Fiche de lecture pour Canal+images du film "Je me sens pas belle" de Bernard Jeanjeanpour Canal +

La comédie de Bernard Jeanjean: "Je me sens pas belle". Un très bon film à voir ou revoir.


Genre : Comédie sentimentale

Epoque : Contemporaine

Lieu : Paris

Chance de succès en salle : Bonne

Programmation TV : Prime-Time


Pitch

Fanny, une jeune trentenaire a invité Paul un garçon qu’elle a rencontré sur son lieu de travail. Passé les préparatifs alors que le garçon tant attendu débarque enfin dans l’antre de la célibataire, Fanny faillit et se met à douter de tout : De l’intérêt qu’elle porte au garçon… De l’intérêt qu’il lui porte… De l’intérêt de coucher ou non avec lui et surtout de l’intérêt de s’attacher à lui plus qu’elle ne devrait... Mais passé les doutes, viennent les moments plus tendres qui l’obligent à convenir que Paul est vraiment un homme intéressant…

Avis général : Très favorable

Une comédie sentimentale sans prétention mais qui offre de vrais bons moments grâce à son traitement dynamique et moderne. Les personnages sont très pertinents et font preuves d’un réalisme truculent qui fait sourire, rire et qui arrive même par moment à émouvoir. Plein de tendresse et de justesse, il ne fait aucun doute que ce projet. avec un bon casting, trouvera un vrai public qui, s’il n’est pas très nombreux au départ s’élargira rapidement grâce au bouche à oreille…

Résumé

Fanny, un jeune trentenaire en quête d’aventure sentimentale, est sur le branle bas de combat : Ce soir, elle reçoit Paul Prosec, un garçon rencontré dans le cadre de son travail avec lequel elle a particulièrement sympathisé… A peine revenue des courses, la jeune femme commence les préparatifs tout en écoutant son répondeur… 

Le premier appel est de Corinne, une amie qui lui avoue avoir perdu la recette qu’elle devait lui donner pour le soir même… La soirée commence bien… Dépitée, Fanny se retrouve donc avec son gros poisson sans savoir comment l’accommoder… Le deuxième appel continue de la démoraliser : Serge un homme marié qu’elle a invité quelques jours auparavant, lui demande s’il n’a pas laissé son alliance chez elle. Ecœurée par la situation, Fanny se promet de ne plus le revoir, quand un dernier appel finit de la perturber : Paul lui annonce qu’il arrivera avec une demi-heure d’avance au rendez-vous. 

Panique à bord, Fanny se lance avec frénésie dans un gros ménage puis se prépare en quatrième vitesse. Particulièrement optimiste quant à l’issue de la rencontre, la jeune femme enfile un petit slip brésilien qu’elle vient d’acheter et cache des préservatifs dans différents endroits stratégiques de l’appartement… Mais Paul a du retard. Dépitée, tout l’élan optimiste de la jeune femme retombe et les doutes s’installent…

Lorsque Paul arrive enfin, Fanny qui tient à garder certaines distances, prend un air détaché et lui annonce dans un mensonge improvisé que le repas a brûlé et qu’il vaut mieux aller manger dehors. Paul, juste avant de sortir l’invite à écouter un disque de New-wave qu’une amie vient de lui offrir. Un peu jalouse, Fanny lui propose de l’écouter plus tard, après le repas. Paul lui annonce alors qu’il ne peut pas rester trop longtemps car son train l’attend en fin de soirée. C’est ainsi que la jeune femme apprend qu’il a prévu de dormir ce soir chez sa sœur à Mantes la Jolie… Tout de même désireuse de passer un petit temps avec lui et chez elle, elle lui offre un deuxième verre.

Mais quand Paul lui explique qu’à Rennes (son lieu de résidence) il vit avec un "Jean-Pierre", Fanny a de nouveau de gros doutes… Qui semblent se confirmer lorsque le jeune homme se met à danser frénétiquement sur le disque de New-wave qu’on lui a offert. Paul, qui comprend le quiproquo, explique clairement à Fanny qu’il n’est pas homo. Soulagé Fanny commence à vraiment s’intéresser au garçon quand celui-ci reçoit un coup de téléphone de sa sœur Sylvie en pleine crise de nerfs parce qu’elle croit que son mari la trompe avec une autre. 

