Des start-ups aux licornes : comment la France et l’Europe peuvent-elles accélérer ?
Vivatech 2021

Des start-ups aux licornes : comment la France et l’Europe peuvent-elles accélérer ?

Commençons par une bonne nouvelle.

Beaucoup a été fait ces dernières années pour faire progresser les investissements dans les start-ups en Europe. A cet égard, 2020 a été une année record avec plus de 40 milliards d’euros levés. Et ce qui est vrai pour l’Europe l’est également en France où le niveau historique de 5,4 milliards d’euros a été atteint. Cela nous place en deuxième position, derrière le Royaume-Uni (12,7 GE) mais devant l’Allemagne, avec de belles histoires comme Voodoo, Mirakl ou Ynsect pour ne citer que les plus importantes.

L’écosystème French Tech : encore limité, mais plein de potentiel

Il ne s’agit pas de s’enthousiasmer naïvement devant la valse des milliards mais de mesurer le rôle croissant que ces entreprises jouent dans nos vies et notre économie. Arrêtons-nous un instant sur la pandémie de Covid-19. Qui a trouvé le premier vaccin dans le monde ? BioNTec, une start-up allemande ! Qui contribue activement au déploiement de la campagne vaccinale, en France mais aussi en Allemagne ? Doctolib !

En 2019, les pouvoirs publics français s’étaient donné l’ambition d’atteindre 25 licornes - ces entreprises innovantes valorisées plus de 1 milliard d’euros - à l’horizon 2025. Nous n’en comptions que 7 à l’époque. Nous voilà déjà à 15 aujourd’hui, avec 5 nouvelles juste depuis le début de l’année 2021 (Backmarket, Shift Technologies, Alan, Vestiaire collective et Ledger). C’est un objectif que nous allons dépasser !

Mais nous manquons de géants de la tech en Europe. Si nous pouvons nous réjouir des progrès accomplis, force est de constater que nous investissons 5 fois moins en Europe qu’aux États-Unis dans les entreprises innovantes. Pour mettre en perspectives les deux modèles : Outre-Atlantique, la tech représente environ 30% de la capitalisation boursière de l’indice américain S&P 500, grâce aux GAFA, nées il y a moins de quarante ans. A l’inverse, le secteur de la tech en Europe ne représente que 5 à 6% du CAC 40 français et l’âge moyen des entreprises de cet indice est de plus de 100 ans.

C’est la raison pour laquelle on nous compare parfois à une forêt... de bonsaïs, incapable de faire émerger de grands arbres.

Aussi nous nous réjouissons que le Président de la République ait fait sien le défi porté par Scale-Up Europe - dont nous sommes l’un des fondateurs - de viser 10 entreprises innovantes de plus de 100 GE en Europe d’ici 2030.

Mais pour cela, il va falloir mettre toutes les chances de notre côté. Nous pourrions évoquer ici la bataille des talents, les défis de la deeptech ou encore comment faire coopérer start-ups et grandes entreprises. Je vais me concentrer sur les questions de financement.

Premier enjeu, alors que nous représentons une formidable opportunité d’un demi-milliard de consommateurs, nous souffrons en Europe de la fragmentation de nos marchés de capitaux. Nous n’avons pas encore un marché intégré. Lorsqu’une entreprise innovante française ou allemande veut financer sa croissance, elle n’a pas accès à un pool d’investisseurs unique et profond auquel elle pourrait directement s’adresser mais elle doit traiter avec une multiplicité de marchés de capitaux, ce qui est un frein considérable à sa capacité de lever de fonds.

Deuxième enjeu, nous avons mis en place en Europe, dans les années qui ont suivi la crise financière de 2008-2009, un ensemble de règles prudentielles qui s’appliquent aux banques, aux compagnies d’assurance, aux fonds de pension et aux investisseurs de manière générale (normes de Bâle, Solvency, MIFID pour n’en citer que quelques-unes) qui n’encouragent pas l’investissement dans le private equity. Et c’est un euphémisme. L’épargne des Européens est mécaniquement orientée vers les emprunts d’État et l’immobilier. Cela pénalise bien sûr le financement des entreprises au sens large mais en particulier les plus innovantes, au modèle de croissance rapide.

Un enjeu de leadership économique

Il reste encore des progrès à faire pour encourager l’investissement, tant auprès des VCs que des fonds de croissance, et aider les champions de la technologie à entrer en bourse. J’y attache de l’importance car c’est un enjeu de souveraineté pour l’Europe. Nous ne voulons pas juste donner naissance à des entreprises de la Tech qui n’auraient ensuite d’autre choix que d’aller se coter sur le Nasdaq à New-York. Nous voulons que nos entreprises innovantes grandissent et se développent en Europe.

C’est la raison pour laquelle BNP Paribas a investi depuis 10 ans dans l’accompagnement des startups : nous pensons que nous avons un rôle à jouer pour les aider en France et partout en Europe. Cela implique une approche relationnelle à long terme avec des capacités de conseil, de la start-up à la licorne. Nous avons formé des banquiers qualifiés qui comprennent les enjeux technologiques et les modèles d’affaires en rupture. Nous en comptons plus d’une centaine partout en France, capables d’apporter un accompagnement spécifique sur le quotidien comme le haut de bilan.

Nous accompagnons d’ailleurs 80% du Next40, avec notamment l’IPO il y a quelques jours en France de Believe, spécialisée dans la distribution musicale numérique et les services aux artistes et labels indépendants, et les 3/4 du FT120. Au total, nous comptons 3500 startups et scale-ups clientes de notre dispositif WAI (We Are Innovation) en France.

Je suis optimiste pour la French Tech, car je suis convaincue que le succès appelle le succès. Et nous pouvons y contribuer, en éduquant l’écosystème financier sur leurs besoins spécifiques, en accompagnant ces entreprises dans leurs introductions en bourse sur des places européennes ou encore en aidant les SPAC français et européen.

En somme, nous avons toutes les cartes pour que des champions français de la tech intègrent le CAC40 de demain ! 

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