Données personnelles et TAJ : le nouveau régime prévu par le Projet de loi

Données personnelles et TAJ : le nouveau régime prévu par le Projet de loi

Le projet de loi relatif à la protection des données personnelles, actuellement en discussion[1] devant le Parlement précise le régime des demandes d’effacement des données personnelles figurant dans le Traitement des Antécédents Judiciaires (TAJ).

Rendues indispensables par une déclaration d’inconstitutionnalité, les modifications apportées à l'article 230-8 du Code de procédure pénale :

  • étendent le champ des personnes pouvant formuler une demande d’effacement de leurs données ;
  • conditionnent la recevabilité de la demande des personnes condamnées à l’absence de mention au bulletin n° 2 du Casier judiciaire.

Le TAJ est le fichier commun[2] aux services de police nationale et de gendarmerie qui recense des données à caractère personnel afin de faciliter la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs. Il contient des informations relatives aux personnes condamnées, à celles qui ont été mises en cause à l’occasion d’une infraction pénale et également à celles qui sont victimes d’une infraction. Il est régi par les dispositions des articles L 230-6 et suivants du Code de procédure pénale.

Les durées de conservations pouvant être très longues[3], il est prévu deux mécanismes d’effacement anticipé des données des personnes mises en cause :

  • En cas de décision de relace ou d’acquittement définitive, les données de la personne mise sont par principe effacées, sauf la faculté pour le Procureur de la République d’en prescrire le maintien avec mention dans le fichier, ce qui interdit l’exploitation des données concernées dans le cadre d’enquêtes administratives.
  • En cas de décision de non-lieu ou de classement sans suite fondée sur une insuffisance des charges, le principe est le maintien des informations avec mention, sauf, par exception la faculté pour le Procureur de la République d’en ordonner l’effacement.

Ce dispositif a été censuré par la décision DC n° 2017-670 QPC du 27 octobre 2017 du Conseil constitutionnel qui a considéré comme portant une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée le fait de priver les personnes mises en cause autres que celles bénéficiant d’une décision de relaxe, d’acquittement, de non lieu ou de classement sans suite, de la faculté d’effacement anticipé de leurs données personnelles figurant dans le TAJ.

La déclaration d’inconstitutionnalité a été différée au 1er mai 2018, permettant ainsi au législateur de modifier ce régime, dans le contexte de la transposition en droit français du « paquet européen » des données personnelles.

Tel est l’objet de l’article 23 du projet de loi relatif à la protection des données personnelles adopté le 12 avril 2018 par l’Assemblée nationale[4].

Sur le fond, le nouveau texte étend la catégorie des personnes susceptibles de solliciter un effacement anticipé des données les concernant mais pose une condition de recevabilité de la demande. Ainsi il faut distinguer :

  • Le cas où la personne concernée bénéficie d’une décision devenue définitive de relaxe, d’acquittement, de condamnation avec dispense de peine ou dispense de mention au casier judiciaire, de non-lieu ou de classement sans suite : la demande d’effacement peut être effectuée immédiatement, mais demeure soumise à l’appréciation du Procureur de la République ;
  • Les autres cas dans lesquels la personne concernée ne peut formuler une demande d’effacement, à peine d’irrecevabilité, que lorsque ne figure plus aucune mention de nature pénale dans le bulletin n° 2 de son casier judiciaire.

Ce second cas ouvre ainsi aux personnes condamnées la possibilité de solliciter l’effacement de leurs données du TAJ, mais subordonne la recevabilité de leur demande à l’expiration d’un délai au travers de la référence à l’absence de mention au bulletin n° 2 du casier judiciaire.

Il n’y a plus de mention à ce bulletin, en principe, lorsque la condamnation est réhabilitée ou non avenue, ce qui renvoie à des délais variables selon la gravité de l’infractions (de 3 ans à compter du paiement de l’amende en cas de simple condamnation à une peine d’amende, à 10 ans après l’exécution de la peine en matière criminelle lorsqu’il y a eu récidive).

Reste que l’effacement est toujours soumis à l’appréciation du Procureur de la République et, sur recours, à celle du Président de la Chambre de l’instruction.

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[1] Adoption en nouvelle lecture par l’Assemblée Nationale le 12 avril 2018 suite à l’impossibilité pour la Commission Mixte Paritaire d’adopter un texte commun ; La discussion en séance publique devant le Sénat est prévue le 19 avril 2018.

[2] Issu du fichier STIC (Police nationale) et du fichier JUDEX (Gendarmerie)

[3] La durée de principe de conservation est de 20 ans pour les personnes majeures mises en cause et peut aller jusqu’à 40 ans (CPP, art. R 40-27).

[4] TA n° 110

 

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