Filière résineuse: Ne faudrait-il pas changer de paradigme?


Sous prétexte de déficit et de compétitivité de la filière bois, on a engagé de façon assez uniforme la forêt résineuse dans un processus industriel de première transformation calqué sur un schéma Nordique. Or, la France n'en posséde ni le climat, ni les autres facteurs qui caractérisent ce modèle. En effet, la relative homogénéité des conditions Scandinaves: Faible longueur de la saison de végétation, conditions climatiques rigoureuses, induisent sur un ou plusieurs siècles, la production de bois de haute qualité... mais de petits et moyens diamètres. Par ailleurs, ces spécificités permettent de travailler plusieurs mois de l'année sur des sols rendus solides par le gel. A l'inverse, notre climat "booste" la production et alterne les périodes sèches et humides sur des sols de toutes textures sans qu'il y ait vraiment de moments "fastes"pour l'exploitation dans la plupart des massifs... à l'exception peut être du massif Landais?

En conséquence, nos entreprises d'exploitation forestière maintenant hautement mécanisées, dépendantes des contraintes des industries...et des banques à qui elles ont emprunté, n'ont pas le choix, ni le bénéfice de périodes vraiment propices pour intervenir. Aussi, en gardant un rythme de travail constant, elles provoquent régulièrement des atteintes au sol, à l'eau et aux biens publics pour le plus grand mécontentement des propriétaires forestiers, des riverains, des mairies et de de tous les amoureux de la nature en général.

Par ailleurs, le besoin en petits bois des installations de sciage résineux modernes, outre la programmation tendue qu'elles imposent, entraîne les forestiers à mettre en place une sylviculture à courtes rotations d'ou est exclue toute recherche de biodiversité, au risque d'affaiblir ainsi les équilibres naturels. Lié à ce modèle, la rationalisation implique des méthodes radicales de "destruction" (récolte par coupe rase uniquement) "reconstruction" (reboisement artificiel) consommatrices d'énergie et de d'argent.

Or, je le martèle, le premier argent gagné est celui qui n'est pas dépensé. Aussi, ne serait il pas plus judicieux de repenser ce modèle unique et de jouir des atouts de nos conditions climatiques? Le conserver là ou il réuni le maximum d'intérêts et de garanties et le changer partout ou il pose constamment problème. Là, on exploiterait des arbres à maturité, de qualité, issus de peuplements qui auraient eu le temps de favoriser l'installation d'une certaine biodiversité et le fonctionnement optimal des écosystèmes, tout en étant capables de se régénérer naturellement, au moins pour partie.

Evidemment, cela suppose de revenir à une autre forme de transformation (gros bois) et à une exploitation moins impactante... et sans doute à un autre partage des revenus entre les acteurs de la filière? Dans cette optique, le temps nécessaire à la maturation aura favorisé la préservation des écosystèmes, le stockage d'un maximum de CO2, la diminution des besoins en énergie pour une mobilisation et un renouvellement moins perturbants, ainsi qu'une meilleure rotation du capital. Personnellement, je suis persuadé qu'une meilleure acceptation de la gestion forestière par la société ne peut vraiment passer que par un retour à plus de naturalité.

B PALLUET

Gilles Lefrançois

Arpète Sylviculteur, quoi que...

6 ans

Dans les Pyrénées nous avons encore des scieurs de gros bois. Un des soucis du gros bois, que faisons nous des sur billes et pointes noueuses ?

Merci de vos commentaires. Je sais que nombre de personnes de la filière partagent tout ou partie des points de vue que j'exprime, mais les approuver reviendrait à se mettre en difficulté dans leur vie professionnelle ou relationnelle. Si j'étais pessimiste, je dirais que je crains, comme il arrive bien souvent dans nos systèmes , que ce ne soit qu'après grippage et obligation de sauter que l'on se décide enfin à voir les choses autrement. Mais comme je suis un incorrigible optimiste, je sais qu'à l'instar du petit coin que l'on enfonce dans le granit, provoquant un début de fissure, puis petit à petit la séparation en deux du bloc initial, un retour à plus de raison s'opérera. A ma modeste échelle, j'ai déjà constaté au cours de ma vie professionnelle ce phénomène sur d'autres thèmes concernant la régénération naturelle, les mélanges d'essence, la préservation de la biodiversité existante etc... Insensiblement un certain nombre des "opposants" initiaux ont fini par modifier leurs approches et leurs pratiques.. Il faut que la maturation fasse son oeuvre.

Jacques Hazera

Expert forestier indépendant (2010) – Expert de Justice (2018)

6 ans

Je suis en "symbiose" (!) avec votre point de vue ! Vous martelez des idées de bon sens ; j'en martèle de mon côté aussi ; beaucoup d'autres personnes le font et... malgré tout, ça ne suffit pas. Alors martelons ensemble, organisons des virées de martelage ! Essayons de faire du volume ! En tous cas, bravo pour cette approche simple et évidente !

Maurice Chalayer

Laboratoire d'idées développement des scieries chez Observatoire métier scierie

6 ans

Bravo Bernard et un GPS (Grand Bon Sens) dans votre esprit. Tout est dit pour.

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