Homo Hypercommunicatus

Homo Hypercommunicatus

Ma Vie Lean (ou presque…) Épisode 29 - Saison 02

Je suis né en 1980, mes deux parents travaillaient. En grandissant je n’ai vu que très rarement mes parents travailler depuis la maison. J’ai toujours eu l’impression que les outils de communication s’arrêtaient lorsqu’ils rentraient chez nous.

De nos jours, amis, famille, clients, et moi même, je suis toujours épaté de nos horaires et du temps que l’on passe au travail et plus précisément à communiquer. Ou plutôt surcommuniquer…

J’imagine pas être le seul a voir l’hypercommunication moderne qui semble vouloir tout envahir – que ce soit dans nos jobs, dans nos vies personnelles ou même dans nos pensées.

Et pour lancer le débat, je m’appuie sur une chronique percutante de Floor Rusman , journaliste du quotidien néerlandais NRC (article dans le lien), qui interroge cette obsession contemporaine de tout commenter, partager, et réagir. Avec les outils Lean comme toile de fond, je vous propose de repenser ce que signifie vraiment bien communiquer.

Hypercommunication et surcharge d’information

Flashback, début des années 2000 : lorsque j’ai commencé à travailler, les échanges étaient (plus ou moins) structurés – des réunions en présentiel, quelques appels, et des emails soigneusement envoyés. Le nombre de moyen de communication était limité (cf, newsletter précédente sur la contrainte).

Puis sont arrivés les portables, les Teams, Slack, WhatsApp, et j’en passe… Aujourd’hui, tout le monde est joignable en permanence, bombardé de messages. Et la frontière entre communication utile et surcharge d’information s’est estompée.

C’est un peu comme ces groupes WhatsApp familiaux où chacun relate sa journée en direct, pour se retrouver le soir sans rien de nouveau à se dire.

Au bureau, c’est pareil : on est coincés dans des boucles de feedback, constamment appelés à ré-agir. Pour Floor Rusman, cette tendance à « tout devoir communiquer » ne sert pas toujours à renforcer la collaboration. La communication devient une fin en soi, créant un cercle infernal où plus on communique, plus on est obligé de le faire, souvent au détriment de la qualité de l’échange et de la clarté.

Lean et Communication – Pour en finir avec le « toujours plus »

L’un des grands principes Lean, c’est la clarté et l’efficacité. La méthode Lean vise à supprimer les gaspillages et les redondances, et, si on y réfléchit bien, est-ce que la communication en excès n’en ferait pas partie?

Les outils Lean comme le management visuel, le Kanban, le Stand-up meeting (ou réunion AIC), et la TPM (Total Productive Maintenance) ont tous un point commun : ils simplifient et recentrent la communication pour qu’elle soit claire, structurée, et compréhensible par tous.

1. Le Kanban : au lieu d’une succession de messages et de check-ins, le tableau Kanban montre visuellement l’état de chaque tâche. Pas besoin de demander « Où en es-tu ? » à chaque étape : l’information est là, disponible, partagée.

2. Le Stand-up Meeting : ces réunions de quelques minutes au début de chaque journée, où chacun fait un point rapide, offrent une vision claire des priorités. On évite ainsi de multiples interruptions dans la journée. C’est un concentré de communication directe et efficace qui répond à un besoin précis.

3. La TPM : dans une usine ou un bureau, la TPM aide à communiquer en amont les tâches nécessaires pour maintenir l’équipement ou le matériel. C’est un moyen de dire : « Voici ce qu’il y a à faire, et voici qui est en charge » – de manière visible, sans répétition ni rappel.

À travers ces exemples, on ne cherche pas à multiplier les interactions, mais à les rendre précises et nécessaires. Cette approche rappelle les observations de Rusman : à trop vouloir « faire passer le message », on finit par perdre en clarté et en impact. Communiquer moins, mais mieux, est une forme de respect, tant pour soi que pour les autres.

