Du Vous vers le Nous

La rage frissonne, elle est tapie et mes éphémères virevoltent ! Une partie de moi voudrait hurler, soulever des montagnes et réagir. L’autre est plus timorée, « tu viens de tellement loin… tout doux… la rage n’est pas la bonne émotion ! ». Si la rage n’est pas la bonne émotion : l’émotion de la résignation étouffée n’est pas plus silencieuse…

Qu’avons-nous fait de nous-même ? Capables du meilleur et du pire…

Curieuse de tout et impliquée dans rien … Nous sommes tant à vouloir agir. Mais où ? Dans quel espace ? Il y a tant de combats et tous sont tellement intriqués ! Comment faire quand on est multi curieuses et curieux avec une pensée holistique pour choisir ?

« Choisir c’est renoncer ! » Mais moi je ne veux pas renoncer… Si je ne fais aucun choix, alors toutes les options sont ouvertes ...encore possibles… et je justifie, par la même occasion, mon inaction…

«Avec vous les métis, le problème c’est que vous ne savez pas où vous habitez ! » Nous avons beaucoup ri en famille avec ce film « Tout simplement noir » . C’est tellement vrai à quel point moi métisse j’ai décidé d’arrêter de me poser cette question. Tel un rhizome, je saillis là où je me pose et je m’incruste, je m’instille … là ou ailleurs, ne sommes-nous pas tous humains ? Hormis en Asie, je suis finalement partout chez moi ! Dans maints endroits on m’a trouvé des traits de reconnaissance avec le lieu. Cela m’a beaucoup amusé, et finalement parle tellement du métissage.

Je rêve d’un monde où nous parlerions de NOUS à la place du VOUS !

Si je m’en tiens à ce que je connais : c’est-à-dire uniquement la France et le Burkina-Faso. Nous revendiquons notre liberté et d’en finir avec la France Afrique et Nous vous enjoignons de régler nos problèmes entre nous. Je pense sincèrement que depuis les indépendances il n’y a plus de VOUS qui tienne ! Nos destins sont intriqués profondément et il est temps que le voile se lève. Il n’est aucunement question de NOUS et de VOUS. Car nous sommes les blancs que nous sommes parce que nous avons vécu cette histoire commune, et nous sommes les noirs que nous sommes car nous avons traversé ces histoires ensemble. Je ne parle pas de jugement de valeur sur le bien-fondé, ou pas, de ces histoires. Je parle de vécu commun, qui nous a positionné les uns et les autres dans nos récits. « UBUNTU » :« Je suis parce que tu es. ». L’UBUNTU, le Prix Nobel de la paix Desmond Tutu le résume ainsi : « Mon humanité est entremêlée, inextricablement liée, à la tienne. Lorsque je te déshumanise, je m’inflige le même traitement inexorablement ».

Je me sens concernée par la question noire/blanche, mais cette dichotomie n’a pas plus de sens. Quand nous parlons de genres, de richesses, etc pour chacun, les mots de Desmond Tutu résonnent pareillement : « Mon humanité est entremêlée, inextricablement liée, à la tienne. Lorsque je te déshumanise, je m’inflige le même traitement inexorablement ». « Je suis parce que tu es ». Cette phase est d’autant plus belle qu’elle se conjugue à tous les temps !

Pap Ndiaye ministre de l’Éducation Nationale, symbole ou réelle opportunité de raconter l’histoire commune de la France et ses anciennes colonies dans son entièreté, afin de ne plus nous amputer d’une partie de notre histoire ? Et je parle de la méconnaissance de leurs histoires des descendants d’esclavagistes et d’esclaves, de colons et de colonisés. Quelle narration nationale allons-nous faire de notre histoire commune ? Sans aucune soumission ou culpabilité car nous sommes bien tous là. A l’ère de l’information à tout va, les extrêmes auront vite fait de s’emparer du vide laissé pour réécrire, dans leur sens, Notre Histoire.

J’ai fait mon mémoire de Coaching en 2011 sur les conflits relationnels, et je citais déjà Desmond Tutu…

"Créer un climat de confiance et de compréhension entre anciens ennemis est un défi extrêmement difficile à relever. Cependant, c’est un défi auquel il est essentiel de s’attaquer dans le processus de construction d’une paix durable. Examiner le douloureux passé, le reconnaître et le comprendre et, surtout, le transcender est globalement la meilleure façon de garantir que de tels faits ne se reproduisent plus, et ne puissent jamais se reproduire."

Alors la France n’est pas l’Afrique du Sud mais, les traces et les blessures du passé existent et doivent être pensées et racontées afin d’être enfin pansées sinon la France restera une plaie qui suintera régulièrement.

Et vous quel combat aimeriez-vous livrer ? Quels sont vos choix pour le Nous ?