Paul décide d’abréger la soirée et d’aller calmer sa sœur. Fanny qui ne veut pas laisser filer le jeune homme aussi vite tâche le pantalon du garçon avec du vin, part le laver dans la salle de bain et lui prend son porte-feuille… Quelques minutes après qu’il ait quitté l’appartement de Fanny, Paul découvre qu’il a "perdu" son porte-feuille et revient chez la jeune femme. Fanny qui a fait tomber l’objet dans la cuvette des toilettes, s’excuse du désagrément et lui rend tout en lui expliquant qu’il devrait plutôt laisser sa sœur un peu seule pour qu’elle puisse réfléchir.

Paul qui est très vite convaincu par les arguments de Fanny décide de reste. La jeune femme lui propose une pizza tout en calculant dans sa tête le temps qu’il faudra pour manger et le temps que ça les laissera pour faire l’amour. Toute émoustillée par ses calculs, Fanny dévore son repas et décide d’enclencher la vitesse supérieure : elle enlève son string et dévoile dans un malencontreux accident la partie la plus intime de sa plastique… Paul qui comprend le message décide d’attaquer. Mais Fanny un peu mal à l’aise se rétracte d’autant qu’elle trouve le garçon de plus en plus charmant et qu’elle à un peu peur du sentiment étrange qui l’assaille. 

Paul pour détendre l’atmosphère lui fait une chorégraphie de danse. En échange, Fanny lui chante une des chansons qu’elle écrit dans ses heures perdues. Le moment est assez tendre. Paul profite du relâchement pour réattaquer. Mais la jeune femme se referme in-extremis. Serge qui téléphone dans la foulée et qui annonce qu’il est en bas de l’immeuble de la jeune femme, finit de casser l’ambiance… Paul "stand-by"… Elle file dans les toilettes et remet un slip.

Malgré l’assaut raté, les deux jeunes gens finissent par se rapprocher à nouveau. Paul est étonné de découvrir que la jeune femme porte en fait un slip. Fanny très gênée à l’idée de montrer son corps, impose au garçon de mettre un bandeau sur les yeux puis le refroidit complètement en lui expliquant qu’elle a ses règles. Dans le malaise, ils décident de rester copains. Paul part dormir sur le canapé du salon et laisse Fanny dans sa chambre. 

Quelques minutes plus tard, Fanny surprend une conversation de Paul au téléphone avec sa sœur à qui il explique qu’il est avec une fille compliquée qui lui a fait le coup du portefeuille pour rester. Fanny provoque une discussion. Paul l’accuse de mentir sans arrêt. La jeune femme avoue qu’elle n’a pas ses règles… Après le moment de tension, ils se relâchent et font l’amour. L’histoire entre eux peut enfin commencer…

CRITIQUE

On imagine sans peine à la lecture de "J’me sens pas belle" le plaisir du futur spectateur. Bien que le sujet ne soit pas d’une originalité folle, le traitement qui en est fait est si fluide et si vrai qu’il permet sans aucune difficulté de faire décoller l’histoire vers de la très haute qualité. Et pourtant, le pari n’était pas si évident. Car souvent les "comédies romantiques" tombent dans la mièvrerie désuète ou dévoilent des personnages au conformisme lisse et agaçant. Là, le travail de Jeanjean se fait tout en finesse et apporte une franche modernité au genre, qui rappelle par certains cotés tout ce que l’on peut adorer dans une série comme "Sex and the city" (le strass en moins). 

