Expertise INSERM 2019: Une nouvelle donne pour le sport santé dans les maladies chroniques
La publication de l’Expertise collective INSERM le 14 février 2019 sur la prévention et le traitement des maladies chroniques a été un moment important pour celles et ceux qui s’intéressent au sport santé. Les 14 experts de différentes disciplines dont j'ai eu l'honneur de faire partie ont suivi une démarche rigoureuse établie par l’INSERM pour faire un état des données de la science et proposer des recommandations. Nous avons analysé 1600 publications scientifiques et auditionné 7 personnalités françaises. Ce travail de 3 ans a donné lieu à un deux ouvrages, un document complet de 814 pages et une synthèse de 124 pages disponibles en format papier ou numérique téléchargeable en ligne.
Prévenir la sédentarité
L’expertise collective INSERM réaffirme pour les personnes malades chroniques les conclusions et les recommandations de l’Expertise 2009 sur l’importance de l’activité physique dans la lutte contre la sédentarité et l’amélioration de la participation sociale. Prendre les escaliers plutôt que l’ascenseur, se déplacer autrement qu’en véhicule motorisé, jardiner, danser, se lever régulièrement de sa chaise, en bref, bouger plus et limiter au maximum le temps passé assis ou allongé en journée sont des moyens essentiels pour prévenir les effets délétères de la sédentarité sur la santé. Ce facteur de risque de maladie et de mort prématurée se situe quasiment au niveau de celui du plus élevé, le tabagisme. Il est lié au mode de vie moderne. Il relève d’un processus biopsychologique systémique nommé le cercle vicieux du déconditionnement. Ce dernier touche plus durement les 20 millions de français fragilisés par une malade chronique nouvellement diagnostiquée, et plus gravement encore lorsque la maladie est avancée. Mettre tout en œuvre pour faciliter la mobilité active des personnes malades chroniques, par l’aménagement de lieux adaptés, par une meilleure accessibilité des espaces publics et sportifs, par l’innovation technologique et par la promotion des bénéfices sur la santé d’une activité physique régulière est devenue une priorité pour la population française vieillissante s’exposant de plus en plus aux maladies chroniques.
Soigner des maladies chroniques en compléments d’autres traitements
Dans les maladies chroniques choisies dans l’expertise parmi lesquelles les maladies cardiaques, les cancers, les maladies respiratoires, les maladies articulaires, les diabètes, les accidents vasculaires cérébraux, les dépressions, les experts concluent que les preuves sont assez nombreuses et solides pour affirmer que des programmes d’activités physiques adaptés prescrits par des médecins, personnalisés et suivis par des professionnels formés et ajustés aux préférences et au mode de vie des patients ont une efficacité sur l’amélioration de la qualité de vie, sur la réduction des symptômes spécifiques, sur la prévention de nouvelles pathologies et sur la réduction des hospitalisations non programmées. Ces programmes spécifiques ne viennent pas en opposition aux traitements biotechnologiques autorisés (chirurgies, médicaments, dispositifs médicaux…), ils les complètent. Dans certains cas, comme les cancers, ils les potentialisent (acte préparatoire à une chirurgie, diminution des toxicités des chimiothérapies). Dans d’autres, des études montrent des effets significatifs sur la durée de vie (31% de réduction de la mortalité prématurée dans la broncho-pneumopathie chronique obstructive qui touche 1,5 million de français par exemple), sur la prévention des risques de récidive (-38% dans le cancer du sein et du colon par exemple). Ces programmes validés et améliorés continuellement par la science entrent ainsi dans le domaine des interventions non médicamenteuses.
Guérir des maladies chroniques
Fait nouveau, les experts indiquent que des programmes d’activités physiques spécifiques guérissent quatre maladies à un stade précoce, le diabète de type 2, l’obésité, l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs et les troubles dépressifs légers à modérés. Pour cette dernière, le taux de 41% de rémission après un programme de 3 mois supervisé est équivalent à celui des antidépresseurs et des thérapies cognitivo-comportementales dans les dépressions légères à modérées.
Conclusion
Comme pour le tabac il y a quelques années, on ne pourra plus dire avec cette expertise collective INSERM que l’on ne savait pas ce qu’il fallait faire. L’expertise 2019 donne les bases scientifiques de la prescription, de la conception et de la planification des programmes d’activités physiques pour les patients malades chroniques. Reste la mise en œuvre systématique dès l’annonce de la maladie et ensuite tout au long du parcours de santé, mais ce n’est plus une question de science…
VP, Head of Financial Planning & Analysis at Idorsia Pharmaceuticals Ltd | MScM
5 ansSebastien Pascal