Evolution du transport aérien après Covid -et autres-

Evolution du transport aérien après Covid -et autres-

J’ai participé à ce forum Ville & Aéroport, une association nationale d’élus, le 4 mars à Paris (en présentiel uniquement). La raison d’être de cette organisation est de rechercher le bon équilibre entre l’activité de l’aéroport qui fournit des emplois et celle qui crée des nuisances sonores (les nuisances liées aux particules devront faire l’objet de travaux et non de pétitions de principe).

Il a été intéressant de constater chez les organisateurs une approche plus équilibrée, où les tenants de l’activité créatrice d’emplois locaux se sont manifestés. Il est un fait que la Covid a détruit des emplois et que cette mauvaise nouvelle est arrivée aux oreilles de nombreux élus locaux et les aura fortement inquiétés.

On aura certes entendu la classique musique contre l’exemption de taxes sur le carburant utilisé dans les vols internationaux, la volonté de sortir du « système » (illustré via le dossier abracadabrantesque du nouvel aéroport de Nantes), l’aviation coupable d’être lente à s’adapter à la norme nouvelle alors que la voiture serait propre en 2030, l’avion électrique considéré comme la panacée etc. mais cette petite musique délétère aura vite laissé place à des interventions sur le fond :

On aura en particulier apprécié l’intervention du GIFAS sur l’implication massive des industriels français pour faire face aux défis de décarbonation, et celle de SAFRAN qui parviendra peut-être à réaliser, grâce aux progrès accomplis depuis, l’Open rotor auquel on pensait déjà en termes de consommations il y a 40 ans maintenant mais qui butait sur des obstacles technologiques alors insurmontables, en particulier en matière de bruit. Elles montrent l’une et l’autre que ni le bruit ni la carbonation ne sont une fatalité quand on se met en ordre de marche.

On aura noté les interventions très concrètes des représentants de ces métiers de l’aérien bousculés par la crise et les nombreux emplois perdus et encore en danger.

Il est toujours utile d’entendre et réentendre, via leurs représentants, l’exaspération de populations vivant dans les cônes de bruit quand ils voient que le transport aérien continue de croitre, et que sur certains aéroports, le bruit est continu sur l’ensemble de la journée et métastase parfois en début et fin de nuit.

A cet égard la table ronde sur l’évolution du trafic, si elle aura apporté de bonnes nouvelles à ceux qui attendent richesse économique et emplois, aura sans doute peiné les anti-bruit, qui ont vécu deux années paisibles avec la quasi fermeture des aéroports.

Intervenant à cette table ronde, je m’y suis personnellement hasardé à prévoir, sur la base de l’expérience et des études portant sur l’élasticité de la demande à la richesse par habitant, que, sous réserve que ces crises ne s’installent pas durablement, tant la Covid que la guerre en Ukraine ne laisseraient pas de trace sur la croissance du trafic, tout juste un léger décalage dans le temps de la croissance mondiale (avec un impact structurel toutefois concernant les voyages d’affaires).

J’ai avancé aussi sur base du concept de « propension à voyager » que de la même manière que les arbres ne montent pas au ciel, la fin de la croissance du transport aérien peut être établie assez précisément.

Par contre je me suis permis de jeter un grand doute sur la croissance à long terme au cas où la décarbonation devrait être radicale, c’est-à-dire que l’énergie nécessaire, non seulement aux transports mais à l’ensemble de l’économie (je citais à titre illustratif l’obligation de produire aussi de l’aluminium et de l’acier propre) devrait être obtenue via les seules sources d’énergie durables. En ce cas j’ai avancé que le coût de cette transition était susceptible d’éliminer tous les surplus de production. Par voie de conséquence le tourisme, bien de consommation accessoire, serait parmi les premiers secteurs économiques à souffrir de l’arbitrage des ménages, avec un effet immédiat sur le transport aérien qui dépend, comme on le sait, presque exclusivement du tourisme.

En -désagréable- boutade de conclusion, j’avançais que dans les Ville Aéroports on pourrait enfin envisager de vivre tranquille dans le silence des avions, mais qu’avec la chute libre des emplois locaux le niveau de vie y serait plus affecté encore que partout ailleurs : très appauvri donc, mais au calme…

Comme toujours dans ce genre de forum le temps aura manqué pour discuter des propositions concrètes. A cet égard il est clairement ressorti en conclusion le besoin d’un état stratège qui prendrait des positions efficaces. En France, l’état stratège est aux abonnés absents depuis bien longtemps et persiste : ce n’est certainement pas avec des mesures vexatoires (suspension sine die du T4 à Roissy, abandon de Notre Dame Des Landes, fermeture de la ligne aérienne Bordeaux - Orly etc.) et encore moins une réglementation punitive sur la capacité aéroportuaire qu’on répondra aux attentes légitimes des riverains.

Nicolas Zveguintzoff : merci pour cette restitution exacte !

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