DRH avec un "D" comme "Digital"
DRH avec un "D" comme "Digital"....
À l’ère des réseaux sociaux, du digital workspace, du Cloud et de l’analytique, la transformation digitale est devenue LA priorité des entreprises. Vecteur de création de nouvelles sources de revenus, de collaboration et de partage de connaissance, les outils numériques ne sont plus une option, mais une obligation.
À l'instar de l'ensemble des départements d'une entreprise, la DRH ne peut y échapper, à l'heure où les collaborateurs sont souvent en avance sur les pratiques professionnelles : ils ont adopté la mobilité et utilisent leurs propres matériels et applications au travail ; et l'émergence des nouvelles générations bouleverse un peu plus les pratiques habituelles.
Opposer DRH et CDO est un non-sens
Symbole de cette mutation, le CDO (Chief Data Officer) devient une sorte de couteau suisse, capable d'apporter quantité d'éléments de réponses aux questions des métiers, grâce à l'analyse des données de l'entreprise. Si son apport est réel - qu'il concerne la création de nouveaux produits et services, l'évolution du business model ou l'optimisation de processus existants -, de plus en plus de voix s'élèvent pour l'opposer au DRH .
Cette comparaison me paraît non seulement erronée, mais de plus dangereuse pour la cohésion de l'entreprise. De la même manière que l'adoption des ERP et du contrôle de gestion n'a pas tué le DAF, le CDO apporte aujourd'hui au DRH des armes qui vont, au contraire, lui permettre de renforcer sa contribution au développement de l'entreprise.
Sans les données, les décisions RH sont aveugles ; mais sans une vision RH à long terme permettant de les interpréter et de leur donner sens, les données sont muettes... ou pire encore déformées ! Les algorithmes qui président à l'analytique et au prédictif sont censés tenir compte de cette vision. Il est capital que le DRH n'abandonne pas ici cette responsabilité qui lui appartient en propre et aide le CDO à établir les bons critères de tri, de choix et d'interprétation des données.
La transformation numérique encourage ainsi le DRH à acquérir de nouvelles compétences. Il doit notamment prendre conscience de la richesse des nombreuses données dont il dispose. Données sur les compétences disponibles, sur les salaires, sur les plans de succession, sur les risques psychosociaux, etc. Jusqu'alors, face à ces énormes volumes d'information, le DRH était myope. Le CDO lui apporte des lunettes, voire un microscope ! L'exploitation des Big data et de l'analyse prédictive l'aide à rapprocher l'ensemble de ces données, à faire des corrélations et à anticiper certains mouvements.
Par exemple, des signaux d'alerte peuvent apparaître, lorsqu'un haut potentiel de l'entreprise vient de se marier et de déménager vers un domicile plus lointain. Si en plus il a été récemment augmenté en dessous des pratiques du marché, le CDO est rapidement capable d'évaluer le risque qu'il démissionne, en croisant les différentes données qui le concernent. Et le DRH peut, à la lecture du rapport du CDO, réduire ce risque grâce à une intervention rapide, ou prendre toute autre décision en conformité avec la stratégie de l'entreprise en général et de sa politique de GRH en particulier.
Donner un microscope aux DRH
Dans le passé, le DRH ne disposait pour tout reporting que d'une photo figée, une fois par an avec le bilan social. Aujourd'hui, non seulement il peut disposer d'analyses plus fréquentes, mais de plus, les données qu'il détient alimentent des analyses prédictives l'aidant à anticiper toute problématique. De réactif, il devient proactif.
Je n'ai donc aucun doute que le DRH sorte plus fort de cette complémentarité. Pour cela, il doit adopter une stratégie éclairée : piloter le changement et collaborer avec le CDO ; le considérer comme un partenaire, plutôt que comme un ennemi. Ce partenariat lui apportera la dimension quantitative qui viendra compléter les éléments qualitatifs qu'il a l'habitude de gérer. Je recommande aussi aux DRH de prendre une stature de partenaire, à la fois au service du business, des collaborateurs et du management.
Faire plus avec moins et se reconnecter aux réalités de l'entreprise
De manière plus générale, intégrer l'analyse de données et l'exploitation des données dans le cursus des futurs diplômés en RH serait de bon ton, à l'heure où le DRH est prié de se reconnecter aux réalités de l'entreprise . Aujourd'hui en Europe, 62 % des salariés ne s'estiment pas "très bien" gérés là... où 74 % des RH pensent l'inverse ! Une différence de perception qui résonne comme une perte de lien lorsque 69 % de ces mêmes salariés évaluent durement la fonction RH de leur entreprise. Et justement, les outils analytiques favorisent cette reconnexion.
À l'heure où l'entreprise demande à sa DRH - comme à l'ensemble de ses départements - de faire plus avec moins, l'agilité accrue offerte par les nouvelles technologies numériques est essentielle. Le plus souvent, la masse salariale est l'élément qui fait et défait les entreprises.
La piloter signifie piloter l'entreprise et sa rentabilité globale. Pour paraphraser le titre d'une émission d' Arte , on serait tenté de clamer : "Big data, real human" ! L'analytique n'est ni une recette miracle ni une baguette magique. Mais avec la bonne stratégie RH comme principe de lecture, elle donne à voir la réalité d'une situation sociale actuelle et future qu'il est aujourd'hui possible d'étudier plus facilement et à moindre coût.
En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-158034-drh-avec-un-d-comme-digital-2007031.php?p6Aqq8o3Ad9obheJ.99