(FX Hebdo du 14-20 décembre) - Une volatilité (encore et toujours) influencée par le vaccin & le Brexit

(FX Hebdo du 14-20 décembre) - Une volatilité (encore et toujours) influencée par le vaccin & le Brexit

Le Brexit reste encore et toujours le principal point d'incertitude qui agite la nervosité des marchés financiers sur cette fin d'année. Sinon, on observe très peu de changements sinon une volatilité toujours gorgée de l'enthousiasme porté par les espoirs autour d'un vaccin et des premières campagnes de vaccination qui ont débuté au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Si l'horizon apparaît rassurant, la vigueur toujours importante de la pandémie dans le monde sonne parfois comme un rappel que la reprise de l'économie mondiale pourrait rester heurtée sur le début d'année prochaine.

Le Brexit joue (encore) les prolongations         

Britanniques et européens s’étaient donné jusqu’à dimanche dernier pour trouver un accord, et c’est finalement sans surprise que les deux camps ont opté pour une nouvelle prolongation faute d’accord commercial trouvé. Les plus optimistes y verront un signe d’espoir qu’aucune des deux parties ne souhaite réellement quitter la table des négociations pour le moment sans s’être assuré que tout a été tenté pour trouver un compromis. Au-delà de cet optimisme général, on ne peut que constater l’absence d’avancées majeures dans la dernière ligne droite des négociations sur les deux principaux points d’achoppement qui bloquent depuis des semaines la conclusion d’un compromis, à savoir la pêche et l’encadrement des subventions publiques. À ce stade, on voit difficilement comment une entente peut éclore si aucun des deux n’accepte de faire des concessions majeures. Face aux mouvements de contestation sociale qui montent depuis des mois dans le pays, la France a fait un point d’honneur à défendre le secteur de la pêche, quand bien même si celui pèse moins de 1% de son PIB et de ses emplois. Elle n’hésitera pas à apposer son véto si jamais l’accord est jugé trop défavorable. Pour les responsables britanniques, il est difficile idéologiquement de commencer à rogner la souveraineté acquise grâce au Brexit. Par ailleurs, Bruxelles pousse pour mettre en place un outil de protection juridique afin d’éviter de subir la concurrence déloyale de politiques d’aides publiques et/ou dérégulation que les partisans du Brexit ont largement promu durant la campagne du référendum de 2016 à travers le projet de construire un « Singapour sur la Tamise ». Pour l’instant, ce que l’on sait c’est qu’on ne sait rien et que sur ce volet tout peut pencher dans un sens comme dans l’autre. S’il est vrai que le paramètre temps réduit au fil des jours la probabilité d’un accord final, il ne faut présager de rien sur ce feuilleton qui nous a offert depuis 4 ans de multiples rebondissements. Et pourquoi pas une nouvelle prolongation en 2021 ? Ce ne serait pas la première fois que l’on repousse les limites. Pour le moment, le temps et l’incertitude jouent en défaveur de la livre sterling, laquelle sort d’une semaine compliquée (-1,5% vs. EUR / -1,6% vs. USD) durant laquelle elle a notamment heurté (temporairement) un creux de presque 3 mois face à l’euro à plus de 0,92 £. Si la prolongation des négociations maintient l’espoir d’un dénouement heureux – les marchés veulent s’en persuader et la nervosité sur les marchés options recule d’un cran (cf. recul de la volatilité implicite 1 mois sur le taux EUR/GBP) – les acheteurs de livre sterling se montre encore très timide dans leurs prises de décision. Des signaux laissant entrevoir un accord pourraient rapidement renvoyer le taux EUR/GBP tester un seuil support de 7 mois localisé à 0,8860 £. À l’inverse, une hausse des risques de rupture des négociations pousserait la paire EUR/GBP vers la résistance située à 0,93 £.

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Données actualisées au 15 décembre 2020. Source : Reuters

Pressions sur les épaules de la Fed pour agir ?    

