Habillement européen: Marché mou, importations molles !
Port de Ningbo - Chine

Habillement européen: Marché mou, importations molles !

Après une lourde chute en 2020 suivie d’une légère reprise en 2021, la consommation vestimentaire européenne reste à un niveau extrêmement bas à fin 2021, inférieur de 12 % à celui de 2019. Par rapport à 2019, le recul de 2021 est d’environ 12 % en France, de 15 % en Espagne, de 16 % en Italie et de 6 % en Allemagne.

Cette baisse de la consommation d’habillement s’explique par la pandémie et les problèmes de pouvoir d’achat : craintes de se déplacer et d’attraper le Covid ; peu d’engouement pour acheter de nouveaux vêtements alors que l’on passe une bonne partie de son temps à la maison, par exemple en télétravail ; budgets  des consommateurs plombés par la flambée des prix de dépenses de carburants, gaz, électricité, alimentation  

A ceci s’ajoute les effets de la baisse tendancielle des parts budgétaires d’habillement des ménages, observée depuis des dizaines d’années. En clair, les européens compriment leurs achats de vêtements pour financer les dépenses contraintes (loyers, énergie,…) et/ou satisfaire de nouveaux besoins (communication, informatique, sports, etc.).

Dans ce contexte morose, il n’est donc pas surprenant que les importations d’habillement de l’Union européenne soient elles aussi impactées. Celles des dix premiers mois de 2021 (58,7 milliards d’euros selon les dernières statistiques disponibles), n’augmentent que de 1 % par rapport à leur niveau très faible de fin octobre 2020. Mais on retiendra surtout qu’elles sont inférieures de près de 10 milliards d’euros à celles des dix premiers mois de 2019 ! 

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L’Union européenne compte 205 fournisseurs. Les dix plus importants couvrent 83,5 % des importations totales. Sept d’entre eux sont asiatiques et les trois autres méditerranéens.

La Chine demeure de très loin le plus grand fournisseur de l’Union européenne avec une part de 29,9 % mais est progressivement rattrapée par le Bangladesh.

Les statistiques confirment la poussée des fournisseurs méditerranéens (Turquie, Maroc, Tunisie, Egypte, Jordanie, Israël, Liban,..). Leur part dans les importations totales d’habillement de l’UE était de 17,2 % il y a deux ans. Elle a grimpé à 18,9 % à fin octobre 2021 ; ceci au détriment des pays asiatiques.

Cette évolution favorable aux pays méditerranéens traduit peut-être l’amorce d’un mouvement en faveur du sourcing de proximité. Le proche avenir le dira. Mais elle résulte certainement pour partie de facteurs conjoncturels qui pénalisent plus particulièrement les producteurs asiatiques : activité industrielle et portuaire sérieusement perturbée pour cause de Covid dans des pays comme la Chine, le Bangladesh, le Vietnam ou l’Inde ; flambée des coûts du fret maritime et chute de l’offre de porte-conteneurs, etc.   

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Sept fournisseurs voient progresser leur part dans les importations européennes d’habillement; trois sont en recul.

La chine résiste bien, passant de 29,0 % à fin octobre 2019 à 29,9 % à fin octobre 2021 mais ses ventes reculent de 2,25 milliards d’euros par rapport à 2019. La part du Bangladesh progresse à 19,6 % mais ses ventes chutent de 1,4 milliard d’euros en niveau, en 2 ans. Dopée par la dévaluation de sa monnaie, la Turquie progresse significativement : 12,8 % contre 11 %. L’Inde, sans accord préférentiel avec l’UE et fortement handicapée par le Covid, voit sa part reculer à 4,9 % contre 5,1 % deux ans plus tôt. L’épidémie de Covid perturbe également les exportations du Vietnam, en baisse de 240 millions d’euros par rapport à octobre 2019 mais avec une part en légère progression. Grâce à un sursaut de ses exportations à fin octobre 2021, le Pakistan améliore sa part qui grimpe à 3,6 % contre 3,0 % en octobre 2019. La part du Maroc gagne 0,2 point pour monter à 3,5 % mais les ventes marocaines des 10 premiers mois de 2021 à l’Europe ( +21,4 % /2020) sont encore inférieures de 208 millions d’euros à celles de 2019. Le Cambodge qui a perdu partiellement le bénéfice du régime Tout Sauf Les Armes voit logiquement sa part chuter à 3,3 % contre 4,1 % deux ans auparavant. Les exportations de la Tunisie fléchissent (+ 7,1 % à fin octobre 2021/2020) pour se situer à 170 millions d’euros de moins qu’à fin octobre 2019 ; sa part de la Tunisie est en légère progression à 2,5 %. Le Myanmar, en raison de ses très graves problèmes intérieurs, voit sa part reculer fortement à 2,3 %, avec des exportations elles aussi en baisse de 508 millions d’euros par rapport à celles à fin octobre 2019.      

Les prix des vêtements importés sont en baisse de 2,6 % par rapport à ceux à fin octobre 2020, malgré la hausse très forte du prix des matières, de l’énergie et des transports, ce qui traduit l’extrême morosité du marché final. La baisse des prix est générale sur toutes les provenances, tant asiatiques que méditerranéennes.

 

Jean-François Limantour

Président d’Evalliance   

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