Et si cela avait du sens...

Et si cela avait du sens...

‘’Explosion de burn-out à l’approche des retours au boulot’’, ‘’ Détresse au travail : le nombre de burn out a doublé en un an, la crainte d'une explosion à la rentrée’’, ‘’Covid, télétravail… Les burn-out explosent à la veille d’un retour progressif au bureau’’

Les résultats du baromètre de la santé psychologique des salariés français publié par OpinionWay le 26 mai, suscitent les gros titres de la presse. En effet selon ce baromètre, 2 millions de salariés sont aujourd’hui en burn-out, soit un doublement en 1 an, et 49% des salariés sont en détresse psychologique. Le constat est encore plus sévère pour les managers, avec 58% des managers et 72% des managers de managers en détresse psychologique.

Selon les définitions médicales, la détresse psychologique est un processus durant lequel apparaissent des signes, physiques, cognitifs, émotifs et comportementaux, de stress et d’anxiété, faisant suite à un ou plusieurs événements chez une personne n'ayant pas de troubles d'ordre psychiatrique. Le burn-out correspond lui à un épuisement professionnel, qui se traduit par de la fatigue physique, émotionnelle et intellectuelle, un sentiment d’inefficacité et une dépersonnalisation, les personnes concernées devenant cyniques, distantes, froides.

La pandémie du Covid-19 et le confinement associé ont clairement été des facteurs de stress et d’anxiété pour toute la population : restriction de la liberté de mouvement et coupure du lien social avec le confinement ; incertitudes sur l’évolution et le développement du virus ; incertitudes économiques, perte d’activité, chômage partiel ; changements des rythmes avec le télétravail et l’école à la maison… Et certains ont vu leurs rythmes de travail s’intensifier, avec une augmentation de leur charge de travail, la multiplication des réunions, la difficulté à poser des limites en termes d’horaires…

Le retour à ‘’une vie normale’’ entraînera-t-il dès lors une baisse automatique du nombre de personnes en burn-out ou en détresse psychologique ? 

Je voudrais partager les enseignements d’un excellent ouvrage du philosophe Pascal Chabot, intitulé Global burn-out. Selon lui, le burn-out, c’est la maladie du trop : trop de travail, trop d’idéalisme, trop d’investissement, désir de se dépasser… Et cette maladie a des causes à la fois individuelles et sociales :

  • Au niveau individuel, il touche les personnes qui ont trop donné, sans recevoir ce dont elles avaient besoin, qui se sont oubliées et dont la contribution n’est pas reconnue. 
  • Mais c’est aussi une maladie de notre civilisation technologique qui se caractérise par la recherche permanente d’efficacité, de rendement, de mobilisation, par les dynamiques de rationalisation, financiarisation, externalisation, numérisation…, et par la marginalisation de l’humain. Le travail devient ainsi selon Chabot sans fin, c’est-à-dire sans limites et sans finalités, alors que l’homme a besoin de se réaliser, de poursuivre des buts plus hauts, de marquer son empreinte dans le monde. Le mot d’ordre c’est ‘’adaptez-vous’’; mais s’adapter ne peut pas être une fin en soi.

Au-delà des plans d’action sur la gestion des rythmes et des équilibres, dont le télétravail fait partie, ou de la mise en place de cellules d’écoute, trois pistes paraissent essentielles pour que le retour à ‘’la vie normale’’ permette de réduire significativement les niveaux de détresse psychologique et d’épuisement :

1. Clarifier la raison d’être tant au niveau collectif qu’individuel, au-delà des slogans, ce qui veut dire pouvoir répondre à :

  • au niveau collectif : pourquoi sommes-nous là ? A quoi contribuons-nous ? En quoi cela fait-il sens, pour qui, pour quoi ? 
  • et au niveau individuel : en quoi ce que je fais répond-il à mes aspirations, mes besoins et mes motivations ? En quoi cela fait-il sens pour moi ? 

2. Soutenir les dynamiques collectives et coopératives du travail pour faire œuvre commune, ce qui requiert de : 

  • mobiliser chacun autour d’objectifs et de priorités partagés et cohérents avec les raisons d’être collective et individuelle,
  • soutenir la clarification et le plein exercice des responsabilités au juste niveau,
  • ouvrir de réels espaces d’échange et de solidarité autour du travail, où partager les succès et les avancées, les questions et les difficultés, les enseignements et les marges de progression…

3. Créer les conditions d’une réelle reconnaissance, centrale dans la construction identitaire, 

  • permettre à chacun de s’épanouir et de cultiver ses talents,
  • veiller à exprimer une reconnaissance sincère combinant ‘’jugement d’utilité’’ et ‘’jugement de beauté’’ : merci pour ce que tu as fait, c’est vraiment utile et c’est du bel ouvrage,
  • aider à la gestion des équilibres, entre trop plein et vide abyssal.

Le premier confinement en mars 2020 avait fait souffler un vent d’opportunité : la crise allait permettre de faire émerger un autre monde, le monde d’après. Le deuxième confinement a eu raison de cet optimisme. Peut-être faut-il en fait chercher une troisième voie, loin des recettes toutes faites et des baguettes magiques qu’il suffirait d’agiter pour que tout change. Ces trois pistes sont un chemin sur lequel avancer et nous, coachs et conseils, avons la responsabilité d’y accompagner nos clients.

« La quête du sens n’est pas pathologique, elle est au contraire l’indice le plus certain de l’humanité de l’être humain » - Viktor Frankl

Delaunay Nathalie

Executive Coach chez Société Générale

3 ans

Merci Valérie pour ce partage et tes réflexions à partir de cet ouvrage passionnant Indispensable prise de conscience individuelle et collective pour que le sens reste LA quête essentielle !

Thierry Delaunay

Global marketing director Lactalis/Unilever

3 ans

Certainement un enjeu majeur dans ce monde "d'après" Merci Valérie pour ces pistes claires et actionables.

Gilles Bogaert

Executive Vice President Global Markets

3 ans

Excellente publication sur un sujet à la fois critique et d’actualité devant lequel nous sommes trop souvent impuissants: notre santé mentale et celle de nos équipes. Donne des clés utiles pour décrypter les signaux faibles des dépressions / burn outs et conseiller quelques approches préventives et a posteriori.

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