle en est une autre, mais l’intelligence politique est très centrale.
Un autre aspect important est de préciser l’intérêt de la fonction “Marque Employeur”, de régulièrement illustrer sa valeur ajoutée (marketing interne de la fonction) et surtout son impact sur le business, pour une meilleure collaboration au final. Quelle est la raison d’être de la fonction “Marque Employeur” ? Qui sont les clients internes de nos prestations ? Quel est le statut de la relation avec chacun d’entre eux ? Sans cette nette clarification, les frontières organisationnelles peuvent paraître floues, and cela peut aller jusqu’à générer des conflits. Si nous nous retrouvons dans le dernier cas de figure cité, qui serait en charge de garantir la cohésion et un niveau minimal de frictions, pour permettre un véritable succès collaboratif ?
Une fois que la partie “Contexte” est abordée en profondeur, nous avons plus d’éléments et d’informations utiles pour préciser notre point B. A présent, il est temps d’analyser un autre facteur-clé de succès : les capacités. Celui-ci a une influence différente et tout aussi impactante sur le type de stratégie que l’on pourra mettre en place. Sera-t-elle prudente (minimum de risques et d’efforts), ambitieuse (un pari d’ensemble important, des ressources optimisées et quelques innovations mises en place) ou irréaliste (grandes ambitions, ressources fragiles). La conversation va être différente, selon le type de stratégie qui se profile à l’horizon. A ce stade-ci, que choisit-on de nous négocier, quelles décisions allons-nous prendre ?
Par “Capacités”, nous entendons la bonne taille d’équipe (directe et/ou transversale) et la bonne structuration, les finances, la technologie nécessaire et le pouvoir de décision.
Si la fonction “Marque Employeur” est le périmètre d’ensemble, dans ce cas-ci il est important d’également considérer d’autres périmètres tout autant vitaux (créa, événements, digital, marketing, relations écoles, CRM, analytics, RP, etc…), le tout en fonction de la manière dont l’entreprise est structurée et son design organisationnel. Dans le même temps, il est essentiel de rationaliser le périmètre global. Quelles activités, quelles tâches devons-nous conserver et pourquoi ? Lesquelles sortir à tout prix et transférer vers d’autres fonctions dans les délais les plus brefs ? Via cette action, nous gagnons en pertinence ainsi qu’en focalisation et pouvons aller en profondeur, pleinement exprimer la raison d’être de la fonction “Marque Employeur”. Après ces (+) et ces (-), nous pouvons encore plus affiner le tout en nous posant les questions suivantes : que doit-on internaliser, que faut-il externaliser ?
En plus de cela, il y a également des rôles et des implications à clarifier et la matrice R.A.C.I (ou A.R.C.I) est très utile pour cela. En listant les principales activités liées à la Marque Employeur, pour quels éléments sommes-nous :
- garants du résultat et décisionnaires
- Directement affectés aux tâches
- Consultés et contributeurs aux prises de décision
- Simplement informés
L’autre point est de s’assurer que tous soient au courant de cette répartition, qu’il y ait une clarté importante pour aller dans le sens d’une collaboration équilibrée sur le long terme. Bien entendu, les rôles et implications sont évolutives, d’où le travail de pédagogie et la négociation en démontrant la pertinence ainsi que les avantages possibles.
Quelles connexions ?
La fonction “Marque Employeur” est loin d’être esseulée. C’est bien l’opposé qui est nécessaire et vital. Dans le meilleur des cas, la fonction “Marque Employeur” est connectée à d’autres fonctions du business dans la globalité, soit un réseau diversifié d’acteurs. C’est pour cette raison que le leader fonctionnel doit être exceptionnel pour créer et entretenir des liens avec une variété de personnes, en construisant des ponts qualitatifs et générateur de valeur mutuelle.
Dans la première partie, nous évoquions le point des niveaux de maturité, avec cet élément saillant des connexions.
L’appui du sponsor (en provenance de la DG) est à conquérir et à développer au fil du temps. S’il est nécessaire de négocier plus de ressources, il est prépondérant de régulièrement communiquer sur l’activité de la fonction, de manière à aussi intégrer des feedbacks importants pour étoffer l’appropriation d’un contexte d’entreprise évolutif. Tout ceci pour s’assurer que la stratégie et les actions menées servent bien le business, et que le tout est bien aligné avec la direction globale de l’entreprise.
Cela signifie aussi que si l’on parle de réseau diversifié d’acteurs, il nous faut aller au-delà de la collaboration étroite développée avec le sponsor. Ainsi, il est important d'échanger avec d'autres membres du CoDir pour mieux saisir leur but, leur contexte spécifique, leur stratégie et leur activité actuelle dans l’essentiel (ce qui est réalisé, en cours et à venir). Cela donne vraiment l’opportunité d’avoir une vue panoramique efficace pour demeurer dans la pertinence et éventuellement actualiser la stratégie “Marque Employeur” et/ou des éléments du plan d’actions.
