Digital Day Branchet : l'interview du Dr Marc Soler 2/9

En juillet dernier, Branchet, spécialiste de l’assurance des médecins du bloc et ASSPRO (Association de Prévention et de Gestion du Risque Opératoire) ont lancé la 1ère édition du Digital Day, un concours qui récompensera les solutions e-santé les plus innovantes. Objectif ? Améliorer la pratique médicale, la relation au patient et réduire le risque opératoire. Un jury pluridisciplinaire spécialement organisé pour cette opération rassemble des experts reconnus et issus de divers horizons connexes aux enjeux des technologies de santé : experts en droit, médecins, experts des technologies, entrepreneurs etc.

Jusqu’au jour de la remise des prix, le 16 novembre 2018, nous vous partagerons les interviews des membres du jury et leur vision éclairée de la digitalisation en santé.

Après le Dr Eudes Ménager, découvrez le Dr Marc Soler, chirurgien viscéral, général, passionné de e-santé et même "early adopter" , pariétaliste, mais aussi conférencier, enseignant (DPC) en santé connectée et bloggeur.

Ressentez-vous des freins à l’implémentation Digital auprès des chirurgiens ?

M.S : Aujourd’hui, on constate un manque de « culture générale » des praticiens du bloc opératoire - et des professionnels de santé en général - qui ne sont pas du tout formés à la digitalisation. Certains praticiens sont pionniers et réalisent des projets pilotes mais ce sont des cas isolés et sur lesquels on communique peu ou pas assez.

Pour faciliter le suivi du parcours de soins par exemple, les praticiens sont encouragés à utiliser les messageries cryptées ou les applications développées par des start-up spécialisées, mais c’est encore loin d’être un réflexe pour la majorité. Certains outils digitaux très attendus comme le Dossier Médical Partagé, qui n’est pas encore opérationnel, devront permettre dans le futur d’améliorer la communication entre les différents acteurs de la prise en charge des patients. Ces freins peuvent s’expliquer, car nous n’en sommes qu’au balbutiement de la digitalisation en santé.

Cependant, nous rentrons progressivement dans une phase ou nous allons pouvoir généraliser de plus en plus l’utilisation des applications par exemple pour accompagner la coordination du parcours de soins. C’est pourquoi il est très important d’acculturer les praticiens du bloc opératoire aux « bases » du numérique et ainsi favoriser l’accueil de ces dispositifs innovants qui permettront, sur le long terme, d’optimiser le suivi du patient. 

Quel va être l’impact de la digitalisation dans le parcours de santé et quels sont les bénéfices attendus par les personnes concernées (patients, professionnels de santé, institutions…) ?

 M.S : Cela va révolutionner le suivi des patients ! Si pour le moment les praticiens du bloc opératoire ne sont pas tous enthousiastes à cette idée, les patients le sont en majorité. Les outils digitaux - type applications - entrent en ligne de compte à toutes les étapes de la prise en charge et cela améliore considérablement le sentiment de sécurité du patient :

En préopératoire, le patient relit tous les documents concernant sa pathologie et les formalités administratives pour être prêt le jour de l’intervention. Il est également mieux préparé pour le postopératoire car il a l’ensemble des informations dont il peut avoir besoin, cela le rassure. Il est moins sujet à des inquiétudes et n’appelle plus le médecin dès qu’il a un symptôme. Parallèlement, s’il constate des effets secondaires qualifiés « d’inquiétants » il sera plus réactif pour appeler son médecin. Cela est particulièrement vrai dans le cadre d’opération de courte durée, dès que le patient sort de l’hôpital il est connecté à son application. Dans l’avenir il faudrait que des applications soient mises au point pour l’ensemble des actes chirurgicaux…

La digitalisation a également un énorme impact dans le suivi du patient. A titre d’exemple, en chirurgie bariatrique, les patients doivent normalement être suivis indéfiniment… Or à ce jour il arrive fréquemment que le praticien n’arrive pas garder contact avec le patient pour diverses raisons. Il a été constaté une amélioration considérable lors de l’utilisation d’application de suivi. Un autre exemple, en pneumo-oncologie, pour les patients opérés ou traités pour un cancer du poumon, il existe une application qui est en étude de phase 3, elle a révélé une amélioration de la qualité de vie et de la survie du patient grâce à son utilisation.

Il faut également souligner que les innovations digitales vont permettre de répondre aux besoins des patients face aux déserts médicaux et à l’isolement social. Les applications peuvent permettre de créer du lien chez les patients opérés et isolés géographiquement mais aussi d’avoir accès plus facilement à un suivi médical continu. Il se sentiront moins seuls et mieux pris en charge.

Le numérique doit faire en sorte que les patients soit surveillés en continu, cela devrait permettre un diagnostic plus efficace, des consultations plus rapides et donc une prise en charge plus réactive. 

Qu’est-ce qu’une bonne innovation digitale en santé selon vous ?

M.S : C’est une innovation qui a été pensée pour la personne à qui elle est destinée. Parfois des ingénieurs médecins ont des idées géniales mais ne se sont pas renseignés sur les vrais besoins. L’innovation doit être créée en coordination avec tous les acteurs concernés (patient, médecins, coordinateurs de soins…). Et surtout, elle doit être simple, adaptée à la littératie du patient. Les « living lab » sont une bonne source de mise au point de ce type d’innovation en santé.

Je conclurais en disant qu’il s’agit pour moi d’une innovation qui s’intéresse en priorité à la prévention et qui aide le patient dans son parcours de soins.  

 Retrouvez l’article complet du Dr Marc Soler à propos du Digital Day sur : http://innovationesante.fr/un-digital-day-pour-linnovation-en-sante/