Enjeux et méthodes de la transformation publique

Enjeux et méthodes de la transformation publique

Synthèse du discours d’Emmanuel Macron à la Cour des Comptes le 23 janvier 2018

Les politiques françaises sont hantées depuis longtemps par une ambition contradictoire : réduire la dépense publique et en même temps, baisser la fiscalité. Emmanuel Macron apporte dans ce discours des éléments de solutions et présente les grands axes de la transformation publique.

Enjeux

Une dépense publique qui traite les effets plutôt que les causes

Que ce soit dans les domaines de la formation, de l’emploi ou du logement par exemple, la dépense publique traite davantage aujourd’hui les symptômes des inégalités ou des inefficacités, que leurs causes profondes.

Il convient donc de mettre en œuvre une démarche de réforme profonde des politiques publiques fondée sur une logique d’investissement.

« Une révision de la structure même des politiques publiques s’impose dans les différents domaines pour redonner de l’efficacité à la dépense publique, et à terme, la réduire. »

Pour réduire la dépense publique de 60 milliards d’euros, il faut investir dans la transformation pour permettre des économies durables.

Trois facteurs clés de succès pour la transformation publique

1. La prévisibilité

Il est indispensable de donner à tous les acteurs économiques une parfaite visibilité de ce qui sera fait. En ce sens, la trajectoire de rétablissement des finances publiques tient en trois chiffres :

  • 1 point de prélèvements obligatoires en moins sur le quinquennat
  • 3 points de PIB de dépenses publiques en moins sur le quinquennat
  • 5 points de réduction de dette sur le quinquennat

 « Réduire la dépense publique est un devoir sur le plan de la justice intergénérationnelle et la condition de notre souveraineté véritable. Il en va de notre capacité à décider pour nous-même et par nous-même.

2. La sincérité budgétaire

Un pays comme la France doit donner une image fidèle de ses finances, au nom du respect de la parole donnée et du respect des électeurs. Cette confiance est nécessaire pour renforcer le pacte social qui nous lie et préparer l’avenir sur un socle solide.

3. La priorité au raisonnement par politique publique

La considération budgétaire n’est pas une fin en soi et doit être dépassée. Dans le cadre d’un budget maîtrisé, la politique publique est avant tout l’expression d’une réponse à un problème donné, à un défi posé par l’évolution du monde. L’efficacité prime la dimension strictement financière et relève de « l’hygiène démocratique ».

« La dépense publique n’est ni un bien ni un mal, c’est à ses résultats que les citoyens la jugeront. »

Méthode

Le projet : Action publique 2022

Principe

Pour chaque domaine, se doter d’une trajectoire claire de réformes dans lesquelles priment l’efficience budgétaire et l’efficacité du service rendu.

Enjeux

  • Redonner le sens et la fierté de l’action aux agents publics
  • Renouer avec la responsabilité de la fonction publique
  • Récompenser celui qui transforme
  • Evaluer justement

Moyens

La rénovation du cadre social des agents est au cœur d’ « Action publique 2022 ». La transformation publique passera par une administration plus déconcentrée, plus responsabilisée, disposant de plus de latitude d’action budgétaire, de meilleures rémunérations et de davantage de reconnaissance, donc d’évaluation.

Cette démarche sera irriguée par le fond de transformation de l’action publique, doté de 700 millions d’euros sur l’ensemble du quinquennat.

« Pour réformer, il faut accepter d’investir pour transformer les pratiques »

Calendrier

Les grandes orientations seront décidées par le Premier ministre en Comité Interministériel de la Transformation Publique (CITP), début février.

Dès lors, il sera rendu compte chaque semaine, en Conseil des Ministres, des réformes conduites, ministère par ministère, et ce jusqu’en 2022.

Les CITP seront l’occasion d’annoncer les axes de transformation et d’en décliner les mesures concrètes.

Une action guidée par deux impératifs

1. Du sens pour les citoyens

Cette démarche doit répondre aux préoccupations des Français et penser la protection à l’aune des risques contemporains (chômage, vieillesse, maladie…).

