DIAGNOSTIC D’ENTREPRISE ET CYCLE DE PERFORMANCE DES ENTREPRISES
Les 25 principales causes de déclin des entreprises à succès (exemples camerounais)

DIAGNOSTIC D’ENTREPRISE ET CYCLE DE PERFORMANCE DES ENTREPRISES Les 25 principales causes de déclin des entreprises à succès (exemples camerounais)

« Les victoires et les certitudes d’hier… sont les inconnues de demain. »

 

Un vieil adage nous rappelle qu’il est plus facile de se hisser au sommet que de s’y maintenir ; en outre, la permanence du succès nous empêche souvent d’anticiper certains changements environnementaux ou d’avoir un regard objectif et neutre sur des lacunes internes naissantes, rampantes et ensuite galopantes. Cela se vérifie lorsque l’on observe la vie et le cycle de performance de nombreuses entreprises en Afrique. Le cas du Cameroun permettra d’illustrer tout ce qui précède.

Il était une fois trois fleurons du paysage économique camerounais :

  • TANGUI, le synonyme de l’eau minérale naturelle au Cameroun.
  • CIMENCAM, le fournisseur de référence de ciment en zone CEMAC.
  • EXPRESS UNION, le N°1 du transfert d’argent au Cameroun.

 

Les choses ont cependant bien changé en 2016/2017, ainsi que l’illustrent les graphiques des 3 Figures ci-dessous. On constate ainsi que :

·        TANGUI a perdu sa position de leader et a été détrôné par SUPERMONT (sa part de marché passant de 72% en 2010 à 36% en 2016).

·        DANGOTE a brisé le leadership de CIMENCAM en quelques mois seulement (cette dernière perdant 26 points de parts de marché en moins de 2 ans).

·        Le marché du transfert d’argent au Cameroun est désormais contrôlé par les opérateurs de téléphonie mobile ORANGE et MTN (lesquels touchent entre 50 et 60% de la population utile).

 

Le constat d’échec de nos (jadis) trois fleurons semble évident sur la base du critère de la position concurrentielle ; les raisons du déclin sont, elles, multiples. Comme précisé plus haut, de nombreuses entreprises africaines qui dominaient leur marché connaissent cette situation. Et les interventions du cabinet-conseils Strategy & Analytics Consulting (SAC International) auprès de nombreuses entreprises africaines a permis de classer les raisons du déclin en trois catégories :

  • les Erreurs de Stratégie ;
  • les Défauts Organisationnels ;
  • les Raisons d’Ordre Culturel et Humain.

 

LES ERREURS DE STRATEGIE

1.      Un Business Model qui n’est plus adapté aux réalités du marché (ce qui est fortement pénalisant dans un monde qui change avec une célérité impressionnante).

2.      Une Stratégie de prix non-optimale pour attirer les clients (pénétration et part de marché) et créer de la valeur (génération de revenus).

3.      Un « product-mix » déséquilibré, insuffisamment diversifié ou non renouvelé.

4.      Un réseau de distribution qui n’est plus adapté, et/ou qui manque de capillarité.

5.      Un portefeuille de clients trop concentré ou trop volatile ; ce qui expose l’entreprise à une forte vulnérabilité.

6.      De mauvais choix concernant l’axe ainsi que les messages de la communication de relance. Cette communication étant négativement influencée par la « myopie de diagnostic » (voir Fig. 4).

7.      Une absence de souplesse structurelle (faible variabilité des charges dans un contexte où la conjoncture nécessite d’éviter d’être trop prisonnier des charges de structure).

8.      Une vulnérabilité de la stratégie d’approvisionnement. La dépendance vis-à-vis de certains fournisseurs ayant des effets négatifs sur les coûts, les délais, la qualité des intrants ; ce qui entraine donc une baisse de la satisfaction des clients.

9.      Mauvaise stratégie d’investissement (qu’il s’agisse des investissements de capacité, de modernisation ou même de productivité).

10.  De mauvais placements financiers. Ceux-ci s’avérant trop risqués et/ou insuffisamment diversifiés.

 

LES DEFAUTS ORGANISATIONNELS

11.  Manque de système et d’outils modernes de pilotage en « real time » de la performance. Cela allant parfois de pair avec une connaissance insuffisante, voire erronée, des performances réelles de l’entreprise (ventes effectives, fraudes éventuelles, etc).

12.  Absence de plan B et de scenarii analytiques réels et orientés vers l’action dans l’élaboration des plans stratégiques.

13.  Veille concurrentielle inexistante, ou alors uniquement descriptive lorsqu’elle existe ; dans un contexte où l’analyse prédictive doit devenir la norme.

14.  L’absence ou la mauvaise écoute du marché. La qualité de certaines études de marché est alors en cause ; leur manque de fiabilité tenant à des erreurs de compétence ou à leur manque d’objectivité.

15.  L’absence ou la mauvaise segmentation du marché. Il ne s’agit plus de se limiter aux macro-segments classiques, mais de procéder aux 2ième et 3ième niveaux de segmentation.

16.  L’absence d’initiatives de Business Intelligence permettant de créer les offres personnalisées dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus exigeants, différents et volatiles

17.  L’absence de management de la qualité et d’optimisation des processus.

 

LES LACUNES D’ORDRE CULTUREL ET HUMAIN

18.  Absence de remise en question (vécu sur les succès passés, la certitude que les succès passés se répéteront systématiquement, le « complacency-effect »…). Ceci s’accompagne d’une certaine tendance à refuter tous les rapports qui mettraient en évidence les failles managériales de l’entreprise.