Une semaine environ après son homologue européenne, la banque centrale américaine (Fed) sera-t-elle, elle aussi, tentée de venir au soutien de l’économie en l’absence de réel soutien de la part des autorités politiques ? Plusieurs éléments soutiennent cette hypothèse. La plus évident est le contexte sanitaire qui s’est significativement détérioré aux Etats-Unis depuis novembre et la dernière réunion monétaire organisée par la réserve fédérale américaine. Le pays enchaîne les (tristes) records, que ce soit au niveau des cas d’infections, mais encore plus inquiétant au niveau des décès et des hospitalisations. Cette nouvelle montée des risques sanitaires arrive au plus mauvais moment et au milieu d’une période de transition entre deux gouvernances, ce qui freine la coordination d’une stratégie de lutte contre la pandémie à l’échelle nationale. Ce sont donc aux localités locales que revient la charge de mettre en place, selon leur sensibilité politique, des mesures de restrictions pour contenir l’avancée du virus en attendant de pouvoir lancer les premières campagnes de vaccination. La bonne nouvelle est tombée ce weekend, l’autorisation délivrée par les autorités américaines des médicaments (Food & Drug Administration) pour utiliser le vaccin produit par le duo américano-germanique Pfizer/BioNTech. Le feu vert pour utiliser le vaccin de l’autre laboratoire pharmaceutique Moderna pourrait tomber cette semaine ou la prochaine. Néanmoins, il risque de se passer plusieurs mois avant que le seuil d’immunité collective (50%) soit atteint et entre-temps la pandémie pourrait continuer de progresser cet hiver et de causer encore d’importants dégâts. D’ailleurs, certains s’observent déjà au niveau du marché du travail. Au mois de novembre les créations d’emploi ont enregistré leur plus faible progression en 7 mois (+245k), ce qui porte à 9,4 Mln le nombre cumulé d’emplois détruit aux Etats-Unis en 2020 en dépit du souffle de reprise observé au printemps dernier. Autre signal préoccupant visible la semaine dernière, il s’agit de la plus forte hausse enregistrée en 11 semaines des inscriptions hebdomadaires aux allocations chômage (+853k la semaine du 30 novembre). Quand on sait par ailleurs que plusieurs programmes de soutien arrivent à terme le 26 décembre et que près de 12 millions d’américains sans emploi risquent de perdre leurs aides après cette date (cf. étude réalisée par The Century Foundation), il y a une réelle urgence à intervenir pour éviter que l’économie américaine ne subisse de trop forts dommages.

La pression est donc sur les épaules des responsables américains, politiques et monétaires, pour intervenir et apporter leur soutien à l’économie. Le hic est que les négociations en cours au Congrès sur un nouveau plan de relance se heurtent à deux problèmes majeurs, à savoir des divergences bipartisanes importantes en ce qui concerne les modalités et la distribution des aides mais aussi une importante contrainte de temps à l’approche de l’échéance vendredi du vote d’une nouvelle loi de financement pour assurer le fonctionnement des agences fédérales et éviter un shutdown qui serait très préjudiciable en cette période de crise. Alors que les discussions portent actuellement sur une proposition de plan d’un montant de 908 Mds$ formulé par un groupe de travail de membres du Congrès issus des deux principales familles politiques du pays, il n’y a aucune assurance que les pourparlers aboutissent d’ici la fin de semaine. D’où une pression supplémentaire sur les épaules de la Fed pour intervenir ce mercredi sous peine sinon de devoir attendre plus d’un mois (prochaine réunion le 26 et 27 janvier 2021) et d’agir à contre-temps. Disposant de peu de marges de manœuvre au niveau de ses taux d’intérêt après les avoir réduits cette année de 150 pbs à un niveau historiquement bas (0,00-0,25%), la réserve fédérale américaine pourrait comme la BCE décider d’intervenir sur les marchés obligataires via des injections de liquidité pour faire pression sur les taux longs. Les bons du Trésor 10 ans ont progressé de 40-45ps depuis août pour atteindre un sommet depuis mars à presque 1%, suscitant au passage quelques frayeurs et interrogations sur des répercussions néfastes sur le marché de la dette et du crédit. Un prolongement des programmes de facilité de prêts pourrait être également considéré par la banque centrale pour éviter un credit crunch, ou une contraction des crédits. Alors que les effets du catalyseur « vaccin » commencent à se dissiper sur les marchés actions, de nouvelles injections de liquidités de la part de la Fed pourraient venir alimenter un nouveau rallye vers des sommets encore jamais tutoyés auparavant. Dans ce contexte, les pressions baissières sur le dollar (mais aussi sur le yen) devraient être confortées, ce qui pourrait ainsi donner l’occasion à l’EUR/USD (l’EUR/JPY) de tenter de s’aventurer au-dessus de 1,22 $ (127 ¥) ce que le taux n’a plus fait depuis avril 2018 (en 2020).

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Données actualisées au 15 décembre 2020. Source : FOMC, Reuters

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Données actualisées à décembre 2020. Source : Ministère américain du Travail, Reuters