La réforme des retraites sera conduite dans le sens de la lisibilité et de la simplification des différents régimes, et sera finalisée à l’été 2019.

1/3 de l’année : c’est le temps consacré par les assemblées à voter des lois de finance et de financement de la sécurité sociale

2. La confiance envers tous les acteurs de l’action publique

  • Les gestionnaires publics. Ils bénéficieront d’une régulation budgétaire plus souple. Dans le même temps les ordonnateurs seront responsabilisés : des évolutions de la Cour de Discipline financière et budgétaire et du régime des responsabilités pour les Ministres sont envisagées.

« Il ne peut pas y avoir d’action publique efficace s’il y a une dilution des responsabilités. »

  • Les collectivités locales. Elles ne verront pas leur dotation diminuer. Pour éviter de baisser unilatéralement les dépenses, un nouvel instrument sera mis en place : la contractualisation des collectivités avec l’Etat[1]. Cette contractualisation pourra tenir compte de la situation de la collectivité (croissance démographique, indice de pauvreté…).

1,2% : c’est le taux annuel d’augmentation des dépenses locales prévu sur la mandature

  • Les acteurs de la sphère sociale. L’objectif de croissance de l’Assurance Maladie est stabilisé à 2,3%. Cet objectif inclut une politique de l’adaptation de l’offre, sous-tendu par une stratégie de prévention.

L’évaluation, un chantier indissociable de celui de la transformation

Évaluation de l’action gouvernementale

Une révision constitutionnelle est prévue pour donner au Parlement un rôle accru en matière de contrôle et d’évaluation de l’action gouvernementale. L’objectif est de limiter les débats a priori, longs et peu éclairés par la pratique, pour encourager la prise de risque, le droit à l’expérimentation et à l’innovation, tout en renforçant les pouvoirs d’évaluation et de contrôle.

« Nous vivons dans une société dans laquelle le rythme a changé. »

Le Gouvernement passe trop de temps à convaincre et pas assez à rendre compte de son action. Aussi, un temps d’évaluation annuel au premier semestre sera « ritualisé » avec une audition des ministres sur leur bilan et le programme à venir. Il leur sera demandé de rendre compte de l’exécution budgétaire, de présenter leurs résultats, tant dans l’application des lois que dans la performance des politiques publiques.

Évaluation de l’action publique

L’évaluation de l’action publique doit être amplifiée et passera par des indicateurs de qualité sur le service public et la satisfaction des usagers. L’objectif est de pouvoir réagir plus rapidement, d’identifier et de généraliser les bonnes pratiques et de valoriser les équipes performantes.

« La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. » - Art. 15 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

Le contrôle ne doit pas se diluer dans l’innovation que constitue le Big data, et par là même, les données, même en grande quantité, ne doivent pas diluer les mécanismes de responsabilité qui sont au fondement de la gestion publique.

La performance ne saurait être un tabou du service public

C’est un devoir vis-à-vis des usagers, des contribuables et des agents publics. La mesure de la performance et la définition des objectifs de politique publique passe par un travail de définition des indicateurs pour répondre à la question essentielle de l’objectif que nous assignons à l’action publique.

Le Premier ministre est chargé de dessiner un cadre d’indicateurs et de performance pour toutes les administrations. 

« Il ne s’agit pas de culture de la performance, mais de la culture du service. »

Réforme de la haute fonction publique

La haute fonction publique constitue également un des enjeux de la transformation publique. Il convient d’en faire un secteur d’attractivité pour les talents, un lieu d’excellence avec un cadre déontologique clarifiant notamment les passages du secteur public au secteur privé, et de donner des responsabilités autant que des moyens à ceux qui conduisent l’action publique.

En ce sens, la sortie de l’ENA pourra être modifiée pour tenir compte des priorités gouvernementales.



Une semaine après ce discours, le jeudi 1er février 2018, s’est tenu le premier Comité Interministériel de la Transformation Publique (CITP). Consulter le dossier de presse.


[1] Seules 319 des plus grandes communes de France, qui représentent 80% de la dépense locale, seront concernées par cet instrument



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