19.  Absence ou disparition de la culture de l’innovation et de la mentalité créatrice (laquelle avait pourtant fait le succès de la plupart des entreprises qui font face actuellement à un échec).

20.  Absence de culture orientée « client » consistant à mettre celui-ci au centre de tout ; ce qui est bien entendu impardonnable dans un environnement où le consommateur est de mieux en mieux informé et de plus en plus exposé aux offres des concurrents.

21.  Non-anticipation des changements du cadre réglementaire et/ou concurrentiel. Et ce d’autant plus qu’une bonne cellule de veille concurrentielle anticipera toujours bien à l’avance les changements structurels dont il est question ici ; ce qui permettra d’ajuster les choix stratégiques, voire de repenser le business model.

22.  Non-priorité à la compétence dans le recrutement et la promotion des employés.

23.  Baisse de motivation et d’engagement du personnel. Ce qui a un impact évident sur la qualité du travail et des produits & services proposés au consommateur.

24.  Démission d’employés-clés et talentueux ; et pire, si l’on considère certains départs vers la concurrence.

25.  Conflits et intérêts divergents des actionnaires et/ou des dirigeants (conduisant à des joutes politiciennes qui paralysent l’entreprise.

 

Aussi surprenant que cela paraisse, la plupart des maux énumérés ci-dessus affectent (dans des proportions certes diverses) quasiment toutes les entreprises qui ont affiché des performances commerciales et financières impressionnantes dans leur durée et/ou dans leur proportion, mais dont lesdites performances se sont mises à se dégrader inexorablement.

C’est alors le lieu ici de présenter le cycle de vie des entreprises performantes tel qu’illustré dans la figure ci-dessous.


Celles-ci débutent leurs activités par une phase de lancement, suivie d’une phase de croissance plus ou moins longue où l’entreprise renforce la mise en place des ingrédients de son succès à venir (choix stratégiques, esprit d’innovation, organisation, personnel compétent et motivé, etc) (phase II). Survient alors la phase de domination du marché qui, parce qu’elle aura marqué les esprits par sa durée (Tangui) ou par son intensité (Express Union), se caractérise par ce que l’on pourrait qualifier à partir d’un certain moment « d’arrogance du leader » ou encore « complacency » (phase III).

La concurrence se réveillant enfin, survient une période au cours de laquelle les performances de notre leader commencent à laisser à désirer (phase IV). Le réflexe naturel de ce leader est alors, soit de réfuter les rapports qui mettent en évidence cette baisse de performance (rapports et études de marché erronés), soit d’attribuer cette situation exclusivement à des facteurs exogènes (concurrence déloyale, sabotages divers, etc).

Trois situations pourront alors se présenter, qui conditionneront le sens de la courbe de performance dans la phase V.

·        Dans l’idéal, notre leader tiendra compte de la réalité du marché et de ses ressources pour définir une direction stratégique claire ; ce qui, combiné à une agilité d’exécution et une forte capacité d’adaptation, permettra de redresser la situation (A).

·        A l’inverse, notre leader pourra rester rigide (voire myope) et refuser (ou se retrouver dans l’incapacité) de définir une direction stratégique cohérente et claire. La situation ne fera donc qu’empirer de manière accélérée.

·        Entre les deux se trouve une zone où les performances ne font que stagner ou se dégrader un peu plus lentement. Ici, notre leader a pu définir une direction stratégique cohérente, mais il n’est pas suffisamment agile et/ou pèche dans l’exécution. Ou alors, il est assez réactif, mais éparpille ses ressources et actions en raison de mauvais choix stratégiques.

 

Il convient, pour terminer, de préciser que le déclin d’une entreprise auparavant performante ne sera jamais causé par l’un quelconque de ces facteurs pris isolé ; mais c’est la combinaison de plusieurs failles qui créera une spirale négative avec les conséquences qui en découlent.

 

Jean-Jacques ESSOME BELL

CEO & Managing Partner chez Strategy & Analytics Consulting (SAC International)


Jovan AWOA

Data Mining Specialist

7 ans

Merci pour cet excellent article! A votre avis quelles lacunes seraient à l'origine de la perte de "26 points de marché en moins de 2 ans" de la part de CIMENCAM?

Fiston Kisudi, BS, MBA

Financial professional with a proven track record of success

7 ans

Good analyse! mes commentaires additionnels sont les suivants: les facteurs majeurs, lequels permettraient aux dites entreprises de résister sont les soucis des offres compétitives et les investissements nécessaires. L offre compétitive pousse aux analyses des coûts, études de marché et autres. Par la suite, ces études menées devront être accompagner par des investissements de rationalisation et de modernisation. c'est dernier est l un des points de blocage, p

Champrel Yann

Eventflow Sarl / BIS Security and Services/ Crypto seller

7 ans

Justement certaines entreprises ne mettent pas un accent sur la relation ou l'expérience client. Je partage cet avis de Monsieur Payong Ferdinand

Champrel Yann

Eventflow Sarl / BIS Security and Services/ Crypto seller

7 ans

bonne analyse

Ferdinand Nana Payong

Directeur chez Regie stars

7 ans

Très bon travail. Tous mes encouragements

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