Le personnage de Fanny est très dynamique et sa psyché nous apparaît comme particulièrement pertinente et réaliste. Le scénariste a parfaitement su saisir les attentes et les peurs des femmes face à un premier rendez-vous. On sourit beaucoup de la préparation de la jeune femme et c’est avec beaucoup de plaisir que l’on découvre que cette préparation a des incidences directes sur la suite des événements... Je pense en particulier à l’histoire du string qui rebondit régulièrement dans le récit et qui se transforme au fur et à mesure des états d’âme de Fanny en "rien" ou en culotte…Ce petit détail est très bien exploité et sert parfaitement à la caractérisation du personnage dont on comprend sans mal les ressorts et les enjeux psychologiques.

De même l’histoire de la capote, qui est un peu plus grossièrement installée mais qui fonctionne tout de même assez bien.

Le scénariste a eu par ailleurs, l’intelligence de faire de son personnage féminin un être en questionnement (tout comme dans la série "Sex & the city") plutôt qu’un être en attente de… (comme c’est le cas par exemple dans "Bridget" où l’héroïne veut grosso modo se marier et construire une famille donc n'est obsédée que par ça…). 

Ce regard sur les femmes, très moderne, permet d’ouvrir l’identification au personnage à tout un public féminin souvent oublié dans la comédie romantique : les célibataires heureuses ou sans désir d'enfant. Car il est finalement assez rare dans ce genre cinématographique que l’héroïne ne soit pas sur que de vivre en couple soit mieux que de vivre seul (cf scène de la chanson) ou encore qu’elle n’ait pas forcément de désir d’enfant…

En ce sens, on peut dire que le scénariste a travaillé son personnage avec intelligence puisqu’il n’a pas inscrit la féminité dans le cadre classique de la maternité et du mariage… Et même si, son héroïne souffre d’une certaine solitude, elle n’est pas pour autant assujettie à la norme et aux mythes féminins habituels … 

Le personnage de Paul, un peu plus en retrait dans l’histoire, n’en demeure pas moins lui aussi, intéressant. Non seulement son discours fonctionne parfaitement avec celui de Fanny mais en plus, il porte au personnage féminin un respect (quasi pédagogique) qu’il est intéressant de noter et qui ne peut que créditer le scénario d’une dimension progressiste… 

Et même si de temps en temps, les dialogues le font déraper dans une forme de brutalité psychologique vis à vis du personnage féminin (lorsqu’il lui dit par exemple "A ce prix là, je te fais l’amour aussi"), la "violence" ne va pas de soi et se trouve toujours justifiée (ici par exemple, on le devine plus brutal parce que Fanny s’est faite femme fatale et l’utilise d’une certaine manière objet pour repousser Serge). 

Dans le récit rien n’est gratuit. Chaque élément semble avoir été pesé avec intelligence et fraicheur. Quand Paul annonce qu’il n’est pas homo, on ne sent pas chez lui de rigidité sur le sujet. Bien au contraire, il avoue sans complexe avoir eu des expériences mais ne pas avoir donné suite. Le propos reste très libre et délicatement amené, sans jugement de valeur. En quelque sorte Paul est un prince charmant très contemporain qui n’a pas peur de la féminité. Et même s’il fait perdurer le mythe du prince charmant (qui n’est pas très bon pour la santé mentale des jeunes filles fragiles mais fort heureusement Fanny s’oppose quelque peu à ce mythe en expliquant qu’elle ne croit plus à l’homme d’une vie), il n’en reste pas moins intéressant puisqu’il amène de nouvelles donnes à la figure de l’homme idéal.

Ce couple positif véhicule des valeurs très modernes qui, sans bousculer les traditions (nous avons tout de même affaire ici à un couple normé d’hétérosexuels qui travaillent et qui consomment IKEA !), apporte à leur manière un regard pertinent sur le monde… 

Il ne fait donc aucun doute que cette comédie romantique réaliste est à soutenir. Elle ne comporte aucune fausse note, tant sur le traitement que sur la construction qui est très équilibrée et fluide. 

Un beau travail d’écriture d’autant plus réussit que les dialogues pourtant simples et sans prétention savent faire mouche quand il faut pour relancer la dynamique du récit et enrichir le travail d’ensemble…

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