De la générosité au burnout: le covid 19 comme amplificateur
En cette période de covid 19, le risque de burnout a particulièrement augmenté. Il peut exister une confusion entre le surmenage et le burnout. Or cette dernière crise psychologique est avant tout une crise d’un engagement maintenu trop longtemps dans un contexte relationnel qui n’apporte par de retours satisfaisants, notamment sur la reconnaissance. Comme l’indique Arnold Bakker « les employés enthousiastes excellent dans leur travail car ils maintiennent une balance entre l’énergie qu’ils donnent et l’énergie qu’ils reçoivent ». Mais qu’est ce qu’un contexte relationnel pouvant apporter de l’énergie positive ?
Il s’agit d’un contexte permettant de renforcer la sécurité ontique (Boszormenyi-Nagy, 2000) : je me sens inclue dans un système relationnel me permettant de construire un sens du temps (mon histoire, mon présent, mon futur) ; une place (une identité, l’utilisation auto déterminée de mes forces et compétences, du respect relationnel) ; de la reconnaissance (symbolique, de carrière, financière). L’autonomie de la personne se gagne par la dialectique relationnelle avec son entourage à travers cet échange de générosité vs sécurité ontique. En pratique, cela signifie que lorsque le burnout apparaît :
1. Il existe dans le vécu de la personne un déséquilibre entre cette générosité dans un système relationnel et la sécurité ontique qu’elle expérimente en retour (voir aussi les travaux d'Adam Grant ou Mauss)
2. Que les symptômes de burnout sont un signal (comme la douleur) pour la personne de changer ce déséquilibre
3. Des complexes dans les loyautés relationnelles (Boszormenyi-Nagy) et le personnage social (Jung, Goffman) bloquent la personne dans cette situation; ses solutions entretenant le problème
4. La situation de covid 19 est en synchronicité (Jung) émergente (théorie de la complexité), ce qui indique que cette crise est aussi une possibilité de transformation
Cela peut être cette femme cadre qui doit être la Parfaite pour gérer sont travail, ses enfants en bas âge, son équipe et ceci sans avoir de reconnaissance et surtout sans se plaindre. Cela peut être ce jeune ingénieur, qui s'enferme dans l'Expert; qui passe ses nuits et week-end à compenser pour les failles de son entreprise mais qui ne sait pas ce qu'il fera dans 3 mois et dont le manager est inexistant. Cela peut être cette infirmière qui est enfermée dans son rôle de Soignante, dont la nouvelles cheffe n'a pas pris le temps d'écouter son histoire avec le service et les difficultés relationnelles dans l'équipe. Cela peut être ce chauffeur de bus qui lutte pour de meilleures conditions de travail et qui enfermé dans son personnage de Justicier, ne prend plus le temps d'être en relation avec sa famille. Cela peut être ce manager d'une équipe de commerciaux qui enfermé dans dans son personnage de Roi, ne se centre plus que sur des jeux de pouvoir avec les autres, au détriment de relations plus authentiques et vivifiantes.
Quel sens je donne à cette crise ? Quelles sont mes émotions positives et négatives ? Pourquoi ?
Quel sens je donne à mon engagement au travail ? Pourquoi tant de générosité ? Quels avantages et inconvénients ? Quels sont les signaux envoyés par mon corps pour m’indiquer un déséquilibre ? Quelles sont mes stratégies de récupération (sommeil, détente, relaxation, alimentation, repos,…) ? Qui peut m’aider à prendre du recul sur mon investissement au travail ?
Quelles sont mes frustrations au travail ? Jusqu’à quel point je les exprime ? Si elles sont exprimées, le sont-elles avec la bonne stratégie de communication ? Qui pour prendre du recul sur ce point ? Qui peut m’aider à diminuer ma charge de travail pour prendre le temps de récupérer ?
Jusqu'à quel point je suis dans un environnement de travail sain ou toxique ? Quel niveau de dépendance à l'entreprise vis à vis de mon employabilité ? Quelles actions je peux mettre en place dès maintenant pour la développer ?
Quatre qualités nous paraissent particulièrement utiles en ce moment, notamment en méditation :
• la gratitude : être reconnaissant pour le plein de la vie et l’exprimer par des remerciements
• le pardon : accepter les défauts d’autrui et laisser le désir de vengeance ; se détacher du ressentiment pour libérer de l’énergie positive
• la compassion : ressentir et comprendre la souffrance des autres et vouloir y remédier. Se ressentir en lien avec l’humanité dans une communauté de destin
• la contemplation : se libérer de la volonté et se laisser absorber dans la considération du monde, de l’univers, pour être dans l’ici et maintenant
Matthieu Poirot
Expert en Qualité de Vie au Travail
Psychologue et Docteur en gestion
Dirigeant de Midori Consulting
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