ECOUTER NOS MINORITES
Le Talmud nous dit « Tu ne vois pas le monde qu’il est mais tel que tu es. ». Cette vision, éminemment systémique, me parle aujourd’hui de l’actualité récente.
Le mouvement Black Lives Matter a fait couler beaucoup d’encre et ses ondes se propagent dans nos sociétés occidentales nous invitant à laisser enfin de l’espace à ces hommes et ces femmes qui se sentent « invisibles », « inaudibles », comme non dignes d’intérêt ou pire comme des composantes sociétales à cacher. Ce mouvement de libération des minorités qui apparaît dans notre monde « extérieur » constitue, me semble-t-il, une salutaire proposition à regarder, comme un reflet, de ce qui apparait dans notre monde intérieur.
Regarder si ce qui émerge à l’extérieur de nous, se retrouve aussi à l’intérieur de nous… Car en chacun existent ces petites voix-voies, ces aspects de nous-mêmes que nous cherchons à cacher aux autres et à soi, ces traits de caractère à qui nous imposons le silence, ces aspirations auxquelles nous ne laissons pas d’espace pour s’exprimer et se réaliser. Honte, culpabilité, rejet de soi font partie de nos conflits internes et nous empêchent de profiter de la richesse de ces alternatives, du potentiel de nos différences…
Quelle voie pour cette libération ? Pour commencer la suspension de nos jugements ; regarder en face ce que nous cherchons à garder dans l’ombre, s’accorder du temps pour se questionner. La lecture de l’ouvrage Apprivoiser son ombre de Jean Monbourquette nous offre des pistes à la fois bienveillantes et concrètes pour cheminer et prendre conscience de nos conditionnements individuels et collectifs qui font perdurer ce qui nous semble bon ou mauvais « socialement ».
Pour oser (se) regarder en face, il faudra interroger nos peurs, celle du jugement de l’autre, des autres, de la mise au banc, de la déception que nous craignions de causer, des remises en question profondes que cela peut entraîner…
Il y a deux façons d’envisager cette peur de la différence (de couleur de peau, de comportements, d’envies…) : y rester collé, englué ou écouter l’information que nous offre cette peur, le signal qu’il y a quelque chose à chercher, à mettre en lumière pour que cette différence, loin d’être un problème à résoudre soit une richesse à capter.
Otto Scharmer (Théorie U) nous enseigne que les transformations extérieures ne peuvent que passer par une transformation intérieure. Aussi, je nous invite à regarder en face toutes nos minorités, intérieures comme extérieures, et par un mouvement d’acceptation consciente, leur donner une voix afin que se dessine enfin la voie de leur richesse qui profitera à tous…