Les clients internes sont au coeur du service que nous délivrons, et directement exposés à notre raison d’être fonctionnelle. Les feedbacks et résultats positifs renforcent la confiance et valide la stratégie ainsi que le plan d’actions. Encore une fois, il n’existe pas d’une solution miracle pour toute entreprise, et l’empathie est centrale pour partir de leur point de vue et de la spécificité de leurs problématiques.
Pour les équipes “Marque Employeur” composées d’un seul membre ou plus, l’aspect “Développement de talent” est additionnel. En effet, nous avons besoin de coéquipiers saisissant le "Pourquoi" de nos décisions et de nos actions, avec des profils précis et complémentaires, en développement perpétuel. Le management et le coaching effectués sont là pour favoriser l’engagement, ce dernier impactant directement la performance de l’équipe.
En ce qui concerne l’aspect équipe, nous avons également différentes options. Voulons-nous une faible distribution géographique des rôles (équipe localisée à un endroit commun) ou une forte distribution (équipe répartie entre plusieurs régions géographiques avec le leader fonctionnel au siège international) ? L’option de l’équipe virtuelle est aussi à considérer (remote), avec cet avantage de pouvoir baser son recrutement sur un pool de talents beaucoup plus large.
Certaines compétences sont disponibles à l’intérieur de l’équipe Marque Employeur and d’autres à l’extérieur. Le réseau de partenaires (agences incluses) fait partie de l’environnement externe, avec des priorités qui peuvent plus ou moins diverger. Le but ici est de comprendre leur positionnement,, de maximiser les synergies, et aussi de maintenir les partenaires informés sur les intentions, la stratégie, le plan d’actions (vue synthétique) et les résultats obtenus pour toujours valoriser le travail commun réalisé.
L’autre point est celui du cercle restreint composé de mentors et de supporters. Cela est bénéfique pour mieux négocier les moments complexes, avec des décisions-clefs à prendre et des problématiques ambiguës à aborder par exemple. Au-delà des petites astuces et techniques, et de tout l’aspect stratégique-même, nous restons des êtres humains avec des périodes de doute, de crainte et autres blocages à certains moments. Recevoir l’attention et les conseils de mentors, ainsi que le soutien psychologique, font la différence. Et vice-versa, nous pouvons également être dans une posture d’aide, offrir notre soutien et des recommandations si nécessaire.
Les collaborateurs font aussi partie des connexions importantes à développer. En communiquant pourquoi rejoindre notre entreprise et dans quel cas (de manière élégante) opter pour une autre entreprise, nous allons régulièrement interagir avec eux pour mettre leurs histoires en relief. L’entreprise est composée d’êtres humains avant tout, soit des acteurs-clefs oeuvrant au quotidien. Partager et amplifier leurs histoires est également une forme de reconnaissance publique. Ce sont eux qui vivent les réalités internes chaque jour. Ils ont une perception et une opinion directe sur le sujet, et notre rôle est d'également de continuellement contribuer à réduire les écarts entre la promesse et ces réalités internes.
Pour finir, les pairs sont à considérer (exerçant la même fonction mais au sein d’organisations différentes). Tous les échanges qualitatifs et les transferts de connaissance à l’intérieur des communautés physiques ou digitales (podcasts, blogs, meetups, conférences, médias sociaux, etc..) permettent d’élargir les horizons et d’être dans une dynamique d’apprentissage continu. Cela signifie “planifier du temps régulier” pour rester au contact et aussi être dans la contribution. Certains pairs peuvent rencontrer des challenges similaires ou complètement différents. En tant qu’humbles professionnels de la marque employeur, l’écoute et la participation active (au sein des communautés) représentent des facteurs de succès, avec des principes captés qui pourraient être utiles pour nos propres réflexions et activités.
Quel futur ?
Une fois que tout est mis en place, que les plans sont activés et que les connexions sont continuellement développées, il demeure un dernier écueil : le présent permanent et la pensée linéaire. C’est à ce moment précis que la réflexion stratégique est nécessaire. Le futur n’est pas à 100% linéaire et nous en avons la preuve avec l’impact des mega tendances telles que l’automatisation par exemple. TikTok est de plus en plus plebiscité, et identifié comme une opportunité nouvelle pour les marques en général. Les requêtes vocales sont estimées à 50% des requêtes globales pour cette année 2020, les initiatives de Diversité et d’Inclusion (D&I) gagnent en momentum, etc.. A présent, quelle posture et quelles décisions prendre aujourd’hui ?
La "méthode des 3 Boîtes" inventée par Vijay Govindarajan est un outil simple et puissant pour cela. L’idée est d’avoir une focalisation équilibrée et de s’assurer que le futur est abordé, préparé. Ce qui nous a rendus performant il y a 3 ou 5 ans auparavant ne marchera pas à l’infini. De ce fait, qu'allons-nous anticiper aujourd’hui et quel futur souhaitons-nous créer ?
*Opinions propres
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