En parlant de respect, on peut parler des interruptions constantes dans le travail ? Moi je ne suis pas efficace dans ce monde la… J’ai besoin de ma bulle, et merci Bose Corporation pour la bulle technique dans les open spaces, je vous recommande les QuietComfort Ultra ;) (sujet d’une prochaine newsletter ou j’ai l’impression que l’on impose franchement un mode de travail qui ne convient pas à tous, pour rappel nous sommes et avons des besoins différents).

L’écoute, cet art (presque) perdu

Communiquer n’est pas qu’une question d’émettre des informations, c’est aussi (et surtout) d’écouter. Comme le souligne Floor Rusman, le monde moderne nous encourage à parler, à partager, à réagir… mais rarement à écouter. Le Lean, en revanche, met l’accent sur l’écoute active : au cœur de l’approche Gemba (aller voir sur le terrain), il y a l’idée de vraiment entendre ce que les employés, les clients ou les collègues ont à dire. Ce n’est pas « l’écoute performative » qu’on retrouve dans certains livres de développement personnel ou d’entreprise. Il ne s’agit pas d’écouter pour paraître empathique, mais d’écouter pour comprendre, et pour agir.

L’écoute, c’est aussi savoir faire silence, se donner un temps d’arrêt pour assimiler ce que l’on entend et lui donner du sens.

Imaginez un instant que dans nos échanges quotidiens, on fasse de la place au silence, aux pauses – cet espace qui, loin d’être un vide, permet de donner du poids à ce qui a été dit et de préparer ce que l’on dira ensuite. Des plages horaires de 14h à 16h00, ou, si vous êtes dans cette zone dédiée, c’est silence sans aucune sollicitation (qui a dit ca s’appelle une bibliothèque ?)

Au plus utile…

Et si, plutôt que de chercher à remplir chaque seconde de notre journée par des échanges, on adoptait un modèle de communication inspiré du Lean ? Pas pour réduire la communication à un minimum absolu, mais pour en « optimiser » chaque élément. Comme dans les tableaux Kanban ou dans les réunions AIC, privilégions une communication visuelle, utile, et structurée, qui apporte quelque chose de concret/utile.

En réévaluant notre manière de communiquer, on prend le contrepied de cette obsession moderne que décrit Rusman. Parfois, moins de mots, moins de réactions, et moins de sollicitations, c’est la meilleure façon de se concentrer sur l’essentiel, et d’apporter de la valeur dans chaque échange.

La question est donc simple : sommes-nous prêts à accepter qu’en matière de communication aussi, la règle du Lean s’applique ? En matière d’efficacité, de respect et de clarté, il est peut-être temps de « faire moins, mais mieux ».

Alors, prêts à faire le test ?

A la semaine prochaine,

Nicolas

Patrick Murer

Animateur créatif de la performance et du changement, Black Belt Lean6Sigma. Consultant associé chez Optim Ressources. Multi-fresqueurs. J’ai résidé dans 6 pays et parle français, anglais, allemand et néerlandais.

2 mois

Tout à fait en ligne : aujourd'hui, on parle beaucoup, mais on communique très mal. Comme tu les dis bien dans ton article : COMMUNIQUER, c'est d'abord ECOUTER et écouter activement. Avec les outils actuels, on a l'impression que tout le monde veut être entendu ou identifié comme "communiquant" mais qu'iels ont oublié d'écouter ... et surtout de prendre le temps de bien comprendre avant de réagir ;-)

Marion Bellino-Leresche

Spécialiste Santé en Entreprise

2 mois

Totalement convaincue de l’efficacité du tableau Kanban et du kamishibai!! Il avait permis de rendre notre communication d’équipe plus efficace et plus transparente.

Ghizlane Tala

Transition Manager @ Smart Enterprises | Business Transformation, Change & Coaching

2 mois

Mon dernier moment de paix : l'attente dans un consulat de France à l'étranger, tous les appareils connectés sont consignés à l'entrée. Pour une fois, j'ai adoré attendre, et j'ai fait durer le plaisir 😅 L'astuce de la plage horaire est top, j'y rajoute la coupure du réseau et téléphones en mode avion 😉

Yann AïtBachir

AI @ Google | I share Career Tips in Tech | 1.8k+ Newsletter Subscribers

2 mois

J'adore Nicolas MARIE

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