L’Europe se reconfine à l’approche des fêtes

Il est clair que le pic de la seconde vague de contamination visible cet automne en Europe est derrière, néanmoins ce n’est pas pour autant que les risques sanitaires ont disparu dans la région. Pour preuve, face à la persistance de la pandémie à l’approche des fêtes de fin d’année, période propice aux rencontres familiales, plusieurs pays européens viennent de décider de durcir les restrictions sanitaires. C’est le cas de l’Allemagne et des Pays-Bas qui décident de resserrer la vis et d’instaurer un nouveau confinement jusqu’à mi-janvier. La Suisse a également adopté vendredi dernier de nouvelles restrictions plus strict tandis qu’en France, en Italie et en Espagne on a opté pour un couvre-feu sur cette fin d’année. Comme on a déjà pu l’observer tout au long de l’année, ces mesures de santé publique ne sont pas sans répercussions sur l’économie. Alors qu’une nouvelle contraction est attendue au T4 (estimation de -2,2% par la Banque Centrale Européenne), la performance sur le début d’année prochaine pourrait être aussi impactée (estimation de +0,6%). Cela dépendra bien sûr du rythme de déploiement et de l’efficacité des campagnes de vaccination mais pour l’heure les prévisions de croissance pour 2021 sont désormais bien moins optimistes qu’il y a encore quelques mois. C’est le cas de l’OCDE qui en décembre a révisé ses projections de PIB en Zone Euro pour 2021 de 5,1% à 3,6%, mais aussi de la BCE qui dans ses dernières estimations publiées la semaine dernière table sur un rebond de 3,9% de l’économie européenne contre 5% anticipé en septembre. Quand bien même si la reprise qui s’annonce à l’horizon pourrait s’avérer plus heurtée qu’initialement prévu, ou même encore qu’une vague de défaillances d’entreprise menace de s’abattre l’année prochaine en Europe, les investisseurs gardent une grande foi en l’euro. Seule finalement la paire EUR/CHF apparaît sensible au contexte européen qui se veut plus contrasté que le sous-entend la valorisation actuelle de l’EUR/USD. Le taux EUR/CHF se maintient pour l’heure au centre de la fourchette du couloir de 1,0670-1 ,0870 ₣ dans lequel il est installé depuis 5 mois. Il reste par ailleurs également très lié au sort du Brexit, le franc restant la valeur refuge par excellence utilisée par les investisseurs européens pour se protéger d’éventuelles turbulences de marché dans la région.

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Données actualisées au 15 décembre 2020. Source : Reuters 

Le vaccin dope les prix des matières premières

L’accélération récente des progrès autour d’un premier vaccin contre le COVID qui a conduit au lancement ce mois-ci des premières campagnes de vaccination au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et bientôt au Canada a eu un impact très bénéfique sur le cours des matières premières. Les marchés y voient là un facteur décisif qui devrait véritablement enclencher une dynamique de reprise soutenue de l’économie mondiale, et plus particulièrement de l’activité industrielle. Ce sentiment est d’autant plus fort que le secteur a montré d’importants signes de résilience et a su maintenir une solide dynamique d’activité en novembre en Zone Euro et aux Etats-Unis malgré le retour de la pandémie et des restrictions sanitaires. Résultat, on observe une flambée des prix des métaux industriels et de l’énergie depuis le mois dernier, et tout particulièrement pour les métaux depuis décembre. Ainsi, le prix du minerai de fer côté en Chine a bondi de plus de 20% ce mois-ci pour atteindre un pic de 7 ans. Le prix du cuivre tutoie de tels sommets tandis que le cours de l’aluminium côté à Shanghai est proche de ses plus hauts niveaux depuis 3 ans. Le pétrole poursuit son ascension et s’échange en Europe (indice Brent) à 50 $, ou ses plus hauts niveaux depuis plus de 9 mois. Les devises de pays exportateurs de matière premières sont très sensibles à cette hausse significative des prix. C’est notamment le cas du dollar australien que l’on a vu osciller sur ce début de semaine tout proche de ses plus hauts niveaux de l’année face à l’euro à moins de 1,61 A$. Le peso chilien, le réal brésilien ou encore le rouble russe ne sont pas en reste et enregistrent de très importants gains sur cette première moitié du mois.

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Données actualisées au 15 décembre 2020. Source : Reuters 

La banque centrale chinoise continue de pénaliser le yuan

Face à la hausse des défauts de paiement en Chine, la banque centrale chinoise (PBoC) multiplie les mesures de soutien et les injections de liquidités via son véhicule de facilité de prêts à moyen terme. L’objectif est clair : soutenir les banques afin d’éviter une réduction de leurs capacités de crédit mais aussi un assèchement de la liquidité qui provoquerait d’importantes tensions sur les marchés de la dette. Après une injection de 300 Mds¥ à la fin du mois dernier, la PBoC a injecté à nouveau 950 Mds¥ ce mardi. L’heure n’est donc pas à durcir les conditions monétaires comme l’avait anticipé un temps les marchés au regard de la solide reprise de l’économie chinoise depuis mars, mais au contraire d’apporter son soutien et éviter tout mouvement de panique au sein d’un marché de la dette d’entreprise qui avoisine les 4 000 Mds$ (source : Financial Times). Le yuan poursuit sa correction face à l’euro et chute sur ce début de semaine à un creux de 2 mois à 7,95 ¥. Dans son malheur, la devise chinoise peut compter sur un différentiel de croissance et monétaire très largement favorable qui devrait lui éviter de subir de trop forts dommages.

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Données actualisées au 15 décembre 2020. Source : Reuters 


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