Et si il y avait une opportunité stratégique pour le modèle agricole breton ?
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Et si il y avait une opportunité stratégique pour le modèle agricole breton ?

Partagé entre le Finistère et Paris depuis 5 ans, j’ai envie de partager ce jour avec vous, une utopie : et si le monde agricole breton profitait de la crise actuelle de compétitivité pour engager une révolution stratégique ?

La crise de longue durée que traverse de nombreux exploitants agricoles est bien identifiée : c’est un problème de modèle économique. Les coûts de production sur le territoire, sont supérieurs au prix de marché.

Sur la question des coûts de production, il y a des choix structurels qui sont aujourd’hui autant de contraintes incompressibles : taille des exploitations, modèle du coût du travail en France. Le décalage en la matière avec les autres pays producteurs, sur un marché mondialisé est trop important pour offrir un début de solution à moyen terme.

Les professionnels, revenus des quotas, des aides européennes, en font eux même le constat amer : la solution est dans le prix de vente. Les agriculteurs producteurs, via les intermédiaires (grande distribution et industriels), sont pris en otage et il est grand temps qu’ils reprennent la main et contact avec le marché.

Évidemment, la France, ne gagnera pas la bataille du low cost pour la production agricole. J’espère que le monde agricole et les pouvoirs publics n’ont jamais seulement envisagé de la gagner cette bataille ! Ce serait une hérésie au regard de la qualité de nos terres agricoles, du savoir-faire, des cultures et de l’excellente image dont bénéficie nos productions.

Quelle bataille stratégique faut-il donc mener ?

J’entendais récemment au journal de France 2, que seul 1 consommateur sur 5 environ était prêt à payer sa viande plus cher pour un produit de qualité. Mais 1 consommateur sur 5 représente déjà des volumes très significatifs sur le marché national !

Alors, qu’en est-il d’une production premium, de viande porcine, de volaille, de lait valorisé pour le consommateur ?

Pour illustrer ce marché, je peux citer la marque de desserts et produits laitiers Marie Morin, préparée et transformée dans les Côtes d’Armor, qui propose en GMS une gamme de desserts positionné au moins à + 50% par rapport à des marques industrielles premium. Ce sont des produits de grande qualité ; la marque a mis du temps à s’installer, mais indéniablement la croissance de l’activité, son référencement chez des acteurs nationaux de la GMS et de la RHF (j’ai récemment vu leur mousse au chocolat aux côté des biscuits Michel et Augustin au wagon bar de mon TGV), démontrent la capacité du consommateur à accepter un produit plus cher, sous réserve d’une vraie différence de qualité et ceci même en GMS.

A une autre échelle, dans les tendances plus pointues, vues ici en Bretagne, on retrouve des jeunes entreprises innovantes dans la transformation ou la vente directe :

David Akpamagbo – « le Ponclet » est en train de réussir un paris fou : confectionner, à partir de collecte de lait très soigneusement sélectionné, un beurre de qualité exceptionnelle à destination de clients professionnels (très) exigeants, commercialisé à près de 30 € du kilo.

Andriy Maximov «  Meat couture » a ouvert en 2015 à Brest une boucherie delicatessen dans l’esprit de ses maîtres : Hugo Desnoyer et Yves Marie Lebourdonnec. Un concept inédit et innovant qui rend accessible au plus grand nombre ce qui était jusqu'alors réservé à une élite de chefs étoilés Michelin : une viande de qualité exceptionnelle, là aussi à un prix supérieur de 30 à 50 %.

A titre personnel, je suis convaincu, que la culture française et notre rapport à l'alimentation appelle ce marché. Loin de la culture du luxe, on reste ici sur des produits simples : des matières premières d’exception, qui restent accessibles à beaucoup d'entre nous, pour célébrer un moment particulier à partager, un plaisir typiquement français.

Les exemples d’entrepreneurs cités ici montrent qu’une génération est en train d’inventer de nouveaux modes de distributions de ces produits d’exception. Mais ces initiatives ne peuvent rattraper le retard pris en la matière. Pour inventer et structurer la filière premium (production, transformation et distribution), il faut aider et accompagner le monde agricole.

Il y a un pari à relever : que le porc et la volaille bretonne soient dans 10 ans l’équivalent du bœuf de Kobe ou de l’asado argentin, que le lait breton et les produits issus de sa transformation rivalise avec l’huile d’olive toscane en terme de notoriété et de reconnaissance. A l’évidence, cette vision offre aussi des perspectives exceptionnelles de marché à l’export.

Alors, je vous propose de contribuer à ce débat : comment peut-on agir pour aider à la construction d'une filière agricole bretonne premium structurée ?

Serge DUBREUIL

Directeur Marketing et Communication

5 ans

Bonjour, Cette problématique passionnante est au coeur de nos défis alimentaires de demain.  Une démarche de labellisation fondée sur l 'origine territoriale couplée à des exigences qualitatives très élevées en amont (sourcing et qualité des matières premières) puis sur l 'ensemble des processus d'élaboration  pourrait être une piste de réponse . La fédération d'énergies permettrait de décupler des initiatives formidables, courageuses et audacieuses , mais parfois handicapées par un manque de visibilité. Cette démarche pourrait être portée sur une large partie de la séquence client (branding sur les produits /services concernés , tout en respectant les identités visuelles spécifiques des opérateurs ; communication originale en amont s'appuyant sur une véritable USP , naturellement implicante et différenciante avec un choix très précis et "mesurables" de techniques de diffusion en aval ....). Naturellement je n'ai décrit ici que quelques embryons de cette piste.

Julien LE CALVEZ

Directeur général chez VITALAC | Stratégie d'entreprise, développement commercial

8 ans

Vive le libéralisme et les entreprises indépendantes, le système coopératif montre une fois de plus ses limites, les éleveurs indépendants avec du lien au sol, de la technicité s en sorte et certains avec brio! Mais ils font moins de bruit.

Une génération se positionne sur ces marchés, des individualités apparaissent, signe que tous n'attendent pas une réponse venue d'en haut...Il y aura forcément de l'écrémage, mais c'est une des options de sortie de crise. Les coopératives de transformation doivent être le moteur de cette démarche pour qu'un maximum d'agriculteurs suivent le mouvement.

Pas une utopie, le début d'une autre vision mais il faut reconnaître que cela nécessite une énergie collective intense pour convaincre et déployer ce nouveau modèle...chacun(e) à son niveau... A nous de jouer !

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